Quelque Part…

By Poussin <bitterlym@yahoo.fr>

Rated PG

Submitted October 2006

Summary: Ce qui aurait dû être le plus beau jour de sa vie se transforme pour Lois en un véritable cauchemar lorsqu'elle découvre que son fiancé est un criminel, qu'il se suicide pour échapper à la police, que Superman est retrouvé dans le coma dans une cage en kryptonite et qu'elle apprend que Clark est porté disparu… juste au moment où elle découvre que c'est lui celui qu'elle aime vraiment. Aura-t-elle l'occasion de le lui dire un jour? Une fanfic écrite en français.

Note : Cette fanfic m'a été inspirée par la chanson "Somewhere" du groupe Within Temptation. C'est la première fois que j'essaie d'écrire des scènes émouvantes, alors j'apprécierai grandement d'avoir l'opinion de tous ceux qui lisent cette histoire. N'hésitez surtout pas à m'envoyer un mail, que vous ayez aimé ou détesté. Mais j'espère quand même que vous aimerez, bien sûr :).

Bonne lecture.

***

« Qu'est-ce que vous voulez, Luthor ? »

Superman était à bout de nerfs. Il détestait toujours se trouver en compagnie de Lex Luthor, mais après ces dernières semaines de cauchemar, il était particulièrement à cours de patience. Lex avait mal choisi son moment pour abuser de son temps avec des faux-semblants.

Tout dans les manières du milliardaire ne faisait qu'accentuer son dégoût pour l'homme en face de lui tandis qu'il essayait de lui faire la conversation avec un semblant de politesse, comme s'ils étaient de vieux amis.

Il ne serait jamais venu le voir si Lex n'avait pas précisé qu'il voulait discuter de Lois avec Superman lors du message qu'il avait laissé à Clark. Et seule la certitude qu'il avait enfin réussi, avec l'aide de Perry, Jimmy et jack, à amasser suffisamment de preuves pour mettre Luthor à l'ombre pour le restant de sa vie l'empêchait de s'en aller immédiatement sans écouter ce qu'il avait à dire, et le laisser jouer seul à ses petits jeux.

« Un petit service », répondit Lex avec l'assurance d'un homme qui n'était pas habitué à voir ses désirs rejetés. Superman n'en croyait pas ses oreilles. Luthor lui demandait de lui rendre un service ? Il avait l'esprit encore plus dérangé qu'il ne l'avait imaginé.

« Un service ? Venant de moi ? Vous n'êtes pas sérieux ? »

« Si », répliqua Lex, « mais je vais vous expliquer. Lois Lane, ma fiancée, devrait être follement heureuse à la perspective de notre mariage, mais, malheureusement, elle ne l'est pas. »

Tandis qu'il expliquait au super héros pourquoi il l'avait contacté, Luthor continuait à goûter ses vins. Un verre à la main, il s'avança vers un autre tonneau placé plus loin dans la cave tout en parlant. Superman le suivit machinalement tout en gardant ses distances, et avança jusqu'au centre de la pièce.

« Ses amis du Daily Planet lui manquent. En particulier Clark Kent. »

Superman ne s'attendait pas du tout à ce genre de discussion avec Lex lorsqu'il avait décidé de répondre à sa demande et de venir le voir. Ça l'avait profondément soulagé d'entendre Luthor dire que Lois n'était pas heureuse à la perspective d'épouser ce monstre.

Depuis qu'elle l'avait rejeté lorsqu'il lui avait avoué ses sentiments pour elle, en tant que Clark, et qu'elle avait accepté la demande en mariage du milliardaire, il ne savait plus vraiment ce qu'il devait croire concernant Lois. Et pendant toute la durée de l'enquête qu'il avait mené avec Perry, Jimmy et Jack depuis l'explosion du Daily Planet, pour faire tomber Luthor, la peur ne l'avait pas quitté. Et si ce qu'ils trouvaient importait peu à Lois ? Et si elle l'aimait vraiment ? Il ne voulait pas envisager une chose pareille, mais la crainte que ce soit le cas le tenait réveillé la nuit.

Mais d'après ce que Lex disait, Lois n'était pas heureuse, et dans la situation actuelle, c'était une très bonne nouvelle pour lui. Il était vraiment soulagé de le savoir. L'entendre rajouter que la raison pour laquelle Lois n'était pas heureuse, c'était parce que Clark lui manquait, lui fit vraiment plaisir. Mais il était là en tant que Superman, et ce n'était pas une bonne idée de montrer à son Némésis ce qu'il ressentait vraiment.

« Et alors ? » demanda Superman, essayant d'avoir l'air détaché et ennuyé.

« Alors vous et Kent, vous êtes amis. Il vous a transmis un message et vous êtes venu » expliqua Lex.

« Je ne vous suis pas du tout, Luthor. »

« Je voudrais que vous usiez de votre influence pour convaincre Clark d'assister à notre mariage », clarifia-t-il. « Bien entendu, vous êtes invité vous aussi. »

« Vous rêvez ! Arrêtez de vous bercer d'illusions ! Ni Clark ni moi, nous ne ferons jamais quoi que ce soit pour vous apporter notre soutien » répondit Superman avec colère. Lex Luthor devait vraiment être fou pour avoir imaginé, ne serait-ce qu'une seconde, qu'il en serait autrement.

« Ah, je vois », dit-il, l'air déçu. Avec une petite moue résignée, il reprit : « Dans ce cas, je suppose que vous ne m'êtes plus d'aucune utilité. »

Il ouvrit le robinet du tonneau vers lequel il s'était dirigé plus tôt, et une cage tomba immédiatement du plafond, emprisonnant Superman au milieu de la cave. Superman ne put retenir un gloussement de mépris devant un geste aussi idiot et inutile.

« Ce ne sont pas des barreaux… qui vont me retenir, Luthor. »

Il se sentait étourdi. Il connaissait les symptômes, il y avait de la kryptonite dans la cave. Il fit de son mieux pour le cacher, dans l'espoir que Lex croie que ça n'avait pas marché. D'un air décidé, il avança vers les barreaux de la cage. Les tordre et sortir de la cage avant que toute sa force et ses pouvoirs ne l'abandonnent était sa seule chance de ne pas rester prisonnier aux mains de ce détraqué et de le convaincre que la kryptonite n'avait aucun effet sur lui, contrairement aux rumeurs qu'il avait de toute évidence entendues.

« Oh ? J'en prends le pari », jubila Luthor.

Il se saisit d'une télécommande posée près du tonneau et appuya sur le bouton. Aussitôt, les barreaux se mirent à luire d'une lueur verdâtre au moment même où le super héros serrait les barres dans ses mains. La douleur s'amplifia, et Superman ne put se retenir d'hurler. Les barreaux lui brûlaient les mains et il dût les lâcher. Sa force le quittait très rapidement et il s'écroula au sol.

***

Perry remplissait les assiettes de Jimmy et Jack, ainsi que la sienne, avec les écrevisses à l'étouffée très épicées qu'il avait préparées pour le repas du soir tout en écoutant les deux garçons lui rapporter ce qu'ils avaient trouvé durant la journée. Ils commençaient à avoir de sérieuses preuves contre Lex Luthor quant à son implication dans l'explosion du Daily Planet. Ce qui innocentait totalement Jack.

Ils n'avaient plus qu'à attendre le retour de Clark pour savoir s'ils pourraient également prouver que Lex était le fameux « patron ». Et ils espéraient tous que c'était le cas. Ils voulaient le voir plonger pour longtemps.

« Et vous, qu'est-ce que vous avez trouvé, Chef ? »

La voix de Jimmy ramena Perry à la réalité. Pour l'instant, ils ne pouvaient rien prouver d'autre que les pots-de-vin aux membres du conseil d'administration pour qu'ils approuvent le rachat du Daily Planet par LexCorp, ainsi que le fait qu'il ait commandité l'explosion de l'immeuble du journal, par l'intermédiaire de son assistante Mme Cox qui avait engagé John Black pour exécuter le travail et faire porter le chapeau à Jack.

« Une confirmation », répondit Perry, tout en s'installant à table avec les deux adolescents. « Lexel, la filiale du groupe de Luthor, avait pris une assurance pour l'immeuble du Daily Planet. »

« De combien ? » s'enquit Jack.

« Environ deux fois ce qu'il aurait fallu pour le reconstruire. Lex Luthor a empoché un joli chèque de 85 millions. »

« C'est une preuve ! » s'exclama Jimmy. « Il est coincé ! »

Oui, ils pouvaient faire tomber Lex Luthor pour arnaques à l'assurance, mais Perry espérait toujours que Clark rentre à l'appartement avec des preuves de tous les autres crimes de Luthor. Al Capone s'était fait coincé pour fraude fiscale, mais ô combien plus réjouissant il aurait été de l'arrêter pour tous ce qu'il avait fait ? Perry espérait que l'histoire ne se répèterait pas avec Luthor, et que celui-là se verrait publiquement condamné pour tous ses crimes.

« Alors qu'est-ce qu'on attend encore ? » demanda Jack avec une pointe d'impatience. Bien sûr, il était le plus pressé d'eux tous de coincer Lex Luthor, car c'était à lui que le milliardaire avait fait porter le chapeau.

« Clark », répondit Perry. « Asseyez-vous, il va arriver. »

Les deux jeunes garçons prirent place autour de la table avec leurs assiettes, prêt à gouter la cuisine de leur chef. Après dîner, Perry envisageait d'aller voir Franklin Stern, un homme d'affaires qui avait eu maille à partir plusieurs fois avec Lex Luthor par le passé, dans l'espoir de faire revivre le Daily Planet. Se venger de Luthor était bien, mais ranimer le journal serait encore mieux.

Tandis qu'ils l'attendaient en mangeant, personne ne se doutait encore que Clark n'était pas près de rentrer à l'appartement.

***

Après avoir passé la soirée à l'opéra avec Lois, Lex ne put s'empêcher de vouloir retourner dans la cave voir l'agonie de son ennemi. Il fut un peu déçu de constater qu'il était toujours conscient. Il espérait que peut-être il serait déjà mort. Mais la déception laissa très vite place à la jubilation. Il mourrait très lentement. C'était parfait. Et il pouvait profiter que le super héros était toujours conscient pour s'amuser davantage encore.

Lex savait, bien sûr, que Lois était amoureuse de Superman, et il soupçonnait l'homme d'acier d'être amoureux de Lois également, bien qu'il ne comprenait pas pourquoi dans ce cas Superman n'avait pas simplement avoué ses sentiments à Lois pour empêcher leurs fiançailles. Mais quelles que soient ses raisons, Lex savait que Superman aimait Lois et que ça le ferait souffrir autant que la kryptonite de les imaginer ensemble. Il passa donc plus d'un quart d'heure à jubiler devant la cage en lui décrivant tous les fantasmes qu'il espérait réaliser avec Lois dès que leur mariage serait prononcé le lendemain matin.

A sa grande déception, l'homme d'acier ne broncha pas, excepté les légers gémissements de douleur qui échappaient de sa bouche de temps à autre alors que des vagues de douleur le submergeaient et le laissaient de plus en plus faible. Lex décida alors de changer de tactique. S'il ne pouvait pas blesser Superman dans son amour pour Lois, il pouvait le blesser en utilisant contre lui son désir de la garder saine et sauve.

« J'aime Lois. Je crois que je l'aime vraiment, mais… elle est trop indépendante, vous ne trouvez pas ? Je vais arranger ça. »

Cette fois-ci, Luthor eut ce qu'il attendait. Superman réagit. Il releva la tête et le regarda avec haine, et Luthor savoura son triomphe. C'était lui qui avait appris au héros déchu ce qu'était la haine et l'envie de meurtre. Mais c'était trop tard pour lui. Il allait mourir dans d'atroces souffrances. Il avait gagné ! Il était le meilleur des deux !

« Clark Kent sait où je suis » dit Superman avec difficulté, comme si utiliser sa voix était devenu un effort trop grand pour lui.

« Alors dans ce cas je l'éliminerai. Mais on verra ça plus tard. Dites-moi, vous… »

« Luthor… » l'interrompit Superman.

« Oh ! Comme c'est étrange ! Comme c'est étrange de vous entendre prononcer mon nom, sachant que c'est peut-être bien pour la dernière fois. »

Après un court silence, Lex ressortit de la cage où il était entré pour narguer son ennemi, referma la porte derrière lui et mit les clés dans sa poche.

« Je reviendrai quand le mariage sera terminé. Et nous aurons, vous et moi, un petit… »

Il s'interrompit pour regarder rêveusement une hache accrochée sur les murs de la cave.

« …tête-à-tête », reprit-il. « Je vous souhaite une longue agonie ! »

Très joyeux, Lex sortit de la cave et se prépara à aller se coucher. Il avait eu une excellente journée. Celle du lendemain promettait d'être meilleure encore. Le lendemain, il épouserait Lois Lane, et il verrait Superman mourir. Enfin.

Sur le chemin le menant à ses appartements privés, Lex croisa la route de son assistante personnelle.

« Ah. Madame Cox ! Vous tombez bien. Je viens d'avoir une petite conversation avec notre invité dans le cellier. »

« Tout va comme prévu, Lex ? » demanda-t-elle.

« Oui ! Tout se déroule à merveilles ! Je crois qu'il va souffrir pendant encore plus longtemps que ce qu'on avait prévu ! » jubila Luthor. Son assistante sourit, visiblement ravie elle aussi de la situation. « Mais il a soulevé un point intéressant pendant notre conversation. Je voudrais éliminer Kent aussi. »

« Bien, Lex. Vous avez une idée précise pour sa mort, ou vous désirez que je m'occupe des détails ? » s'enquit-elle sur son ton le plus professionnel.

« Nous en discuterons demain, après le mariage, Madame Cox. Je souhaite profiter pleinement de la mort de notre compère en bleu d'abord avant d'éliminer son ami. »

***

Lex Luthor était prêt pour son mariage. En attendant le début de la cérémonie, il était redescendu à la cave pour narguer Superman une dernière fois avant d'épouser Lois Lane. Il prévoyait de le tuer juste après la cérémonie. Une sorte de cadeau de mariage qu'il s'offrait à lui-même. Et le spectacle qui l'avait accueilli lorsqu'il avait descendu les marches lui avait beaucoup plu.

Superman était prostré au sol, immobile, inconscient. Il était entré dans la cage, et avait réveillé Superman d'un coup de pieds dans les côtes. Il avait ouvert les yeux en criant, et était resté au sol à se tordre de douleur en gémissant doucement, au bord de l'inconscience. Lex l'avait nargué un peu, mais il doutait que la moindre de ses paroles ait pénétré l'esprit de Superman. Alors il s'était contenté de le regarder souffrir, et il avait ajouté quelques coups supplémentaires pour l'entendre crier davantage encore.

Oui, Lex Luthor vivait probablement l'un des plus beaux jours de sa vie, et il en était conscient. Il voulait garder en mémoire chaque instant, quels magnifiques souvenirs il était en train de se forger. Et la journée venait à peine de commencer. Dans quelques minutes, la cérémonie de mariage commencerait, puis il pourrait tuer Superman. Ensuite il irait à la réception qu'il donnait pour fêter la journée, et il serait le point de mire de toute l'assemblée venue partager son bonheur. Et il pourrait finir la journée en planifiant la mort de Clark Kent et enfin, Lois Lane serait à lui dès le coucher du soleil. Si seulement toutes les journées pouvaient ressembler à celle-ci.

Souriant, il referma la cage sur le super héros qui rechutait dans l'inconscience, remis la clé dans sa poche et remonta les marches. Il était temps d'épouser Lois Lane.

Il souriait toujours lorsqu'il entra dans la salle réception où des centaines d'invités, dont certains étaient de hautes personnalités, étaient déjà assis à attendre que le mariage ne commence. Il était entré par une petite porte latérale et alla directement prendre sa place devant l'autel.

D'un signe de tête, il indiqua que la cérémonie pouvait commencer. Le pianiste se mit à jouer la marche nuptiale, tandis que deux serviteurs positionnés au bas de l'allée centrale ouvraient en grand les portes principales de la salle pour révéler Lois, somptueusement vêtue d'une longue robe de mariée en satin et dentelle rehaussée de broderies en perles. Il sourit encore plus largement. Plus que quelques instants d'attente, et elle serait à lui. Enfin. Il avait gagné.

***

Lorsque Lois entendit résonner les premiers accords de la marche nuptiale, elle savait que le moment était venu, et se prépara à faire face à l'avenir qu'elle s'était choisi. Peu importe ce que sa mère venait de lui dire, il était trop tard pour elle écouter et suivre son cœur. Elle avait accepté d'épouser Lex Luthor, elle ne pouvait pas le quitter maintenant, devant tous ses associés et amis, devant tous ces gens, dont certains étaient très connus dans le monde des affaires ou de la politique. Elle ne pouvait pas l'humilier aussi publiquement. Il était trop tard. Elle devait assumer les conséquences de ses actions, malgré ses doutes quant au bonheur que lui apporterait cette union.

Elle n'était pas amoureuse de Lex, elle ne l'avait jamais été, et bien qu'elle avait entretenu l'espoir que cela pourrait changer à l'avenir lorsqu'elle avait accepté sa demande en mariage, elle savait aussi que cela n'arriverait jamais. Elle n'aimerait jamais son époux. Elle ne ressentirait jamais rien pour lui de plus que de l'amitié.

Alors pourquoi avait-elle dit oui ? Elle ne savait plus. A l'époque où ils s'étaient fiancés, il y avait un autre homme pour lequel elle ne ressentait que de l'amitié, mais celui-là, elle l'avait rejeté. Et elle ne se souvenait pas pourquoi. Pourquoi avait-elle choisi Lex plutôt que lui ? Elle le regrettait maintenant.

Elle ne l'avait presque pas vu ces dernières semaines, depuis qu'elle l'avait rejeté le jour où il lui avait dit qu'il l'aimait. Et les deux seules fois où elle l'avait revu depuis, ils s'étaient disputés et avaient échangé des paroles très blessantes. D'abord le lendemain même de sa déclaration d'amour, ils avaient bien failli gâcher la fête de départ à la retraite de Perry avec leur dispute.

Après ça, des semaines s'étaient écoulées sans avoir la moindre nouvelle de lui, et il lui avait manqué. Elle ne s'attendait pas du tout à ce que son partenaire lui manque autant lorsqu'il n'était pas là. Elle avait besoin de savoir qu'il allait bien. Elle lui avait téléphoné, mais il était resté très distant.

Elle pensait qu'après avoir entendu sa voix, ça irait mieux, mais il lui manquait encore plus qu'avant. Elle voulait le revoir. Et quelques jours plus tard, elle avait décidé d'aller chez lui. Elle n'était jamais arrivée jusque là. Elle l'avait aperçu dans la rue, raccrochant un téléphone dans une cabine publique, et se mettre à marcher dans la rue, en direction de chez lui. Elle avait arrêté la voiture à sa hauteur pour lui parler, mais ils s'étaient de nouveau disputés.

Il avait refusé de venir assister à son mariage et était parti sans se retourné. C'était juste la veille, en début d'après-midi. Et depuis, elle n'arrivait plus à le chasser de sa tête. L'avoir revu, même juste quelques minutes, lui avait fait prendre conscience du vide qu'elle avait dans sa vie depuis qu'il en était sorti.

Elle s'était trompée lorsqu'elle lui avait dit qu'elle ne l'aimait que comme un ami quelques semaines plus tôt. Elle s'était leurrée elle-même. Elle éprouvait bien plus que ça pour lui. Elle n'était pas sûre de savoir exactement ce qu'elle éprouvait, mais c'était plus fort que de l'amitié. L'amitié, c'était ce qui la liait à son fiancé. Pouvait-elle être amoureuse de lui ? L'idée lui aurait parue incongrue ne serait-ce que vingt-quatre heures plus tôt. Elle aurait répondu qu'elle aimait Superman. Mais elle était obligée d'admettre à présent que durant ces dernières semaines, elle avait vu Superman encore moins souvent que Clark, et qu'il ne lui avait pas vraiment manqué. Pas comme Clark, en tout cas.

Mais peu importait ce qu'elle éprouvait pour son ancien partenaire, il valait mieux ne pas s'interroger sur ses sentiments et tenter d'y voir plus clair. Elle l'avait repoussé et s'était fiancée à Luthor. Elle passerait sa vie avec Luthor. Elle devait s'efforcer d'oublier Clark.

Dès qu'elle entendit les premiers accords de la marche nuptiale, elle le chassa donc de son esprit et se prépara à faire face à l'avenir qu'elle avait choisi. Moins d'une seconde plus tard, les portes s'ouvraient, et elle put voir Lex qui lui souriait. Un instant, elle fut déçue que l'homme près de l'autel soit Lex, mais elle se reprit immédiatement et lui rendit son sourire avant de commencer à remonter lentement l'allée vers lui.

Mais malgré tous ses efforts, elle n'était pas capable de penser à un autre que Clark. Son sourire, si tendre, et le regard plein d'adoration qu'il lui avait dédié un soir où ils travaillaient tard, lors de leur première investigation ensemble. Le désir qu'elle avait pu voir sur son visage lorsqu'elle s'était assise sur son bureau, exhibant sa jambe devant lui alors qu'elle était sous l'effet d'un puissant aphrodisiaque. L'expression hantée de son visage lorsqu'il s'était penché vers elle pour lui donner un baiser d'adieu la nuit où il avait décidé de démissionner et de quitter Metropolis.

« Au revoir, Lois. »

Ce souvenir était si vivide dans son esprit qu'elle entendait encore les mots qu'il avait prononcés cette nuit-là, comme s'il venait de les lui dire. Et tout son être se révolta à cet adieu. Elle ne voulait pas qu'il parte. Non ! Elle avait besoin de lui dans sa vie ! Elle l'aimait…

La réalisation qu'elle aimait réellement Clark Kent la ramena brutalement à la réalité. Elle avait remonté toute l'allée, et elle avait rejoint Lex devant l'autel où ils devaient se marier. Elle s'était aperçue de ses sentiments pour lui trop tard. La cérémonie de mariage commençait.

Elle avait besoin de le voir, alors elle se retourna vers les invités, mais il n'était pas là. Aucun de ses amis n'était là. Sa famille non plus. Seule sa mère avait fait le déplacement pour assister à son mariage. Elle se sentit encore plus déprimée. Elle avait vraiment besoin de sa présence. Sa mère lui sourit tristement pour l'encourager à faire ce qu'elle devait, et Lois repensa à la discussion qu'elles avaient eu pendant qu'elle se préparait avant la cérémonie.

Elle avait enfilé sa robe, et elle répétait devant le miroir son nom de femme mariée, mais elle n'avait jamais réussi à faire sonner juste le nom Luthor dans sa bouche. Le nom Kent paraissait tellement plus naturel. Elle s'était mise à pleurer, et sa mère lui avait dit que si elle avait le moindre doute, elle ne devait pas épouser Lex, et que le plus important était de suivre son cœur.

Elle se tourna de nouveau vers l'autel au moment où Lex répondit « Oui, je le veux ». L'archevêque tourna alors son attention vers elle.

« Et vous Lois, voulez-vous prendre cet homme pour légitime époux devant Dieu et devant les hommes, pour le meilleur et pour le pire ? Promettez-vous de l'aimer et de le chérir jusqu'à ce que la mort vous sépare ? »

« Je… »

Elle savait ce qu'elle devait répondre, ce que tout le monde attendait comme réponse, ce qu'elle s'était engagée à répondre en acceptant la demande en mariage de Lex, mais les mots ne voulaient pas sortir de sa bouche. Elle réessaya.

« Je… »

Sa voix refusa une fois encore de lui obéir tandis qu'elle réentendait dans son esprit la voix de l'archevêque. « Promettez-vous de l'aimer et de le chérir jusqu'à ce que la mort vous sépare ? » Non, elle ne pouvait pas promettre ça. Pas à Lex en tout cas. Elle ne pouvait pas.

« Lois ? » demanda Lex, inquiet par son long silence.

« Je regrette. »

Voilà. C'était dit. Elle avait refusé de l'épouser. Elle avait finalement fait le choix qu'elle souhaitait vraiment. Un peu tard, mais pas trop tard. Le mariage n'aurait pas lieu. Elle ne pouvait pas épouser Lex. Elle n'en était pas capable.

Elle se tourna vers lui, désolée de lui infliger ça, et vit le choc qui se lisait sur son visage. Mais il n'eut pas le temps de réagir. Les portes de la salle venaient de s'ouvrir en grand pour laisser passer Perry et Henderson, suivis de Jack, Jimmy et de toute une brigade de police.

« Lois ! Arrêtez ce mariage ! Vous ne pouvez pas épouser cet homme ! » cria Perry dès son entrée dans la salle

« Que signifie cette intrusion ?! » demanda Lex avec colère aux hommes qui se dirigeaient vers lui et Lois en haut de l'allée.

« Ça signifie, Luthor, que vous êtes foutu. Nous avons toutes les preuves qu'il nous fallait », répondit Perry d'une voix glaciale. Mais de quoi parlait-il ?

« Vous avez des preuves de quoi ? » s'enquit Lois, perplexe. Mais personne ne lui prêtait la moindre attention. Tout le monde regardait Luthor. Henderson lui montra un papier qu'il avait à la main tout en se mettant à lui parler.

« Voici un mandat d'arrêt pour incendie volontaire et beaucoup trop de crimes pour que je puisse les citer. »

« Mais vous avez complètement perdu la tête ! » rétorqua Luthor tandis que l'inspecteur de police continuait sans s'occuper de l'interruption. Lois ne comprenait plus rien. Son monde venait de s'écrouler.

« Vous avez le droit de garder le silence. Vous avez le droit de vous faire assister par un avocat. Si vous n'avez pas les moyens de vous payer un avocat… »

Lex sentit la furie l'envahir en écoutant le policier lui dire ses droits, mais il ne pouvait pas laisser passer une telle insulte sans rien dire.

« J'ai les moyens de m'offrir les services d'une centaine d'avocats ! Vous me le paierez ! Je vous ferais radier de la police ! Appelez-moi le gouverneur, allez ! Appelez-moi le Président !!! Je veux lui parler immédiatement !!! »

A ce moment précis, il vit des policiers emmener son assistante Mme Cox, avec les menottes aux poignets et la réalité de la situation dans laquelle il se trouvait le rattrapa. Le temps des petits jeux était terminé. Quand Henderson essaya de le saisir, il se dégagea d'un geste brusque et frappa le policier. Il se mit à courir vers la porte latérale qu'il avait empruntée plus tôt pour entrer dans la salle, frappant les policiers qui se trouvaient sur son chemin. Henderson se releva et se mit à le poursuivre, suivi par tous les policiers qui l'accompagnaient.

Le choc se dissipa peu à peu, et Lois se mit à pleurer. Comment en était-elle arrivée là ? Elle avait besoin de Clark, mais face à elle, il n'y avait plus que Perry, Jimmy et Jack. Clark n'était pas venu. Elle pleura plus fort et sa mère se leva de son siège et courut vers elle pour la réconforter.

« Oh, chérie ! Je sais que tu dois être terriblement déçue… »

« Pourquoi ? » demanda amèrement Lois. « Finalement, tous mes amis sont venus à mon mariage… »

Tous sauf un. Elle avait vraiment tout foutu en l'air.

***

Lex descendit les escaliers menant à la cave en courant. Il avait les policiers sur les talons. Il n'avait pas une minute à perdre. Mais quitte à se faire prendre, il voulait avoir au moins la certitude que Superman était mort. Il arracha la hache du mur au passage et se précipita vers la cage dans laquelle le super héros était toujours inconscient au sol. Il chercha les clés dans sa poche mais il ne les trouva pas. Il avait dû les faire tomber dans sa fuite, ou lorsqu'il se battait contre les policiers qui lui barraient le chemin.

Furieux que le destin se soit ainsi ligué contre lui pour l'empêcher de tuer Superman, il planta la hache d'un geste violent dans le tonneau le plus proche. Il entendit les policiers qui se rapprochaient de la porte de la cave. Il n'avait plus de temps à perdre. Il se remit à courir vers une autre issue qui lui permettrait de regagner directement son bureau, au dernier étage de la tour, et de là, rejoindre son ascenseur privé qui était sa dernière chance d'atteindre le parking et de quitter l'immeuble sans se faire attraper.

Il courut aussi vite qu'il put, les policiers sur ses talons, mais lorsqu'il gagna enfin son bureau, il vit Henderson entrer par l'autre porte. Il était coincé. Il ne pouvait plus rejoindre son ascenseur privé. Il se précipita sur le balcon, mais les policiers l'y suivirent. Désespérant de pouvoir les semer, il grimpa sur le rebord de la terrasse.

***

« Et moi qui pensait avoir tellement d'intuition ! » se lamenta Lois, tandis que Perry, Jimmy et Jack l'escortaient hors de la LexTower où elle avait failli épouser Lex Luthor.

Elle portait toujours sa robe de mariée, et ses larmes coulaient toujours librement. Elle ne s'était jamais sentie aussi mal de toute sa vie. Elle avait été la meilleure journaliste d'investigation de la ville, et elle s'était laissée avoir par les belles paroles de Luthor comme une bleue. Elle était passée à un cheveu d'épouser un criminel international sans aucune morale, alors qu'elle ne l'aimait même pas. Elle s'était heureusement rendue compte à temps de ses sentiments pour son ancien partenaire et avait rompu devant l'autel juste avant que la police ne débarque pour l'arrêter.

« Ne vous faites pas de reproches. On s'est tous laissés berner », tenta de la réconforter son ancien éditeur en chef, qu'elle considérait comme son père.

« Pas moi », objecta Jack.

« Moi non plus. Je ne lui ai jamais fait confiance », renchérit Jimmy.

Clark non plus, ajouta mentalement Lois, en se remémorant toutes les fois où il avait essayé de la mettre en garde contre Lex. Elle ne l'avait jamais écouté. Oh Clark ! Elle avait tellement besoin de le voir.

« Où est Clark ? » demanda-t-elle. Perry, Jimmy et Jack s'arrêtèrent alors et se consultèrent des yeux. Lois sentit la peur l'envahir. Pourquoi n'était-il pas là, avec les autres ? Que lui était-il arrivé ? Où était-il ?

« Où est Clark ? » insista-t-elle. Elle avait besoin d'une réponse. Ce fut Perry qui lui répondit.

« Nous ne savons pas. Il… Personne ne l'a plus revu depuis hier. On n'a aucune nouvelle. »

Disparu…

Clark avait disparu…

Lois sentit le froid l'envahir à la pensée qu'elle ne le reverrait peut-être plus jamais. Elle venait de comprendre qu'elle l'aimait, mais il était trop tard. Il avait disparu. Il n'était plus là. Et il se pouvait qu'il ne revienne jamais. Elle ne le reverrait peut-être plus jamais. Elle n'aurait peut-être plus jamais l'occasion de lui demander pardon et de lui dire qu'elle l'aimait. Et les derniers mots qu'ils auront échangés auront été des mots de colère…

Les mouvements et les cris de la foule autour d'elle la ramenèrent à la réalité. Ils regardaient tous vers le ciel, et machinalement elle leva les yeux. Lex se tenait debout sur le mur du balcon de son bureau, au dernier étage de la tour la plus haute de Metropolis. Et soudainement, il se jeta dans le vide.

Tout paraissait se dérouler au ralenti. Elle le voyait tomber comme au ralenti. Et en même temps, tout se déroula très vite. C'était comme si moins d'une seconde s'était écoulée avant qu'il ne vienne s'écraser au sol à quelques mètres d'elle.

Sous le choc, elle s'écroula par terre, et se retrouva assise sur le trottoir. Elle vomit dans le ruisseau tout ce que contenait son estomac. Quelle journée de cauchemar ! Et il n'était même pas midi.

Perry, Jimmy et Jack s'accroupirent à ses côtés, pour la soutenir. Mais c'était de Clark qu'elle avait besoin. C'était vers Clark qu'elle se tournait en cas de coup dur. Mais il n'était pas là. Perry avait dit qu'ils n'avaient aucune nouvelle, que personne ne l'avait revu depuis la veille, mais quelqu'un devait bien savoir. Clark était forcément quelque part.

Tournant résolument le visage loin de la vision du corps disloqué de son ex- fiancé, Lois se raccrocha à l'espoir que ce n'était qu'une petite disparition passagère dont Clark était si coutumier. Il allait revenir, bien sûr. Il n'était pas le genre à l'abandonner. Il allait forcément revenir.

« Où est Clark ? » redemanda-t-elle.

Perry soupira de frustration. Il aurait aimé lui donner une autre réponse, mais il n'en avait pas.

« Nous ne savons pas, Lois. Il n'est pas rentré à l'appartement hier soir. Nous l'avons attendu toute la soirée, mais il n'est pas rentré. »

« Oui, mais ensuite on a vu qu'il avait laissé les notes sur ce qu'il avait découvert sur Luthor pendant la journée, les preuves et tout, sur son bureau. Donc il est repassé à l'appartement, avant que le Chef n'arrive. C'est sûr », expliqua Jimmy.

« Il a dû ressortir, apparemment », ajouta Jack. « Il avait un message de Luthor sur son répondeur, mais la lumière ne clignotait pas. Ça veut dire qu'il l'a écouté. »

« Lex voulait que Clark contacte Superman. Il avait quelque chose à lui dire à propos de vous », enchaina Perry. « On n'en sait pas plus ».

Lois se sentie à la fois paniquée et rassurée. Clark avait disparu suite à un appel de Lex, mais Clark était probablement ressorti pour aller chercher Superman. Que pouvait-il lui arriver de mal quand Superman était dans les parages.

« Et vous avez appelé Superman pour lui demander s'il savait où était Clark ? » demanda Lois, confiante. Superman savait probablement, et dès qu'ils lui parleraient, il les rassurerait tous sur le sort de Clark.

Mais les regards encore plus désolés qu'ils lui lançaient la troublèrent profondément. Ils avaient d'autres mauvaises nouvelles pour elle, elle le sentait à leur hésitation à lui répondre.

« Superman ne répond pas lorsqu'on l'appelle », expliqua Jimmy. « Personne ne l'a vu non plus depuis hier ».

« Ouais, et cette nuit, il y a eu des centaines de mort au Chili à cause d'une coulée de boue. Et Superman n'est pas allé aider les secours. C'est pas comme s'il ne répondait pas à nos appels parce qu'il était occupé ailleurs. C'est comme s'il n'était plus nulle part, lui aussi », continua Jack.

Lois craignait le pire. Ce n'était pas rare que personne ne sache où se trouve l'homme d'acier. Même pendant une journée complète. Mais c'était des jours où il ne se passait rien. Pas des jours où une catastrophe se produisait au Chili, et où on l'appelait à l'aide ici, à Metropolis. C'est à ce moment-là que Lois s'aperçut qu'il ne s'était pas montré non plus pour rattraper Lex dans sa chute mortelle. Et elle savait que ça n'avait rien à voir avec le passé criminel de Luthor. Superman n'agissait pas comme ça. S'il avait pu, il l'aurait sauvé. Et il aurait sauvé ces gens au Chili. Il ne l'avait pas fait parce que…

Parce que Superman aussi avait disparu…

C'était une pensée étrange. Il était invulnérable, alors comment pouvait-il avoir disparu ? Ce n'était pas possible. Rien ne pouvait lui arriver, c'était Superman ! Il n'avait pas disparu. Il était simplement… ailleurs. Quelque part où personne ne pensait à le chercher. Comme Clark. Il était forcément quelque part, mais… ailleurs.

En fait, pensa Lois avec un renouveau d'espoir, peut-être même sont-ils ensemble. C'est ça, ça lui paraissait tellement logique. Clark avait reçu l'appel de Lex qui voulait parler à Superman. Il était ressorti pour aller chercher le super héros, et probablement lui dire en même temps tout ce qu'ils avaient découvert sur les activités criminelles de Luthor. Et ils étaient encore ensemble. Ils allaient bientôt revenir à Metropolis et seraient surpris d'apprendre que Lex était mort.

Elle avait peur pour rien. Ils allaient bien. Ils étaient ensemble. Et Superman ne laisserait jamais rien arriver à Clark. Il le protègerait. Donc aucune raison de s'inquiéter. Ils avaient juste besoin d'attendre leur retour, et ensuite, elle pourrait dire à Clark qu'elle l'aimait. Et elle pourrait s'excuser de toutes les méchancetés qu'elle lui avait dites.

Le bruit d'une ambulance qui arrivait et se garait devant l'immeuble brisa le cours des pensées de Lois. Elle s'attendait à ce que les hommes qui sortaient de l'ambulance emportent le corps de Lex à la morgue. On ne pouvait pas le laisser comme ça, sur le trottoir. Mais les ambulanciers sortirent de l'ambulance en transportant un brancard très rapidement à l'intérieur de la tour. Quelqu'un avait été blessé. Probablement que Lex avait blessé l'un des policiers qui le poursuivaient lorsqu'il tentait de s'enfuir.

Lois entreprit de raconter à ses amis sa théorie, comme quoi Superman et Clark étaient probablement ensemble, sain et sauf. Ils allaient bien.

Mais les ambulanciers ressortaient déjà de l'immeuble, accompagnés d'Henderson et de nombreux policiers. Sur le brancard était étendu Superman, inconscient. Le monde ralentit de nouveau autour de Lois tandis que l'ambulance redémarrait, emportant le corps inconscient du super héros. Superman n'allait pas bien. Il n'était pas en train de protéger Clark. Et Clark était toujours porté disparu depuis hier…

C'en était trop pour elle. Elle avait eu trop de chocs dans la matinée. Elle s'évanouit.

***

Quand elle reprit conscience, elle était assise à l'arrière d'une voiture de police garée devant la LexTower. La portière à côté d'elle était ouverte. Et Perry, Jimmy et Jack se trouvaient toujours là, près d'elle. Henderson était avec eux. Elle pouvait voir que le corps de Lex avait été évacué, et une bonne partie de la foule s'était dispersée.

Henderson lui mit un gobelet avec de l'eau dans la main et elle but. Ses idées s'éclaircirent et elle se sentit désespérément lasse. Clark avait disparu alors qu'elle venait de s'apercevoir qu'elle l'aimait. Elle perdait toujours tous ceux qu'elle aimait. Pourquoi avait-elle pensé que ce serait différent cette fois-ci ?

« Vous allez mieux, Lane ? » demanda l'inspecteur Henderson avec sollicitude.

« Oui, merci. »

« Bien. Vous permettez que je vous pose quelques questions ? » reprit-il sur un ton plus professionnel.

Elle aurait aimé dire non. Elle ne se sentait pas suffisamment bien pour répondre à un interrogatoire tout de suite, mais elle savait aussi qu'elle devait le faire. Perdre du temps ne ferait qu'aggraver la situation. Ils ne devaient pas laisser les pistes se refroidir s'ils voulaient avoir une chance de retrouver Clark, alors elle acquiesça d'un signe de tête.

« Alors dites-moi, qu'est-ce que vous savez sur les activités illégales de votre fiancé? »

Lois le fusilla du regard. Etait-il en train de l'accuser d'être la complice de Lex ?

« Rien du tout, Inspecteur », répliqua-t-elle avec aigreur. Elle avait du mal à dissimuler sa colère à cette question très insultante.

« Vous fâchez pas, Lane. Je ne vous accuse de rien. Je sais que si vous aviez soupçonné quoi que ce soit, vous auriez tenté de l'exposer dans un article, et ensuite vous seriez venue m'en parler. Mais je suis obligé de demander, c'est le boulot », tenta de la calmer le policier. « Mais je crois qu'il est quand même possible que vous ayez vu ou entendu des choses sans savoir de quoi il retournait, et que ça pourrait nous aider… »

Lois accepta ses excuses d'un simple signe de tête et fouilla dans sa mémoire pour essayer de se souvenir de quoi que ce soit qui aurait pu être suspect, mais auquel elle n'avait prêté aucune attention sur le moment.

« Euh… Non, je n'ai jamais rien vu ou entendu de bizarre. Il ne discutait jamais travail avec moi ou devant moi. C'était rare, en tout cas, et rien de suspect, ça c'est sûr. Oh… si. Il y a peut-être bien eu quelque chose… » ajouta-t-elle pensivement après qu'un souvenir lui soit revenu. « La semaine dernière, pendant qu'on préparait les plans de notre future appartement, son assistante est venue nous interrompre pour passer son emploi du temps en revue avec lui. Elle a parlé de tests pour… euh… la série K, je crois. Ou quelque chose comme ça. Ensuite, Lex s'est absenté pour prendre un coup de téléphone et quand j'ai demandé à cette femme ce qu'était la série K, elle m'a dit que c'était confidentiel, et que Lex ne me disait pas tout. Je ne sais pas du tout ce qu'est cette série K. Ça fait peut-être partie de ses affaires légales. Ou peut-être pas. Je ne sais pas. »

« D'accord. Rien d'autre qu'il aurait laissé échappé devant vous ? »

« Non, je vous le dis. Il ne discutait jamais de ses affaires devant moi. Et quand j'essayais de l'interroger, il me répondait toujours qu'il ne voulait pas m'ennuyer avec ce genre de détails, et il changeait de sujet. Bon Dieu ! Je n'arrive pas à croire que j'ai été aussi stupide ! »

« Il a berné beaucoup de monde. Vous ne devriez pas vous sentir coupable. Mais cherchez bien dans votre mémoire. Rien d'autre ? Vous êtes sûre ? » insista Henderson.

« Il a un bunker sous Metropolis. Il me l'a montré lorsque le météore menaçait de percuter la Terre. C'était très sécurisé, et assez bien entretenu. Peut- être qu'il se montrait juste prudent pour le cas où il en aurait besoin, où peut-être qu'il l'utilisait régulièrement. Je ne sais pas, pour cacher des documents ou certaines affaires qu'il ne tenait pas à voir divulguées au grand jour. » ajouta Lois. Mais quand l'inspecteur de police rouvrit la bouche pour poser une autre question, Lois l'interrompit. « Mais Lex est mort, l'enquête sur lui peut attendre ! Clark a disparu. Vous devez le retrouver, c'est plus urgent ! »

« Clark ? » demanda Henderson, surpris.

« Oui, Inspecteur Henderson », interrompit Perry. « Il n'est pas rentré chez lui, hier soir. Il… euh… Il nous héberge, tous les trois. On l'a attendu toute la nuit, mais il n'est jamais revenu. »

« Je croyais que c'était Kent qui avait trouvé les preuves que vous m'avez apporté ce matin, comme quoi Luthor était le Patron ? » demanda Henderson.

« Oui, c'est exact. C'est lui qui est à l'origine de l'enquête qu'on a mené, et c'est lui qui a trouvé les preuves qu'on vous a apportées ce matin. Il a, apparemment, découvert tout ça hier. On l'attendait, mais quand il n'est pas revenu, on a essayé de trouver où il pouvait bien être, et en regardant dans son bureau, on a vu toutes ses notes, qu'on vous a remises. Donc, il était revenu et reparti. Alors on a écouté le répondeur. Il avait un message de Luthor qui voulait qu'il contacte Superman pour lui parler. Et c'est tout. » expliqua l'ancien éditeur en chef.

« Hum », grogna Henderson, les sourcils froncés, perdu dans ses réflexions. « Donc, Luthor a utilisé Clark pour attirer Superman dans son piège, et ensuite, Clark a disparu », récapitula le policier après quelques instants de silence.

« Quel piège, Henderson ? Qu'est-ce que Lex a fait à Superman ? » demanda Lois. Dans le tumulte de toutes ses émotions, elle avait un peu oublié qu'elle avait vu une ambulance emmener un Superman inconscient. Elle était terriblement inquiète. Qu'est-ce que Lex avait bien pu lui faire ?

« Nous ne savons pas exactement. Quand Luthor tentait de s'enfuir, on s'est séparé en plusieurs groupes pour occuper tout le bâtiment et lui couper toute retraite possible. Il est descendu directement à la cave, et le groupe de policiers qui le suivait y ont trouvé Superman, inconscient, prisonnier dans une cage. Apparemment, Luthor était descendu là pour l'achever à coup de hache, mais on pense qu'il n'en a pas eu le temps du fait qu'on le poursuivait. On ne sait pas du tout ce qu'il a bien pu lui faire avant ça, pour qu'il soit inconscient » expliqua Henderson.

« Wow ! » s'exclama Jimmy. « Moi, je croyais qu'il était invulnérable. Comment Luthor a fait pour découvrir comment l'avoir ? »

« Il y a des rumeurs dans la rue », ajouta Jack. « J'en ai entendues pas mal, avant. On raconte qu'il y a un caillou qui peut tuer Superman. Une allergie, ou quelque chose comme ça. Un caillou de sa planète. Peut-être que c'est pas que des rumeurs. »

« J'ai déjà entendu ça. Il y a quelques mois, un ancien militaire persuadé que Superman était une menace, clamait partout qu'il pouvait le tuer avec un bout de météorite. Clark a appelé ça la kryptonite. Mais le gars était complètement fou, et on a jamais trouvé la moindre preuve que ça existait autre part que dans son imagination » ajouta Lois.

« Vous ne l'avez jamais vue ? »

« Non. Apparemment, un morceau aurait été envoyé dans un laboratoire pour analyse, mais le morceau aurait disparu. Le type du labo nous jurait qu'il l'avait vu, une roche verte fluo, mais il n'a pas pu nous le prouver », répondit Lois.

« On a retrouvé Superman dans une cage verte fluo », annonça Henderson.

Ils se regardèrent tous en silence, comprenant ce que cela signifiait. L'homme le plus puissant du monde pouvait réellement être tué par une simple roche.

« Bon, maintenant au moins, on sait ce que Luthor a fait à Superman. Mais ça ne nous aide pas à retrouver Clark », déclara le détective avant de se tourner vers Lois pour lui demander : « Comment Clark fait pour contacter Superman d'habitude ? Comment ça se passe ? »

« Je n'en ai pas la moindre idée. Clark et Superman sont encore plus prudents que Lex pour garder leurs secrets. Ils n'ont jamais rien dit. En fait, je n'ai même jamais été sûre que Clark ait un moyen de le contacter. C'était juste une impression que j'avais, parfois, comme s'ils discutaient beaucoup ensemble, et étaient beaucoup plus proches que n'importe qui l'imaginait. C'était juste un petit peu trop facile pour Clark d'obtenir que Superman nous donne des exclusivités, vous savez. Et des fois, quand je parlais avec Superman, il avait l'air de savoir des trucs dont j'avais parlé avec Clark. Alors, je me suis demandé, mais je n'étais pas sûre. Il y a quelques semaines, en fin d'après-midi, j'ai demandé à Clark de dire à Superman que je voudrais lui parler si jamais il le voyait, et Superman est venu chez moi dans la soirée », se remémora Lois avec une certaine honte. Comment avait-elle pu faire une chose pareille à Clark ? Le rejeter, puis lui demander de contacter un autre homme pour qu'elle lui fasse sa déclaration d'amour ? Elle l'avait vraiment traité de façon lamentable, mais ce n'était pas le moment de s'apitoyer sur le passé. « Après ça, j'étais sûre que Clark avait vraiment un moyen de le contacter, mais je ne sais pas comment », conclu-t-elle.

« Oui, Clark sait comment garder ses secrets, c'est sûr », ajouta Jimmy. « Tous les jours, il disparaît de temps en temps, parfois quelques minutes, parfois quelques heures, et on ne sait jamais où il est. »

« Donc, Clark a l'habitude de disparaître sans laisser de traces ? » s'enquit Henderson.

« Oui, mais pas comme ça, inspecteur », éclaircit Jack. « D'habitude, il ne disparaît jamais pendant aussi longtemps. Et il serait pas parti comme ça juste après avoir réussi à trouver tout ce qu'il lui fallait pour coincer Luthor. Clark le détestait ! Il voulait le coincer depuis longtemps. C'est lui qui a lancé l'enquête. Il voulait absolument le voir en taule et empêcher le mariage ! Il ne se serait pas tiré sans explication maintenant ! Coincer Luthor avant le mariage, c'était tout ce qui comptait pour lui depuis des semaines ! »

Lois se sentit profondément touchée par le témoignage de Jack. Même pendant toutes les semaines où ils étaient en froid, Clark continuait de penser à elle. Tout ce qu'il avait fait pour arrêter Lex, il l'avait fait pour elle. Peut-être qu'elle n'avait pas saccagé définitivement toute chance d'être avec lui, si jamais ils le retrouvaient.

« Mon Dieu », pria-t-elle silencieusement, « faites qu'on le retrouve ! »

***

Lois était allongée sur son lit, en peignoir, quelques heures plus tard. Après avoir répondu aux questions d'Henderson concernant tout ce qu'elle savait de Lex Luthor, de Superman et de Clark Kent, Perry l'avait reconduite chez elle. Heureusement qu'elle n'avait pas encore rendu les clés de son appartement, comme Lex le voulait à l'approche de leur mariage, où elle n'aurait plus nulle part où aller.

Depuis que Perry avait pris sa retraite, il avait emménagé en Floride et ne possédait plus de maisons à Metropolis. Il logeait donc chez Clark pour le moment. Elle n'aurait pas pu non plus demander à Jimmy, qui avait perdu son appartement lorsque le Daily Planet avait explosé, le laissant sans un salaire suffisant pour payer son loyer. Lui aussi avait trouvé refuge chez Clark. Et Jack était hébergé par un foyer pour aider les jeunes à s'en sortir, enfin jusqu'à ce qu'il ait été accusé d'avoir fait explosé le journal. Là, il avait été envoyé dans un centre de redressement en attendant son procès, et lorsqu'il s'en était évadé, Clark l'avait recueilli.

Quant à Clark… Il avait disparu. Comment aurait-elle pu lui demander de l'héberger ? Et elle ne savait même pas si elle aurait été la bienvenue, de toute façon, après toutes ces semaines durant lesquelles ils ne s'étaient pratiquement pas accordé la parole, sauf pour se disputer.

Bien sûr, au fond d'elle, elle savait qu'il ne lui aurait pas tourné le dos, mais son côté pessimiste la faisait douter. Dans leur équipe, c'était Clark l'optimiste des deux, c'était lui qui voyait toujours le bien chez tout le monde. Ça aurait dû lui mettre la puce à l'oreille qu'il ne puisse pas voir le bien chez Lex.

Non, tout compte fait, elle avait eu de la chance d'avoir au moins conservé son appartement. La situation aurait été encore bien plus compliquée autrement.

Lorsque Perry, Jimmy et Jack l'avaient raccompagné chez elle, elle avait insisté pour rester seule. Ils voulaient rester avec elle. Ils pensaient qu'elle ne devrait pas rester seule après tous les chocs qu'elle avait subis durant la matinée, mais elle n'aurait pas pu le supporter. Elle avait besoin d'être seule le temps de digérer tout ce qui s'était passé.

En moins de vingt-quatre heures, elle avait revu Clark et s'était disputé avec lui, suite à quoi elle s'était rendu compte qu'elle l'aimait, mais elle avait persisté à épouser Lex, qu'elle croyait être un ami et un homme bien. Elle avait finalement dit non à l'autel, pour apprendre presque immédiatement après que son fiancé était l'un des pires criminels de la planète, et elle l'avait vu se suicider. Il avait heurté le sol à peine à quelques mètres d'elle en se jetant du haut de la plus grande tour de Metropolis, moins d'une minute après avoir appris que l'homme qu'elle aimait vraiment, Clark, avait disparu. Et avant d'avoir le temps de comprendre ce qui se passait, Superman était emmené en ambulance. Il était dans le coma…

Elle avait besoin d'être seule pour se remettre. Elle n'y arriverait pas avec ses amis qui la regardaient d'un air inquiet. C'aurait été encore plus stressant. Ils avaient fini par accepter de s'en aller, et elle s'était immédiatement débarrassée de sa robe de mariée, qu'elle portait toujours, et avait pris une très longue douche bien chaude pour se détendre. Ça n'avait pas marché. Et depuis, elle était allongée sur son lit, en peignoir, immobile, à ressasser les évènements de la journée.

L'interrogatoire d'Henderson avait été très troublant également. Il lui avait demandé de raconter avec tous les détails dont elle pouvait se souvenir toutes les soirées qu'elle avait passé avec Lex durant la période où ils sortaient ensemble, à la recherche d'indices qui pourraient leur en apprendre encore plus sur ce qu'il faisait réellement.

Puis, il l'avait questionné sur Superman. Tout ce qu'elle savait de lui. Tout ce qu'il lui avait jamais dit, en interview ou en privé. Tout ce qu'elle l'avait jamais vu faire… Elle et Clark étaient les deux personnes au monde qui connaissait le mieux le super héros, alors à défaut, et puisque Clark avait disparu, la police la considérait comme la personne la plus proche de lui, et comptait sur elle pour les renseigner.

Malheureusement, plus Henderson la questionnait sur Superman, et plus elle s'apercevait qu'elle ne connaissait pratiquement rien de lui. Elle n'avait pas la moindre idée de ce qu'il pouvait bien faire de son temps libre lorsqu'il n'était pas en train de sauver quelqu'un, ni de l'endroit où il allait,… Rien. Elle ne savait rien sur Superman qui puisse avoir la moindre utilité. La seule chose personnelle qu'elle savait sur le super héros était qu'il possédait un globe, lequel pouvait produire l'hologramme d'un vieil homme habillé de blanc, avec le fameux S sur la poitrine.

Ce globe avait été en possession de Clark jusqu'à ce que Jack cambriole son appartement, puis il avait été revendu au marché noir. Superman l'avait retrouvé quelques jours plus tard, et avait catégoriquement refusé de faire le moindre commentaire à son propos. Il s'était contenté de dire qu'il s'agissait d'un objet personnel qui lui avait été dérobé, et qu'il était ravi de l'avoir récupéré.

Henderson avait trouvé l'information très intéressante. S'ils pouvaient retrouver la trace de ce globe, ils pourraient probablement en apprendre bien plus sur Superman. Peut-être trouver quelqu'un qui sache comment fonctionnait la biologie kryptonienne, les effets de la kryptonite sur Superman et le moyen de le soigner. Cet homme en blanc pourrait peut-être savoir tout ça. Et ils avaient désespérément besoin de ses informations. Superman était dans le coma, et les médecins n'avaient pas la moindre idée de comment le traiter.

A la plupart des questions qu'Henderson lui avait posée sur Superman, Lois avait répondu qu'elle ne savait pas. Et tous ses instincts lui criaient que si la question avait été posée à Clark, il aurait su quoi répondre. Elle soupçonnait depuis longtemps que Clark en savait plus sur le super héros qu'elle même, mais avant cet interrogatoire, elle ne s'était jamais vraiment rendue compte de l'étendue de ce qu'elle ignorait sur lui, et que Clark connaissait probablement. Parce qu'elle sentait, au fond d'elle même, qu'il connaissait les réponses.

Henderson l'avait ensuite questionné sur Clark. Tout ce qu'elle connaissait de sa vie, de façon générale, et sur tout ce qu'il avait fait ces dernières semaines, depuis l'explosion du Daily Planet. Malheureusement, elle n'avait pas pu dire grand chose. Perry, Jimmy et Jack avaient rempli les blancs sur la façon dont ils avaient enquêté ensemble, avec Clark, sur Lex.

Ce qui troublait le plus Lois, c'était toutes les questions sur la vie de Clark, de façon générale, auxquelles elle avait été incapable de répondre. On lui aurait demandé avant ça si elle connaissait bien son ancien partenaire, elle aurait répondu oui, sans hésiter. Elle n'aurait même pas réfléchi. Elle le connaissait très bien.

Mais après avoir subi un interrogatoire poussé sur lui, elle savait que c'était faux. Elle le connaissait très peu. Il y avait de nombreux mystères dans sa vie, qu'elle n'avait même jamais soupçonnés. Il gardait beaucoup trop de secrets, et il les gardait bien. Elle ne les avait même pas soupçonnés. Alors qu'en fait, il y avait tout un pan de sa vie qui lui était totalement inconnu.

Jimmy et Jack avaient soulevé un point. Clark disparaissait tout le temps, aux moments les moins propices, pour des durées très variables, et n'avait jamais d'excuses réellement satisfaisantes. Elle ignorait qui il fréquentait en dehors des gens du Planet, s'il avait des activités extra-professionnelles. Que faisait-il quand il n'était pas avec elle, à travailler ou parfois à regarder des vidéos ? Elle n'en avait pas la moindre idée.

Il avait beaucoup voyagé, et pourtant elle ignorait presque tout des endroits où il avait vécu, et des gens qu'il y avait rencontrés. Etait-il resté en contact avec eux ? Combien de langues parlait-il ? Plusieurs, elle savait, mais combien et lesquelles… ça, elle l'ignorait.

Souvent, dans leurs enquêtes, il s'était révélé qu'il savait des choses pour lesquelles elle n'avait aucun indice, mais qui s'avéraient vraies à la fin. Parfois, il disait que c'était l'instinct ou la chance, d'autres fois qu'il avait un indic qui lui avait dit ci ou ça, mais ça arrivait très souvent, et elle ignorait tout de ces indics, ou de la façon dont il se procurait vraiment certaines informations.

C'était ce qui s'était passé avec Lex. Il avait passé des mois à lui dire d'être prudente avec lui, qu'il n'était pas ce qu'il semblait être, et pourtant, il avait toujours refusé d'être plus précis. Et pourtant, il savait des choses, ça ne faisait plus le moindre doute.

Et à chaque fois qu'il avait une « intuition » qui les a menés dans la bonne voie pour trouver des preuves et arrêter les criminels sur qui ils enquêtaient, elle avait accepté sans broncher chacune de ses explications : intuition, chance, un indic inconnu… Il lui avait caché beaucoup de choses, et elle ne s'en était pas aperçue.

Tout comme Lex. Il avait passé des mois à lui mentir, et elle avait tout gobé. Elle croyait être une journaliste d'investigation très difficile à embobiner, et elle venait d'apprendre qu'elle n'était qu'une petite fille totalement crédule. C'était dur !

Mais elle savait qu'elle ne devrait pas comparé Clark à Lex. Lex mentait parce qu'il était un criminel. Et elle savait que, quoi que ce soit que Clark cachait, il devait avoir une bonne raison pour le faire. La différence entre lui et Lex, c'était que Lex mentait aussi sur sa véritable personnalité, et elle refusait de croire ça de Clark. Il était vraiment un homme bien, elle le sentait.

***

Le bruit de quelqu'un qui frappait à sa porte la réveilla. Elle s'était endormie en peignoir sur son lit la veille. Elle n'avait même rien mangé. Son estomac ne le lui avait pas permis. Mais dès qu'elle ouvrit les yeux, elle s'aperçut qu'elle était affamée.

Lentement, elle se leva et alla à la porte. Elle regarda par le judas, puis ouvrit la porte. C'était Henderson.

« Vous avez d'autres questions à me poser, Inspecteur ? »

« Bonjour à vous aussi, Lane. Bien dormi ? »

« Non. »

Elle s'écarta de la porte pour le laisser entrer. Il prit place sur le canapé, Lois en face de lui.

« Je suis venu, parce que je me suis dit que vous aimeriez savoir où en était l'enquête » commença Henderson. Lois le regarda immédiatement avec grand intérêt, son impatience à peine déguisée. Avaient-ils retrouvé Clark ? Il allait bien ?

« J'ai passé toute l'après-midi d'hier à interroger l'assistante personnelle de Luthor, Cox. Elle a balancé un max d'infos sur ses activités criminelles, et croyez-moi, vous ne voulez pas connaître les détails. Ses activités débordaient largement de Metropolis. Il a commis des crimes dans à peu près tous les pays du Monde, et la gamme de ses crimes est beaucoup plus étendue que ce que l'on croyait. C'était un véritable touche-à-tout. »

« Merveilleux, Henderson », le coupa Lois avec impatience, « mais que dit-elle sur Clark ? Qu'est-ce que Luthor lui a fait ? Où l'a-t-il fait disparaître ? »

« Je suis désolé. Elle n'en a pas la moindre idée », répondit le policier. « Luthor lui a dit avant-hier soir qu'il avait l'intention de le faire éliminer, mais il a dit qu'il règlerait les détails après la cérémonie du mariage, qu'il voulait d'abord voir Superman mourir avant de régler son compte à Kent. Elle ignorait qu'il avait pris d'autres mesures d'un autre côté. D'après ce qu'elle a dit, ce serait plutôt inhabituel. Il confie ses missions à elle, Nigel St-John ou Asabi, ou parfois mais rarement à d'autres employés, mais visiblement, lorsqu'il a confié une affaire à l'un d'eux, il n'implique pas les autres. Pour les empêcher, chacun, d'en savoir trop sur l'étendue de ses manigances, et avoir toujours un plan de secours quand quelque chose échouait. Alors elle était très surprise qu'il ait fait disparaître Kent d'un autre côté après lui en avoir parlé, à elle. »

« Oui, mais il l'a fait ! » rétorqua Lois. « Alors, vous avez interrogé St- John et Asabi ? Qu'est-ce qu'ils ont dit ? »

« Malheureusement, Lois, aucun des deux n'a été arrêté. Ils sont parvenus à ne pas se faire prendre dans la confusion. On les recherche, mais pour l'instant, on n'a aucune piste. Je suis désolé. »

Lois vivait un vrai cauchemar. Clark avait disparu avant qu'elle puisse lui dire qu'elle l'aimait, avant qu'elle puisse lui demander pardon pour tout ce qu'elle avait fait et dit qui l'avait blessé. Elle avait été tellement stupide. Quand est-ce que sa vie était devenue aussi lamentable ?

« Donc, ce que vous me dites, Henderson, c'est que les seules personnes à savoir où se trouve Clark, ce qui lui est arrivé, c'est Lex, qui est mort, St- John ou Asabi, qui sont tous les deux introuvables, et peut-être avec de la chance, Superman, qui est dans le coma ? » récapitula-t-elle.

« J'en ai bien peur. »

Lois sentait que ses nerfs étaient sur le point de lâcher. Elle n'en pouvait plus du tout. Au moins, elle n'avait plus faim. Ce n'était pas non plus ce matin qu'elle pourrait avaler quoi que ce soit.

A l'expression d'Henderson, elle pouvait voir qu'il croyait de moins en moins à la possibilité de découvrir un jour ce qui lui était arrivé, à moins que la chance ne se mette à tourner. C'était mal parti.

La vie pouvait être ironique parfois. Toutes les personnes qu'elle avait aimées l'avaient quittée. Son père comme ses ex petits-amis. Et là, quand elle découvrait qu'elle aimait un homme dont elle savait sans aucun doute qu'il était prêt à ne jamais l'abandonner —et ce que Jack avait dit, comme quoi la motivation principale de Clark pour faire chuter Luthor était d'empêcher le mariage, était une preuve, si besoin était, que même lorsque leur relation était au plus mal, il était incapable de lui tourner le dos — le destin le faisait disparaître sans laisser de traces.

Devant l'ironie de la situation, Lois éclata de rire. Le rire nerveux et sans joie de quelqu'un qui était sur le point de perdre complètement la tête, et Henderson ne sut vraiment pas quoi dire pour l'aider à surmonter les chocs qui s'étaient abattus sur elle durant les dernières vingt-quatre heures.

***

Deux semaines s'étaient écoulées, et toujours aucune nouvelle de Clark. Lois n'avait pratiquement pas quitté son appartement pendant tout ce temps, excepté pour faire quelques courses quand cela s'avérait strictement nécessaire à sa survie. Mais ce n'était pas très souvent, elle ne mangeait presque plus. Elle pouvait parfois passer une journée complète sans rien avaler, et les repas qu'elle prenait, quand elle en prenait, était assez frugaux.

Elle avait passé la quasi-totalité de son temps, assise ou allongée, à repenser à l'année qui s'était écoulée pour essayer de se souvenir de quelque chose, n'importe quoi, qui pourrait leur donner un indice, une piste, pour retrouver Clark. Mais elle n'avait rien.

Tous les souvenirs qu'elle ressassait, loin de l'aider à le retrouver, ne faisait que lui rappeler encore et encore qu'elle avait passé une année entière à côté d'un homme merveilleux, sans le remarquer. Elle n'avait fait que l'ignorer, au profit de Superman ou au profit de Lex. Elle ne lui avait jamais prêté beaucoup d'attention, ce n'était pas à lui qu'elle pensait quand elle était seule chez elle.

Pourquoi avait-il fallu qu'elle le perde pour se rendre compte à quel point il comptait pour elle. Elle regrettait tellement de ne pas s'être rendu compte à quel point elle l'aimait lorsqu'il était encore là.

Au lieu de ça, elle avait trop attendu pour faire face à ses vrais sentiments, et maintenant, il était possible qu'elle ne puisse jamais lui dire. Clark avait disparu sans laisser de traces. Elle ignorait tout de ce qui avait bien pu lui arriver. Et elle se désespérait de plus en plus. Il lui manquait tellement. Elle avait besoin de lui, mais il n'était plus là, et c'était sa faute à elle. Si elle avait écouté ce qu'il avait à dire à propos de Lex, elle n'aurait jamais accepté de l'épouser, il n'aurait jamais dû prendre de risques pour essayer de prouver sa culpabilité avant la cérémonie, et Lex ne l'aurait jamais fait disparaître… C'était tout de sa faute à elle s'il avait disparu.

Et même si aucune preuve n'avait encore été trouvée permettant de lier Lex à la disparition de Clark, à part le message qu'il avait laissé sur le répondeur de son partenaire le soir de la disparition, Lois ne croyait pas aux coïncidences. Ça ne pouvait être que Lex. Elle savait maintenant que Clark avait un énorme secret dans sa vie, qu'il y avait toute une partie de lui qu'il cachait jalousement, et en théorie, il se pouvait que ce soit ce qu'il cachait qui lui ait attiré des ennuis. Il se pouvait qu'il ait disparu à cause de quelque chose lié à ce secret.

Mais Lois ne parvenait pas à y croire. Le moment était trop bien choisi. Lex avait laissé ce message sur le répondeur de Clark l'après-midi même où Clark avait finalement trouvé les preuves contre lui. Et Clark avait disparu quelques heures plus tard, avant de pouvoir avertir la police de ses découvertes. C'était juste par chance qu'il avait laissé ses notes sur tout ce qu'il savait chez lui, dans son bureau, avant de disparaître à jamais. Ça avait au moins permis à Perry, Jimmy et Jack de les trouver et de prévenir la police. Et Lex s'était suicidé.

Le jour qui avait suivi, Perry était venu la voir pour lui annoncer que Stern avait finalement racheté le Daily Planet et que les travaux de rénovation avaient déjà débuté. En attendant qu'ils soient terminés, Perry avait recontacté tous les anciens employés pour leur demander de revenir. Certains avaient accepté, d'autres non. Et une semaine plus tard, l'équipe réunie, avec quelques nouveaux employés, avaient sorti le numéro de retour du journal. Les travaux n'étant pas terminés, ils devaient travailler dans des locaux provisoires, et sous-traiter pour l'impression. Mais le Daily Planet était de retour en kiosque. Mais sans Clark Kent. Et sans Lois Lane.

Elle était encore trop choquée pour pouvoir reprendre déjà le travail. Elle avait besoin de plus de temps. Perry comprenait parfaitement. Tous les jours, il venait prendre de ses nouvelles. A chaque fois, elle espérait qu'il aurait appris quelque chose de plus sur la disparition de Clark, mais ce n'était jamais le cas. Il la tenait néanmoins au courant de l'enquête de police sur la disparition de Clark, et sur les affaires de Luthor.

Elle avait espéré pendant longtemps qu'à force d'éplucher les dossiers de Lex, la police finirait par trouver un document ou quelque chose expliquant ce qu'il avait fait à Clark, mais la police ne trouvait rien.

Durant sa carrière, Lois avait déjà vu des gens être heureux lorsque la police retrouvait le corps mort d'un être aimé, disparu depuis longtemps. Elle n'avait jamais compris cette réaction-là. Mais aujourd'hui, elle savait pourquoi ils réagissaient de cette façon. Ces gens pouvaient enfin commencer à faire leur deuil, ils savaient désormais ce qui était arrivé à la personne qu'ils aimaient. Lois ne serait jamais heureuse si un jour la police lui annonçait qu'elle avait retrouvé le corps de Clark. Mais elle comprenait maintenant ce besoin de savoir ce qui lui était arrivé, même si c'était le pire. S'il était mort, elle préfèrerait le savoir, que de continuer à espérer, à tout jamais, qu'il revienne. Elle avait besoin de savoir s'il allait bien ou si on lui faisait du mal…

Depuis que le Daily Planet avait repris sa parution une semaine plus tôt, chaque jour Perry mettait la photo de Clark en première page pour demander à tous ceux qui auraient des informations de contacter le journal. Et Lois s'était prise d'un nouvel espoir. Quelqu'un avait vu ce qui s'était passé et appellerait le journal, et Clark serait retrouvé. Elle le reverrait, lui dirait qu'elle l'aimait. Il lui pardonnerait et tout irait bien. Mais personne n'avait appelé, et Lois avait finalement sombré dans une profonde dépression.

Elle avait songé au suicide, mais elle avait rejeté l'idée très vite. Clark allait être retrouvé. En vie. Et lorsque ça arriverait, il voudrait la voir, et elle serait là. Il était hors de question que lorsqu'il serait de retour et demanderait à la voir, on l'emmène devant sa tombe. Elle ne pouvait pas lui faire ça. Elle serait là pour lui, à l'attendre, lorsqu'il reviendrait.

La dernière fois qu'elle l'avait vu, ils s'étaient disputés et quittés fâchés. Elle ne pouvait pas laisser les choses dans cet état. Ce n'était pas possible. Elle devait absolument le revoir au moins une fois et arranger les choses. Ça ne pouvait pas se terminer comme ça entre eux, dans la colère…

A force de se répéter ça, Lois était parvenue à chasser de son esprit l'idée de se tuer pour échapper à la souffrance que lui causait le fait de ne pas savoir ce qui lui était arrivé. Mais elle allait vraiment mal.

Depuis la veille, Perry avait ajouté dans le journal qu'une récompense serait versée à tous ceux qui donneraient des informations pouvant permettre de retrouver Clark. Et ils avaient finalement reçu quelques appels. Perry avait demandé à Lois si elle voulait essayer de suivre les pistes que ça leur apportait. Elle aurait aimé accepté, mais elle ne pouvait pas.

Elle était consciente que Perry lui avait demandé ça parce qu'il était conscient qu'elle était dépressive. Il essayait de l'aider en la faisant se sentir utile. Mais elle ne pouvait pas l'accepter. Retrouver Clark était bien trop important, et elle n'était pas en état de conduire l'investigation de façon efficace. Apparemment, elle ne l'était plus depuis longtemps, s'amenda- t-elle mentalement. Lex l'avait bernée pendant plus d'un an ! Quelle journaliste elle faisait ! Elle n'avait plus aucune confiance en ses capacités.

Perry n'avait pas insisté, et avait confié à Jimmy et Jack la mission de vérifier tous les tuyaux qu'ils recevaient des personnes qui téléphonaient. Malheureusement, pour l'instant, il n'en était rien ressorti. Ce n'était que des mensonges de la part de personne espérant toucher la récompense.

***

Henderson était assis au volant de sa voiture, dans le parking de l'hôpital. Il savait qu'il devait démarrer, mais il n'en avait pas envie. Il avait besoin de quelques instants pour souffler un peu. Le travail d'inspecteur de police était toujours difficile mais ces deux dernières semaines avaient été particulièrement exténuantes. La tâche qu'il avait devant lui s'avérerait probablement encore plus ardue. Il n'était pas pressé de voir Lois de nouveau.

Depuis deux semaines, il devait s'occuper de gérer l'enquête sur Luthor — et chaque jour de nouvelles révélations apparaissaient sur ses affaires illégales, rendant encore plus long le travail de la police -, l'enquête sur la disparition de Clark — et là, malheureusement, il devait admettre qu'il manquait cruellement d'informations -, et assurer la protection de Superman, toujours dans le coma à l'hôpital. Sans compter que tous les criminels semblaient s'être donnés le mot pour profiter de l'incapacité actuelle du super héros pour faire leurs mauvais coups, et par conséquent, Henderson manquait d'hommes pour faire tout le travail nécessaire.

Il avait pris des mesures très strictes quant à la sécurité du super héros. Seuls lui, et les personnes auxquelles il autorisait l'accès, avaient droit d'entrer dans la chambre de Superman. Et pour l'instant, il n'avait autorisé que quelques médecins très renommés, et qui s'étaient soumis à une enquête préalable, et les plus sûrs de ses hommes à y entrer. Il avait également ajouté Lois à la liste permanente des personnes autorisées à voir Superman. Mais elle n'était pas venue à l'hôpital une seule fois.

La chambre elle-même avait été parfaitement sécurisée, des volets avaient été posés aux fenêtres, et la porte était gardée en permanence par deux de ses hommes dans le couloir, et deux autres à l'intérieur même de la pièce, même durant les examens médicaux. D'autres policiers étaient répartis dans tout l'hôpital.

Le commissariat avait déjà reçu d'innombrables lettres de menaces de mort contre Superman. Ils étaient nombreux les criminels qui souhaitaient profiter de l'état critique du super héros pour s'en débarrasser à tout jamais, et il devait prendre des mesures en conséquence.

Tous les jours, il venait à l'hôpital dans l'espoir que les médecins lui diront que Superman est enfin sorti du coma, que sa vie est sauvée… mais ce n'était jamais ce qu'on lui disait.

Les deux premiers jours, il était dans un état très critique, et les médecins étaient extrêmement pessimistes quant à ses chances. Aucun d'eux ne connaissait rien à la biologie kryptonienne, et ils ne pouvaient donc rien tenter sans risquer de l'achever. Ils avaient néanmoins trouvé un pouls immédiatement et détecté que le cœur se trouvait au même endroit que celui d'un humain.

Durant les premières heures de son hospitalisation, son cœur avait cessé de battre à deux reprises, et c'est par chance que les médecins avaient réussi à le relancer. Mais le troisième jour, son état commença à se stabiliser, et tout le monde reprit espoir. Il se pouvait qu'il soit en train de se remettre et peut-être que son état allait s'améliorer sous peu.

Mais deux semaines s'étaient déjà écoulées, et aucune amélioration de son état. Il restait stable, mais ne paraissait pas près de se réveiller. Et les médecins qui le soignaient avaient beau faire des tests, ils ne parvenaient toujours pas à trouver le problème. A force de tests, ils s'étaient aperçus que la biologie kryptonienne était très proche de la biologie humaine, bien qu'il existe des légères différences, notamment au niveau de la structure cellulaire des tissus, de la composition sanguine… Mais sans aucun point de repère, comment savoir ce qui était normal et ce qui ne l'était pas ?

Ce jour-là, alors qu'il sortait de l'hôpital où le Dr Stephenson lui avait de nouveau répété qu'aucun changement n'avait été noté dans l'état de santé de Superman, Henderson avait reçu un appel téléphonique sur son portable de la part d'un autre inspecteur du commissariat central, qui travaillait sous ses ordres, le sergent Zimac.

Quelques jours plus tôt, Henderson l'avait chargé d'une mission très déplaisante, mais qui s'avérait malheureusement nécessaire vu le manque d'indices qu'ils avaient sur la disparition de Kent. Zimac avait fait draguer tout le fleuve à la recherche du corps du journaliste. Henderson aurait dû le faire bien plus tôt. Avant que Superman n'apparaisse à Metropolis l'année précédente, les deux tiers des personnes disparues étaient retrouvées dans le fleuve, la plupart du temps près d'Hobbs Bay. C'étaient de tristes statistiques, que l'apparition de Superman avait heureusement fait changer. Mais avec la condition actuelle du super héros, il savait que s'il ne se réveillait pas rapidement, il devrait bientôt recommencer à draguer le fleuve régulièrement quand on signalerait des disparitions à la police.

En fait, il aurait dû le faire bien plus tôt dans leurs recherches sur Clark Kent, mais Henderson ne voulait pas s'y résoudre. Draguer le fleuve, c'était accepter que les chances de le retrouver vivant étaient minces, et il ne voulait pas penser de cette façon. Kent était l'un de ses amis, c'était un homme bien. Et Henderson préférait organiser les recherches en partant du principe qu'il était toujours en vie, plutôt que d'envisager où la police pourrait retrouver son cadavre. C'était pour ça qu'il avait délégué cette partie des recherches à Zimac. Henderson ne se sentait pas capable de le faire lui-même.

Et Zimac l'avait appelé alors qu'il atteignait le parking de l'hôpital pour lui dire que tout le fleuve avait été dragué, et qu'il n'avait rien retrouvé. Clark Kent était toujours disparu, et ils n'avaient toujours aucune piste, aucun indice pour le retrouver.

Et maintenant, il devait aller voir Lois pour le lui dire. Elle méritait de savoir qu'au moins son partenaire n'était pas en train de pourrir ou fond du fleuve. Ils n'étaient pas plus avancés qu'avant pour le retrouver, mais au moins, il y avait toujours une chance qu'il soit vivant. S'ils avaient retrouvé son cadavre, c'aurait été terminé.

Il savait que de ne pas savoir était en train de tuer Lois, mais il doutait fortement qu'elle aurait mieux pris s'il lui avait ramené un cadavre venu des eaux d'Hobbs Bay. En fait, il était sûr que si jamais elle apprenait qu'il était mort, elle perdrait toute volonté de vivre. C'était l'espoir de le revoir qui la faisait tenir, pour l'instant.

***

Le silence soudain qui s'était abattu sur la salle de rédaction provisoire que Stern louait pour que son équipe puisse continuer à sortir le Daily Planet en attendant que les anciens locaux soient restaurés, avertit Perry que quelque chose d'inhabituel se produisait, et il releva les yeux de l'article qu'il était en train de corriger pour voir de quoi il retournait.

Il fut abasourdi de voir Lois traverser la pièce à grands pas, dans sa direction, sans se soucier des regards de tous ses collègues, braqués sur elle. Elle avait revêtu un tailleur très professionnel, était maquillée et coiffée comme tous les jours de travail, et portait même sa sacoche à la main. C'était une véritable apparition. Il ne s'attendait absolument pas à ça.

Il avait vu Lois quelques heures plus tôt, en milieu de matinée, et elle était toujours aussi dévastée et perdue que les jours précédents. En fait, Perry était très inquiet pour elle, et juste après être revenu de chez elle, il avait appelé l'un de ses amis, qu'il n'avait pas vu depuis des années, mais qui était un psychologue avec une belle renommée. Il voulait lui parler de Lois, pour savoir quoi faire pour l'aider à se reprendre en main.

Alors, il était très surpris de la voir maintenant dans la salle de rédaction, avec le même air professionnel plein de confidence qu'elle arborait toujours au travail. Il savait qu'en dehors des chocs qu'elle avait subis, elle souffrait d'une sérieuse crise de confiance en elle, due au fait que Luthor s'était joué d'elle pendant des mois. Il ne comprenait pas ce qui s'était passé entre ce matin et maintenant pour la changer aussi radicalement et la remettre sur les rails. La police avait-elle enfin retrouvé Clark ?

Elle s'arrêta devant son bureau, et il s'aperçut qu'il la fixait toujours bouche bée. Il se racla la gorge à la recherche de quelque chose à lui dire, mais elle prit la parole avant qu'il n'ait le temps de trouver.

« Perry, je veux voir tous les éléments qu'on a sur les affaires de Lex Luthor impliquant Nigel St-John ou Asabi », lança immédiatement Lois.

« Pourquoi ? » fut la seule chose que Perry put lui répondre tant il était surpris par ce dernier rebondissement.

« Cox, St-John et Asabi étaient les bras droits de Lex. Il répartissait le travail à faire sur eux trois. Cox a été arrêtée il y a deux semaines, mais elle ne sait rien de la disparition de Clark. Donc Lex a forcément chargé soit Nigel St-John soit Asabi de s'en occuper, et ils ont tous les deux réussi à échapper à la police le jour où Lex s'est suicidé, et ils n'ont pas encore été pris » expliqua rapidement Lois.

Perry pensa quelques instants à ce que Lois venait de dire. Venait-elle de sous-entendre qu'elle allait enquêter sur la disparition de Clark ? A cette idée, Perry se sentit aussi soulagé qu'inquiet. Soulagé que la meilleure de ses journalistes se mettent sur l'affaire, mais inquiet aussi car il savait à quel point Lois était devenue fragile. Il fut trop long à répondre. Lois reprit la parole.

« Je veux tout savoir sur ce qu'ils ont fait pour Lex dans le passé et comment ils l'ont fait. Je vais les traquer, ces ordures. Je vais les retrouver, et je vais leur faire cracher tout ce qu'ils savent sur ce qui est arrivé à Clark », continua-t-elle avec plus de véhémence.

« D'accord, Lois. Si tu es sûre que tu te sens assez bien pour cette enquête, je vais demander à Jack de te donner toutes les infos dont tu as besoin. »

« Merci, Perry. »

Elle se retourna et s'apprêta à s'éloigner quand Perry la retint.

« Lois ? Est-ce que je peux demander ce qui s'est passé pour que tu décides d'un seul coup de te jeter sur l'affaire ? » demanda-t-il doucement, son inquiétude pour elle clairement visible sur ses traits. Elle le dévisagea quelques secondes en silence avant de répondre.

« Je ne veux plus attendre en pleurant qu'on me rapporte un cadavre. »

Avant que Perry ne puisse ajouter quoi que soit, elle s'éloigna et s'installa à un bureau vide. Les raisons qui l'avaient poussée à retourner au travail étaient bien sûr plus complexes que ce qu'elle avait dit à Perry, mais elle ne se sentait pas suffisamment bien pour entrer dans les détails.

Quand Henderson était venue la voir et lui avait avoué qu'il avait fait draguer le fleuve, Lois était devenue furieuse. Il ne lui avait pas dit plus tôt qu'il cherchait dans Hobbs Bay, parce qu'elle savait que c'était là l'endroit où l'on regardait quand on n'avait plus l'espoir de revoir quelqu'un en vie. Et si la police draguait la rivière, c'était qu'ils n'avaient plus aucun espoir.

Elle avait été vraiment folle de rage que la police perde son temps à rechercher un cadavre, quand tout ce qu'elle souhaitait, c'était qu'on le retrouve vivant. C'était irrationnel. Elle savait que statistiquement, il était probablement mort. Mais elle refusait de l'accepter. Elle avait besoin de croire qu'il était toujours en vie.

Elle savait aussi que si la police avait fait draguer le fleuve, ça signifiait qu'ils n'avaient aucune autre piste à suivre. Et ça, ça condamnait à coup sûr un dossier à finir en bas de la liste des priorités. La police n'avait rien trouvé dans Hobbs Bay. Pour eux, ça s'arrêtait là. Ils ne pouvaient rien faire de plus jusqu'à ce qu'un nouvel élément d'enquête apparaisse. Et malgré toutes les belles paroles d'Henderson qui lui avait promis de na pas lâcher l'affaire jusqu'à ce que le mystère de la disparition de Clark soit éclairci, Lois savait comment ça se passait. Et elle savait que le dossier n'avancerait plus.

Et elle avait compris que si elle voulait avoir une chance de revoir Clark un jour, en vie, elle devrait le rechercher elle-même. Dès qu'Henderson était reparti, elle avait réfléchi aux moyens qu'elle pourrait employer pour le retrouver, et s'était vite heurtée aux manques d'indices. Mais alors elle s'était souvenue d'une discussion qu'elle avait eue avec le policier deux semaines plus tôt. Et plus précisément, de quelque chose qu'elle lui avait dit :

[i]« Donc, ce que vous me dites, Henderson, c'est que les seules personnes à savoir où se trouve Clark, ce qui lui est arrivé, c'est Lex, qui est mort, St- John ou Asabi, qui sont tous les deux introuvables, et peut-être avec de la chance, Superman, qui est dans le coma ? » [/i]

Et elle avait eu le déclic. Elle ne pouvait rien faire pour ressusciter Lex, ni pour aider Superman à se réveiller, mais elle pouvait retrouver Nigel St- John et Asabi. Elle n'était plus sûre d'être une aussi bonne journaliste d'investigation que ce qu'elle avait été dans le passé, mais elle savait qu'avec la motivation qu'elle avait pour retrouver Clark, elle serait capable de le faire.

Elle s'était jurée à ce moment-là de le chercher jusqu'à ce qu'elle le retrouve. Elle n'abandonnerait jamais, jusqu'à ce qu'elle l'ait retrouvé, ou jusqu'à ce qu'elle meure.

Alors elle s'était préparée à aller au travail, et elle était venue dans les locaux provisoires du Daily Planet. Pour Clark, elle venait de ranimer « Lane chien enragé », et elle l'avait lancé après ses proies. Elle retrouverait ces deux pourris, et ensuite, elle pourra enfin retrouver Clark.

Jack arriva près de son bureau avec une pile de dossiers de plus de cinquante centimètres qu'il posa sur un coin.

« Voilà ce qu'on a, pour l'instant, sur les affaires dans lesquelles a trempé Asabi. Il arrive de nouveaux dossiers tous les jours. Il y en a trois fois plus pour St-John. Alors quand vous aurez fini avec ceux-là, faites-moi signe, je vous apporterai les autres. »

« Merci, Jack. »

« Bon courage », conclut-il avec un dernier regard vers l'énorme pile de dossiers avant de s'éloigner et de retourner auprès de Jimmy avec qui il était chargé de vérifier la véracité des tuyaux que leur donnaient les personnes qui téléphonaient, en espérant toucher la récompense pour Clark.

Elle se mit aussitôt au travail. Elle voulait repérer les constantes dans la façon de travailler des deux hommes. Ça lui permettrait peut-être de trouver où ils pouvaient s'être cachés et de les débusquer.

***

Elle n'eut besoin que de quelques jours pour retrouver la trace d'Asabi. Mais elle craignait de ne pas avoir l'esprit assez clair pour l'interroger elle- même si jamais elle lui faisait face, et elle ne voulait pas qu'il puisse s'échapper de nouveau non plus. Alors elle passa l'information à Henderson, et Asabi fut arrêté.

Henderson l'interrogea très longuement, mais il ne savait rien non plus de ce qu'il était advenu de Clark Kent. Il était conscient, bien sûr, que son employeur détestait le journaliste, mais il ne savait même pas qu'il avait prévu de le faire disparaître. Luthor ne lui en avait rien dit.

Pour Lois, il ne faisait plus aucun doute que c'était St-John le responsable, et elle redoubla ses efforts pour le retrouver. C'était plus difficile. Nigel avait fait partie des services secrets britanniques et il savait se faire discret.

Eplucher tous les dossiers que le Planet et la police avaient concernant les affaires que Luthor avaient confiées à son majordome ne l'avait pas beaucoup avancée. Nigel St-John était un homme plein de ressource. Elle releva néanmoins dans les dossiers tous les alias qu'il avait déjà utilisés par le passé, et lança une recherche sur chacun des noms de la liste, sans rien trouver. Elle avait contacté tous ses indics pour obtenir des informations sur lui, et finalement, ça avait payé.

L'un de ses indics les plus fiables, Bobby le morfale, lui avait demandé une photographie de St-John, et l'avait recontactée deux jours plus tard en lui disant qu'il avait fait circuler la photo chez tous ceux qui pouvaient aider ce type à se créer une identité de plus, et quelqu'un l'avait reconnu. Il se faisait maintenant appelé William O'Neill. Il s'était fait faire un faux passeport.

Lois donna de nouveau l'information à Henderson, qui, après avoir vérifié les noms de tous les passagers des avions, bateaux… qui avaient quitté les Etats- Unis durant les trois dernières semaines, découvrit que Nigel avait pris un avion pour Londres quelques jours après la mort de Luthor.

Il avertit la police anglaise, qui finit par retrouver se trace, et il fut extradé rapidement vers les Etats-Unis. Mais lors de son interrogatoire, il s'avéra qu'il ne savait pas non plus ce qui était arrivé à Clark. Luthor ne lui en avait pas touché mot non plus.

Et Lois commençait à se désespérer de nouveau.

C'était sa meilleure chance de retrouver Clark. Lex le voulait mort, et Clark disparaissait, mais aucun de ses trois hommes de main habituels ne savaient rien à ce propos. Soit Lex avait fait appel à quelqu'un d'autre — c'était inhabituel, mais c'était déjà arrivé — et Lois en aurait pour des années à découvrir qui, parmi les milliers d'employés de LuthorCorp, avait été chargé de se débarrasser de Clark, soit Lex n'y était pour rien, aussi improbable que cela paraissait.

Et si c'était le cas, si la synchronisation de la disparition de Clark avec la chute de Luthor était réellement une simple coïncidence, alors Lois n'aurait plus du tout aucune piste à suivre, et c'était une possibilité qu'elle se refusait d'envisager. Personne ne pouvait disparaître sans laisser aucune trace. Il était forcément quelque part. Et il y avait forcément quelqu'un qui savait où. Elle devait juste chercher plus attentivement.

Mais sur le moment, elle se laissa aller à pleurer devant l'inutilité de sa traque d'Asabi et de Nigel St-John, et devant l'énorme tâche qui se dressait devant elle si elle voulait vraiment enquêter sur chaque personne ayant travaillé pour Lex au cours de l'année écoulée, et tenter de découvrir auquel d'entre eux le Patron aurait pu confier cette mission.

Tandis qu'elle pleurait silencieusement, assise à son bureau dans la salle de rédaction provisoire du Daily Planet, Jimmy s'approcha d'elle.

« C'est peut-être une bonne chose, finalement, qu'Asabi et St-John ne sachent rien de ce que Luthor a fait à Clark », dit-il sur un ton rassurant.

« Et pourquoi ça, Jimmy ? » demanda Lois en séchant ses larmes.

« Parce que ça veut peut-être dire qu'on a tous regardé dans la mauvaise direction. Peut-être que Luthor y est pour rien, qu'il a pas eu le temps de faire quoi que ce soit. Clark a disparu en allant prévenir Superman, et Superman a été piégé par Luthor, mais y'a aucune trace comme quoi Clark a été piégé aussi. Peut-être que c'est pas Luthor la solution, ça peut être Superman. C'est vrai, ça se peut qu'il ait mis Clark à l'abri quelque part avant d'aller voir Luthor, pour le cas où ce serait un piège », expliqua-t-il avec espoir.

Jimmy avait parfois des théories farfelues, mais c'était pourtant une possibilité. Et si Superman avait mis Clark à l'abri quelque part, loin de Metropolis, il se pouvait que Clark ignore même ce qui se passait ici.

Elle devait vraiment découvrir comment Clark contactait Superman. Peut-être qu'en sachant ça, elle découvrirait où Clark était.

A moins bien sûr que ce ne soit vraiment Lex qui l'ait fait disparaître. Ou que quelque chose d'autre, lié à son secret, ne lui soit arrivé. Il était possible aussi qu'il ait été victime d'un crime au hasard.

Plus elle y pensait, plus Lois voyait les possibilités se multiplier. Personne n'avait le moindre indice. Il aurait pu arriver n'importe quoi à Clark. Et elle ne savait pas si elle serait jamais capable de faire le tri entre toutes ces théories pour le retrouver.

Elle se sentait perdue.

***

Ça faisait des jours maintenant que Lois étudiait sans relâche les dossiers sur les affaires criminelles de son ex-fiancé, cherchant à savoir à qui Lex aurait pu confier la tâche de se débarrasser de Clark. Mais plus elle étudiait ces dossiers, et plus il lui paraissait inutile de continuer.

Lex ne faisait presque jamais appel à quelqu'un d'autre que son assistante Mme Cox, son majordome Nigel St-John, ou son serviteur Asabi, et lorsqu'il le faisait, c'était toujours parce qu'il avait besoin de compétences très particulières. Il était hautement improbable que ce fut le cas concernant Clark. Et si cela ne le disculpait pas complètement, elle doutait tout de même de plus en plus que Lex ait été à l'origine de la disparition de son partenaire.

Il ne servait à rien de s'acharner sur cette piste, elle ne faisait que perdre du temps. Luthor était toujours un suspect, mais elle le mettait maintenant en bas de liste.

Elle n'avait plus qu'à trouver quelqu'un à mettre en haut de la liste. Mais là, elle manqua d'inspiration.

Méthodiquement. Elle devait procéder méthodiquement si elle voulait avoir une chance de réussir. On ne pouvait pas trouver les bonnes réponses si on ne posait pas les bonnes questions ; c'était l'une des premières leçons qu'elle avait apprises en école de journalisme. Alors quelles étaient les bonnes questions ?

D'abord, qui aurait un intérêt à faire disparaître Clark, en dehors de Lex Luthor ?

Immédiatement, une très longue liste de noms se forma dans son esprit. Quand on était journaliste d'investigation, et qu'on révélait au monde les secrets de criminels, on n'était pas très apprécié. Tous ceux qu'il avait aidé à arrêter, par les articles qu'il avait écrits seul ou avec elle, pourraient vouloir se venger d'eux. Et si la plupart du temps, c'était elle qui se faisait attaquer, elle ne pouvait pas exclure que l'un d'entre eux ait décidé de faire preuve d'originalité et de s'attaquer à Clark.

Elle devait donc dresser la liste de toutes les personnes blessées par les articles qu'ils avaient écrits au cours de l'année écoulée.

Ou les articles qu'il avait écrits seul. Cela pouvait expliquer pourquoi c'était lui qui avait été attaqué cette fois-ci et non elle. La plupart des articles qu'il avait écrit seul était des articles à caractère social, pas vraiment le genre d'articles qui pouvait lui attirer des ennemis.

A moins que cela ne remonte à un article qu'il avait écrit avant Metropolis. C'était un très bon enquêteur, donc il avait sûrement dû faire un peu de journalisme d'investigation durant ses voyages. Peut-être qu'il avait des ennemis qui remontaient à cette période. Quelqu'un qui venait juste de sortir de prison peut-être ? A creuser.

Mais ça l'amenait directement à la seconde question qu'elle devait se poser. Que savait-elle vraiment de Clark ? Que savait-elle de son passé, par exemple ? Pas grand-chose, elle devait bien l'admettre. Elevé dans une ferme à Smallville, il avait joué au football au lycée, avait fait des études de journalisme à l'université du Kansas, puis il avait voyagé dans le monde entier pendant des années. Où avait-il été, qui avait-il rencontré, qu'avait- il fait pendant cette période de sa vie ? Elle n'en avait pas la moindre idée. Elle devait essayer d'en découvrir plus sur son passé. C'était peut-être lié à quelque chose qu'il avait vécu à cette époque.

Et lors de l'interrogatoire d'Henderson, le premier jour, elle s'était aperçue qu'il cachait un grand mystère dans sa vie. C'était peut-être lié à ce passé. Peut-être pas. Il était possible qu'il soit engagé dans quelque chose de dangereux, qu'elle n'aurait jamais soupçonné.

Non, elle devenait paranoïaque. Ce n'était pas parce que Lex lui avait menti et cachait une vie de criminel que les mensonges de Clark cachaient la même chose. Clark n'était pas comme ça. Elle le savait au plus profond d'elle-même. Elle l'aimait, elle ne pouvait pas l'imaginer avoir fait quelque chose de répréhensible.

Quoi que ce soit qui se soit passé durant ses années d'errance, quel que soit le mystère qu'il cachait, ses parents devaient sûrement être au courant. Clark était très proche de ses parents. Ils savaient probablement ce dont il s'agissait. Elle devrait leur parler.

Et pour la première fois, elle envisagea la disparition de Clark sous l'angle de ses parents. Ils étaient très proches, et Clark avait disparu. Leur fils unique avait disparu. Ils devaient être absolument dévastés. Elle ne leur avait pas parlé depuis que c'était arrivé. Elle avait été trop accaparée par son propre chagrin.

Elle était néanmoins consciente que Perry et Henderson les avait contactés pour leur apprendre la nouvelle et leur poser quelques questions pour le cas où ils sauraient quoi que ce soit qui puisse aider à la recherche de leur fils. Mais ils n'avaient rien dit. Peut-être n'y avait-il rien à dire. Ce n'était peut-être pas là qu'elle trouverait l'explication. Ou peut-être qu'ils mentaient, protégeant à tout prix le fameux secret de leur fils… Non, elle faisait encore de la paranoïa. Les mensonges de Lex la faisaient douter de tout le monde, maintenant. Les Kent étaient des personnes charmantes, elle les appréciait beaucoup. Ils ne dissimulaient probablement rien. Ils devaient avoir envie que leur fils soit retrouvé sain et sauf autant qu'elle !

Néanmoins, elle devrait tout de même leur parler, pour être sûre.

Elle demanda à Jimmy de faire des recherches sur tous ceux que les articles de Clark, seul ou en partenariat avec elle, avaient permis d'arrêter, et de voir si certains venaient de sortir de prison, ou s'ils pouvaient avoir des contacts avec des criminels toujours à l'extérieur, connus pour avoir trempé dans des kidnappings, meurtres…

Lorsque son jeune collègue s'éloigna pour commencer à faire les recherches qu'elle avait demandé, Lois composa d'une main tremblante le numéro des Kent. Que pourrait-elle dire à deux parents aimants qui venaient de perdre leur unique enfant ?

***

Martha était assise à la table de la cuisine. Elle relisait de nouveau l'article que le Daily Planet avait écrit concernant l'état de santé de Superman. « Aucune amélioration constatée. » Ces mots qu'elle lisait encore et encore lui faisaient mal, et pourtant, elle ne pouvait pas s'empêcher de les relire.

Elle ne comprenait pas. Lorsque Clark avait été exposé à la kryptonite la première fois, ici, dans la ferme, il s'était évanoui, mais il avait fini par reprendre connaissance très vite après qu'il ait été éloigné de cette maudite roche. Ses pouvoirs avaient disparu pendant deux jours, mais il avait fini par les récupérer. Juste à ce moment-là, Trask l'avait de nouveau exposé, et Clark s'était effondré au sol. Il était au bord de l'évanouissement, mais il avait réussi à se débarrasser de la kryptonite. Ses pouvoirs étaient revenus 36 heures plus tard.

Et très peu de temps avant la chute de Luthor, il lui avait téléphoné, et il lui avait dit qu'il avait senti la présence de kryptonite près de lui, alors qu'il était en train de discuter avec un gardien de sécurité dans une banque dont le système d'alarme avait eu un problème. Il avait dit qu'il s'était senti étourdi, et qu'il avait dû se retenir au gardien pour ne pas tomber, mais que la sensation était passée très vite. Il n'avait même pas perdu ses pouvoirs cette fois-là.

Donc Martha comprenait que la réaction de son fils à la kryptonite dépendait de son temps d'exposition, de la proximité de la roche et probablement d'autres choses aussi. Mais elle savait aussi qu'une fois éloigné de la kryptonite, il avait toujours récupéré assez rapidement. Et ça faisait un mois complet qu'il était dans le coma.

Ses yeux glissèrent sur la photographie qui accompagnait l'article. C'était une photographie qui datait de plusieurs semaines, sur laquelle on voyait Superman porter dans ses bras un bébé qu'il venait de sortir d'un immeuble en train de brûler derrière lui. Elle se mit à pleurer en regardant cette photographie de son fils. Comment quelqu'un pouvait être aussi cruel pour essayer de le tuer ?

Un mois complet sans qu'aucune amélioration ne soit constatée. Il était éloigné de la kryptonite maintenant. Il aurait dû se remettre rapidement. Pourquoi était-il toujours inconscient ? Avait-il franchi un seuil de tolérance, ou quelque chose comme ça, au delà duquel il ne pourrait plus revenir ?

Elle regarda de nouveau la photographie et elle se demanda si elle reverrait jamais son fils. Elle avait toujours voulu être mère, mais elle ne pouvait pas. Elle avait prié pendant des années, et le jour où elle avait trouvé Clark dans ce champ avait été le plus beau jour de sa vie. Il n'avait jamais été malade ou blessé et elle n'avait jamais dû faire ce que faisaient toutes les autres mères, rester auprès de son enfant malade et prendre soin de lui… Elle en avait été reconnaissante. Elle ne voulait pas voir son enfant souffrir. Mais là, il était dans le coma, peut-être même mourant, et ce qu'elle désirait plus que tout au monde, c'était être à son chevet.

Mais elle ne pouvait pas. On n'autoriserait jamais Martha Kent, une simple fermière du Kansas, à rester auprès du célèbre Superman, en attendant qu'il ne se réveille. Ce n'était pas comme si elle pouvait dire qu'elle était sa mère. Elle était obligée de rester au loin.

Elle avait brièvement envisagé d'aller à Metropolis quand même, dès que la nouvelle lui était parvenue, mais Jonathan l'en avait dissuadée. Aux yeux du monde, Clark avait disparu, et eux, ils devaient être inquiets de ne pas savoir ce que leur fils était devenu. S'ils allaient à Metropolis, ils ne pourraient jamais cacher aux autres qu'ils étaient plus inquiets pour Superman que pour la disparition de Clark. Ils savaient où était Clark, ce n'était pas un problème pour eux, mais ils ne pouvaient pas laisser qui que ce soit découvrir ça. Alors ils étaient restés à Smallville, guettant chaque jour dans le journal des nouvelles de leur fils.

Espérant chaque jour voir enfin l'article qui déclarerait Superman hors de danger. Mais les médecins ne constataient aucune amélioration, et il paraissait de plus en plus évident dans leurs propos à la presse qu'ils commençaient à perdre l'espoir de le voir revenir à lui un jour.

Le téléphone sonna, et elle sécha ses larmes rapidement avant d'aller décrocher. C'était probablement Perry qui les appelait pour leur dire qu'ils n'avaient toujours aucune piste pour retrouver Clark, mais qu'ils n'abandonnaient pas. Il leur avait promis de ne pas abandonner les recherches jusqu'à ce qu'ils retrouvent Clark. Et il continuait de diffuser la photo de Clark dans le journal, chaque jour.

Martha savait que c'était parfaitement inutile, mais elle ne pouvait pas lui dire ça. Et elle lui était extrêmement reconnaissante de tous ses efforts. Elle avait pris la résolution de lui dire que Clark était Superman s'il finissait par décéder. Mais en attendant, elle préférait garder l'espoir que son fils finisse par revenir à lui, et en attendant, elle continuerait à garder son secret.

Elle décrocha le téléphone.

***

La conversation téléphonique avec Martha n'avait pas aidé Lois à comprendre ce que Clark cachait. Elles s'étaient toutes les deux montrées très émotionnelles, et Lois avait fini par avouer en pleurant à Martha qu'elle s'était rendue compte qu'elle était amoureuse de Clark trop tard pour pouvoir le lui dire. Martha avait parue très émue lorsqu'elle avait entendue son aveu.

Mais Lois ne pouvait plus supporter la vague d'émotion qui l'avait submergée à discuter avec la mère de Clark, quelqu'un à qui il manquait autant qu'à elle- même, quelqu'un qui comprenait parfaitement ce qu'elle était en train de vivre. L'échange était devenu trop émotionnel pour elle, et elle avait mis fin à la conversation peu après.

Si elle se laissait aller, elle ne serait plus jamais capable de refaire surface, et elle ne serait plus capable s'occuper efficacement de l'enquête sur la disparition de Clark. Elle devait se ressaisir et agir.

Jimmy en aurait encore pour des heures avant de finir toute la recherche qu'elle lui avait demandée, donc elle avait besoin de trouver autre chose à faire en attendant. Elle ne supportait pas de rester les bras croisés.

Et puisque le coup de téléphone aux Kent ne l'avait pas aidé à comprendre quel était le secret de Clark, elle devrait le découvrir autrement.

Résolue, elle se leva de son bureau, enfila son manteau, pris son sac, et se dirigea vers le bureau de Perry pour lui demander les clés dont elle avait besoin. Il était temps d'aller chez Clark. Elle n'avait pas remis les pieds une seule fois dans son appartement depuis l'époque où ils étaient encore amis, avant sa disparition, avant l'explosion du Daily Planet, avant que Lex ne la demande en mariage.

Après leur dispute, l'ambiance entre eux était trop orageuse pour qu'elle s'y rende, et après sa disparition, elle n'avait simplement jamais eu le courage d'y retourner.

Lois se souvenait vaguement que Perry lui avait dit qu'il avait parlé avec les parents de Clark, et qu'entre eux, ils s'étaient arrangés pour continuer à payer son loyer, de façon à ce qu'il retrouve toutes ses affaires comme il les avait laissées quand il reviendra. A ce moment-là, l'appartement de Clark abritait encore Perry, Jimmy et Jack. Depuis, Jimmy et Jack avaient trouvé un petit appartement qu'ils avaient décidé de louer ensemble pour économiser sur les frais, et étaient devenus colocataire. Perry, lui, avait de nouveau racheté une maison à Metropolis. Contrairement à ce qu'il avait cru, l'heure n'était pas encore venue pour lui de prendre sa retraite en Floride.

Mais Perry avait encore les clés de l'appartement de Clark. Il les gardait en attendant son retour. Et Lois en avait besoin si jamais elle voulait y aller.

***

Le convaincre de lui confier le trousseau de clés avait été facile. Le problème avait été d'entrer dans l'appartement. Lois avait longuement hésité sur le pas de la porte. Elle n'était pas sûre d'être prête à revoir l'endroit où il vivait. Mais elle avait finalement pris son courage à deux mains et entré.

L'appartement était exactement comme elle se le rappelait, mais il lui paraissait beaucoup plus froid et vide. C'était trop silencieux. A chaque fois qu'elle était venue par le passé, elle avait toujours trouvé l'appartement chaleureux et plein de vie, et maintenant, tout lui paraissait froid et inerte. La différence, c'était que Clark n'était plus là.

Une nouvelle vague de désespoir la saisit. Il lui manquait tellement.

Rageusement, elle sécha ses larmes. Ce n'était pas le moment. Tout n'était pas perdu. Elle pouvait encore le retrouver. Jimmy était en train de faire des recherches sur leurs anciennes affaires, et ça pourrait peut-être porter ses fruits. Et elle, elle était venue là en mission. Elle devait découvrir ce qu'il cachait. Ça lui permettrait peut-être de retrouver sa piste.

Ce n'était pas le moment de pleurer sur son absence. C'était plutôt le moment de se concentrer sur les moyens de le faire revenir.

Elle fouilla son appartement de fond en comble, à la recherche du moindre indice pouvant la mener à découvrir son secret. Elle savait qu'Henderson et ses hommes avaient déjà regardé partout et n'avait rien trouvé, mais elle aurait peut-être plus de chance. Elle verrait peut-être quelque chose qui leur aurait échappé…

Elle ne trouva rien qui put l'aider. Elle en savait désormais plus sur lui qu'auparavant, mais rien qui puisse l'aider à le retrouver.

Elle avait examiné sa collection de livres, et à sa grande surprise, ils étaient dans de nombreuses langues différentes. Il parlait beaucoup plus de langues étrangères qu'elle ne l'imaginait. Elle avait examiné tous ses albums photos. Les photos y étaient rangées chronologiquement. Elle les avait toutes examinées.

Elle avait souri devant ses photos de bébé. Il était si mignon, et il était tellement évident que ses parents l'aimaient plus que tout au monde. Il avait grandi pour devenir un enfant plein d'énergie et de joie de vivre. Elle avait même ri devant certaines photographies prises apparemment par surprise. De toute évidence, il avait eu une enfance très heureuse.

Alors elle ne comprenait pas pourquoi, brusquement, sur les photos prises vers ses 11-12 ans, il avait cessé de sourire autant. Elle pouvait voir qu'il était devenu très réservé, et qu'il se sentait seul. Beaucoup d'adolescents avaient des problèmes à passer ce stade de leur vie, mais elle sentait qu'il y avait plus que ça chez lui. Quelque chose l'avait changé. C'avait visiblement été une période difficile de sa vie.

Il avait commencé à porter les cheveux un peu longs pour un garçon. Et bientôt, les seules photos sur lesquelles il souriait étaient celles prises lors de ses matchs de football, ou les photos où il était avec une jeune pom- pom girl blonde. Sa petite amie, de toute évidence. Quelque chose dans son visage à l'époque lui semblait très familier, mais elle ne parvint pas à mettre le doigt dessus.

Vers 17 ans, il avait commencé à porter des lunettes, et ses cheveux étaient redevenus courts. Les photos se firent plus rares sur l'époque où il était à l'université, et puis elle arriva aux photos prises durant ses voyages autour du monde.

Il avait de nouveau l'air heureux. Il avait vraiment voyagé dans de nombreux endroits, vu et fait beaucoup de choses. Lois n'imaginait pas qu'il en ait fait autant. En tout cas, il n'y avait là rien qui puisse l'aider à comprendre son mystère.

Elle feuilleta un classeur qui regroupait de nombreux articles qu'il avait écrit durant ses voyages. Ils étaient presque tous dans des langues étrangères et elle n'avait pas la moindre idée de ce dont il pouvait s'agir. Sa signature, Clark Kent, était la seule chose qu'elle reconnaissait.

Mais lorsqu'elle atteint la fin du classeur, elle trouva une pochette cartonnée qui contenait d'autres articles, écrits dans divers langages là aussi, mais dont il n'était pas l'auteur. Pourquoi conservait-il d'anciennes coupures de presse de l'époque de ses voyages ? Elle lut les quelques articles qui étaient en anglais. Ils parlaient de sauvetages mystérieux, de personnes miraculées… Et si elle se fiait aux photos des autres articles, ceux qu'elle ne comprenait pas, ils avaient tous le même thème.

Voilà enfin quelque chose d'intéressant. Il semblait presque que Superman était déjà présent à l'époque, mais qu'il aidait en secret au lieu de le faire publiquement. Et Clark, visiblement, le savait… Clark l'avait suivi dans le monde entier, jusque Metropolis. Lois se souvenait du jour où le tribunal avait ordonné à Superman de quitter la ville. Clark avait démissionné, il était prêt à partir. Et lorsque Superman avait été autorisé à rester, Clark était revenu.

C'était un choc. Voilà donc pourquoi Clark semblait en savoir autant sur Superman. Il l'avait étudié pendant des années. Mais jamais il n'avait rien tenté pour l'exposer, alors qu'il aurait probablement pu briguer un Pulitzer ! Non, à la place, lui et Superman étaient devenus amis.

Waouh ! pensa Lois. Clark était vraiment un excellent enquêteur, bien meilleur qu'elle ne l'avait jamais été. C'était lui qui avait réussi à démasquer Luthor, et avant ça, il avait probablement réussi à démasquer Superman, bien qu'il n'en ait jamais rien dit. Ça forçait le respect. Mais ça ne l'aidait pas à savoir où Clark pouvait bien être à l'heure actuelle.

Et ça ne l'aidait pas non plus à comprendre comment Clark faisait pour contacter Superman. Et elle aurait aimé le savoir. Non pas que ça pouvait lui être utile tant que Superman était à l'hôpital, dans le coma, mais si jamais elle avait pu en apprendre davantage sur le super héros, ça lui aurait peut- être permis de remonter jusqu'à une personne qui serait capable d'aider les médecins à comprendre comment fonctionnait la biologie kryptonienne, et les aider à le soigner.

Qu'est-ce que Superman avait dit, déjà, le premier jour où elle l'avait vu ? Ah oui, que c'était sa mère qui avait fait le costume pour lui. Donc il avait de la famille. Ils devaient bien savoir que Superman était dans le coma, c'était dans tous les journaux, et pourtant, personne ne s'était manifesté… C'était tellement étrange.

***

Lorsqu'elle revint au Daily Planet, Jimmy avait terminé les recherches qu'elle lui avait demandées, mais ce n'était d'aucune utilité non plus.

Tous ceux qu'ils avaient mis derrière les barreaux durant l'année écoulée, étaient toujours en train de purger leur peine, et ils n'avaient apparemment aucun contact avec des personnes ayant pu attaquer Clark. Et ceux qui étaient toujours en attente de jugement étaient étroitement surveillés.

Et de toute façon, la police avait déjà étudié toutes ces pistes-là, vérifié tous les alibis… Il n'y avait rien à espérer de ce côté.

Il n'y avait plus rien à espérer d'aucun côté. Lois ne savait plus où regarder. Elle avait retourné chaque pierre du chemin et elle n'avait rien vu qui puisse lui donner la moindre idée de ce qui était arrivé à Clark. C'était comme s'il s'était évaporé.

Elle ne savait plus du tout ce qu'elle pourrait faire de plus pour le chercher. Elle avait déjà regardé dans toutes les directions. Et pourtant, il fallait bien qu'elle ait négligé quelque chose. Personne ne pouvait disparaître aussi complètement. Il était forcément quelque part.

Et tant que la police n'avait pas retrouvé son cadavre, elle continuerait de croire qu'il était en vie, quelque part. Et tant qu'il était en vie, elle aurait une chance de le retrouver.

Elle avait juste besoin d'un indice, d'un début de piste, n'importe quoi pour lui indiquer par où continuer les recherches. Et en l'état actuel de la situation, il n'y avait qu'une personne qui pourrait peut-être lui donner cet indice. Mais il était dans le coma.

Clark avait disparu en transmettant à Superman le message de Lex. Superman saurait probablement ce que Clark avait fait après ça, tandis que lui allait se jeter dans le piège que lui avait tendu le milliardaire. Et avec cette information, elle pourrait explorer de nouvelles pistes, et peut-être en découvrir assez pour remonter jusqu'à Clark.

Mais Superman était dans un coma profond depuis presque un mois. Ses médecins ne savaient simplement pas quoi faire pour le soigner et l'aider à reprendre connaissance, et ils commençaient à douter que le super héros s'en sorte.

Elle ne pouvait pas le laisser mourir. Outre le fait qu'il était précieux pour le Monde, et qu'elle l'aimait beaucoup, en tant qu'ami, bien qu'elle ait essayé de se leurrer pendant des mois et qu'elle avait sincèrement cru être amoureuse de lui, il était d'autant plus important pour elle aujourd'hui qu'il détenait ce petit bout d'information dont elle avait tellement besoin pour retrouver Clark.

Pourtant, y avait-il seulement quelque chose qu'elle puisse faire pour aider Superman à se réveiller quand même ses médecins, parmi les plus réputés du pays, ne comprenaient pas pourquoi son état ne montrait aucune amélioration ?

C'était peut-être là le problème. Les médecins qui le soignaient. C'était la première fois qu'ils traitaient quelqu'un qui n'était pas humain. Peut-être ne se montraient-ils pas assez ouverts d'esprit pour comprendre comment une biologie qui n'était pas humaine pouvait fonctionner ? Peut-être que ce dont Superman avait le plus besoin en ce moment était d'un médecin habitué à explorer des champs de la science moins habituel ? Quelqu'un qui garderait l'esprit ouvert à toutes les possibilités ?

Lois était en mauvais termes avec son père, mais elle savait qu'il était un médecin très doué, et qu'il avait exploré de nombreux champs parallèles à la médecine conventionnelle. Elle était prête à tout lui pardonner si c'était ce qui lui coûtait pour aider Superman.

Elle prit son téléphone et appela son père. Pendant qu'elle attendait qu'il décroche, elle espérait qu'Henderson ne ferait pas trop de problèmes pour lui signer l'autorisation nécessaire pour que son père puisse accéder au chevet de Superman.

***

Pendant une dizaine de jours, le Dr Sam Lane refit tous les tests que les médecins de Superman avaient déjà conduits, mais il n'arriva pas plus près de trouver une solution qu'aucun des autres ne l'avaient été. Il redoutait le moment où il devrait le dire à sa fille, mais il ne pouvait pas le lui cacher non plus.

Depuis qu'elle l'avait appelé pour lui demander de faire partie de l'équipe de médecins qui traitaient Superman, il avait vu sa fille dépérir et s'enfoncer chaque jour davantage dans la dépression.

Au début, elle allait bien. Elle était déterminée et entêtée, comme il l'avait toujours connue. Puis les anciens locaux du Daily Planet avaient rouvert, et toute l'équipe avait repris possession du bâtiment. Peu à peu, il l'avait vue se renfermer sur elle-même. Elle semblait constamment perdue dans ses pensées, oublieuse du monde alentour.

Inquiet, il avait discuté avec le rédacteur en chef de sa fille. Il savait qu'elle était très proche de lui, qu'elle le percevait un peu comme le père qu'il n'avait pas su être pour elle. Et cet homme lui avait expliqué que Lois s'était rendue compte qu'elle était tombée amoureuse de son partenaire le jour même où celui-ci avait disparu, qu'elle avait fait une courte dépression, qu'elle avait réussi à surmonter uniquement en se plongeant à corps perdu dans la recherche de cet homme qu'elle aimait. Le problème étant que maintenant, elle n'avait plus aucune piste à suivre, rien pour tenir son esprit occupé, et elle sombrait de nouveau. Le retour dans les anciens locaux, ceux où elle avait tellement de souvenirs le concernant, ne l'avait pas aidée.

Sam n'avait rencontré le partenaire de sa fille, Kent, qu'une seule fois, alors qu'ils enquêtaient sur les cyborgs qu'il fabriquait, mais l'homme lui avait fait une bonne impression. Il s'était très vite rendu compte que ce Kent était amoureux de Lois, mais Lois ne semblait pas intéressée. Il s'était apparemment trompé.

Il espérait vraiment que Lois retrouverait son partenaire. Elle allait tellement mal que son rédacteur en chef avait même fini par la mettre en congés forcés, et lui avait donné le numéro de l'un de ses amis, psychologue. Au début, elle ne voulait pas en entendre parler, mais il avait réussi, avec l'aide de ce Perry, à la convaincre de consulter. Elle était vraiment mal en point.

Et il savait qu'elle mettait tous ses espoirs dans un réveil prochain de Superman. Il aurait tellement voulu aider sa fille, et faire ça pour elle. Trouver un moyen de sauver Superman pour aider sa fille à aller mieux. Mais il avait échoué. Un mauvais père jusqu'au bout. Il n'était pas capable de faire quoi que ce soit pour l'aider. Il se sentait coupable d'avoir échoué. Il voulait réussir, pour elle.

Mais il ne savait pas quoi faire, et maintenant, il devait aller le lui dire.

***

Tout était fini. Son père venait de lui dire qu'il avait tout tenté, mais qu'il avait échoué. Il n'avait trouvé aucun moyen de soigner Superman. Et si Superman ne se réveillait jamais, elle ne retrouverait jamais Clark.

Pendant des semaines, elle s'était interdit de pleurer, et avait essuyé ses larmes dès qu'elles avaient commencé à couler, se répétant encore et encore que ce n'était pas le moment de pleurer, qu'il y avait toujours un espoir. Mais maintenant, il n'y en avait plus. C'était fini. C'était finalement le moment de pleurer, alors elle laissa ses larmes couler librement.

Ce fut sa seule réponse aux paroles de son père. Elle se mit à pleurer, plus fort qu'elle n'avait jamais pleuré auparavant dans sa vie, parce qu'à chaque fois qu'elle avait pleuré avant, elle savait au fond d'elle-même que ça irait mieux ensuite. Mais là, ce n'était pas le cas. C'était l'espoir de revoir Clark un jour qu'elle avait perdu. Elle avait perdu Clark.

Elle pleurait si fort qu'elle en avait presque la respiration coupée. A travers ses larmes, elle voyait à quel point son père paraissait désemparé de la voir comme ça, et contrairement à ce qu'elle avait pu lui dire quelques années plus tôt quand elle avait quitté la maison familiale, elle savait qu'il l'aimait. Et elle l'aimait aussi. Pour lui, elle essaya de se montrer forte et de retenir ses larmes jusqu'à ce qu'il ne soit plus là pour la voir. Mais elle en fut incapable. Maintenant qu'elle avait autorisé les larmes à couler, il n'y avait plus moyen de les arrêter.

Après quelques instants d'hésitation, son père se leva du fauteuil où il était assis et vint rejoindre Lois sur le canapé. Il la prit dans ses bras et la réconforta. C'était quelque chose qu'il n'avait jamais fait, même pas lorsqu'elle était enfant et Lois en fut très touchée. Bien qu'elle pleurait déjà de toutes ses forces, une boule d'émotion supplémentaire vint lui nouer la gorge.

Ils restèrent comme ça longtemps, et Lois finit par se calmer peu à peu. Quand le torrent de larmes eut laissé sa place à de simples sanglots espacés, son père reprit la parole. Pendant qu'il tenait sa fille dans ses bras, il avait eu le temps de penser à la situation, et il avait eu une idée.

« Princesse, écoute-moi. J'ai pensé à quelque chose. J'ignore quoi faire pour aider Superman, mais je connais peut-être quelqu'un qui pourrait. C'était l'un de mes amis de l'époque de l'université. Ce n'est pas vraiment un médecin. C'est plutôt un physicien. Je ne l'avais pas revu depuis des années, mais on s'est croisé par hasard il y a quelques mois et on a discuté un peu, et il m'a dit qu'il était en train de travailler à essayer de découvrir comment les pouvoirs de Superman fonctionnaient. Il pensait que s'il pouvait comprendre comment Superman faisait pour briser certaines lois de la physique, cela pourrait conduire à d'énormes progrès scientifiques. J'ignore où il en est dans ses travaux, et peut-être qu'il ne pourra rien non plus pour aider Superman à se réveiller, mais… ça vaut peut-être le coup d'essayer. Il s'appelle Bernard Klein, il travaille pour STAR Labs. »

***

Quand Lois s'était suffisamment calmée, elle passa un coup de téléphone à Henderson pour lui répéter ce que son père lui avait dit du Dr Klein, et demander au policier de faire l'enquête préalable sur le scientifique pour lui donner l'autorisation d'approcher Superman.

« Ce ne sera pas la peine, Lois », lui répondit Henderson par le téléphone. « Nous avons déjà fait notre enquête sur Bernard Klein. On peut lui faire confiance. Je vais lui préparer son autorisation et le prévenir immédiatement. Il va être sacrément content ! Depuis le temps qu'il nous réclame la permission de travailler sur Superman ! »

« Comment ça ? » s'étonna Lois. « Pourquoi avez-vous déjà enquêté sur lui si vous ne lui avez pas encore donné le droit de l'approcher ? »

« C'est un physicien, Lois. L'un des meilleurs. Donc c'est à lui que l'on a confié la cage en kryptonite, pour l'étudier et découvrir comment une roche pouvait blesser Superman. Et évidemment qu'on a enquêté sur lui avant de lui donner la kryptonite ! Mais il n'a pas eu l'autorisation d'approcher Superman parce qu'il n'est pas médecin. Et pourtant, il a réclamé ! »

« Oh. Et il a découvert pourquoi Superman tombait malade en présence de la kryptonite ? » s'enquit-elle.

« Non », répondit le policier. « Il avait émis l'hypothèse que c'était à cause des radiations émises par la roche, qui n'affecterait que les kryptoniens et pas les humains, mais les médecins de Superman disent que ce n'est pas ça. Apparemment, il n'aurait aucun des symptômes liés à une irradiation. »

Lois se tourna vers son père, qui pouvait entendre la conversation puisque Lois avait mis le haut-parleur au téléphone, et il secoua la tête négativement, confirmant le diagnostic des autres médecins. Suite à une irradiation, les éléments du sang se détériorent et sont détruits. Dans le cas de Superman, il avait effectivement noté que son sang avait très peu de globule blanc et de plaquettes, mais leur compte ne descendait pas et restait stable, alors qu'en cas d'irradiation, leur détérioration devrait continuer même après qu'il ait été éloigné de la source radioactive. Non, tout portait à croire qu'il s'agissait simplement d'une différence de composition sanguine entre la race humaine et la race kryptonienne.

« Okay, inspecteur. Donnez quand même sa chance au Dr Klein. On ne sait jamais. Et au point où on en est… » conclut Lois.

***

Il était déjà assez tard quand Henderson appela le Dr Klein pour lui dire qu'il avait enfin les autorisations requises pour travailler sur Superman. Le plus sage aurait été d'attendre jusqu'au lendemain matin avant de se présenter au laboratoire, mais il était trop impatient pour ça.

Cela faisait 41 jours que Superman était à l'hôpital, dans une chambre transformée en véritable coffre-fort, avec des policiers partout pour assurer sa sécurité. Et cela faisait autant de temps que Bernard Klein demandait l'autorisation de l'approcher et de travailler dans l'équipe chargée de soigner Superman.

Bien qu'il ait des diplômes de médecine, il n'avait jamais pratiqué. Il avait préféré utiliser ses diplômes de physique pour faire de la recherche dans ce domaine. Alors il ne pensait pas pouvoir être d'une grande aide en tant que médecin, mais il avait passé toute l'année à essayer de comprendre le fonctionnement des pouvoirs du super héros, et il avait élaboré de nombreuses théories, et il était parfaitement possible que l'une d'elle permette aux autres médecins de comprendre comment fonctionnait la biologie kryptonienne et de sauver Superman. Il pensait que son savoir pouvait aider, mais on lui avait refusé l'accès à chacune de ses demandes.

Alors maintenant qu'il avait l'autorisation, il n'avait pas envie de perdre une seule minute et se prépara à aller à l'hôpital immédiatement.

Il arriva à l'hôpital une grosse demi-heure plus tard. La nuit était déjà assez avancée. Après avoir passé les contrôles d'usage, il put enfin entrer dans la pièce où se trouvait Superman.

Et il dut admettre que le terme de « coffre-fort » n'était pas tellement exagéré. Avec les volets blindés qui obstruaient les fenêtres, les deux policiers armés devant la porte, et les deux autres à l'intérieur de la pièce, et tous les contrôles de sécurité qu'il avait dû passer pour arriver jusque là, Klein eut vraiment l'impression que Superman était gardé aussi étroitement que le trésor national. Enfin… pas tout à fait, mais quand même ils n'avaient pas lésiné sur la sécurité.

Le super héros était étendu sur le lit d'hôpital, dans une simple blouse. Son costume n'était nulle part en vue. Un moniteur permettait de voir les battements de son cœur, et il recevait en intraveineuse ce dont il avait besoin pour ne pas souffrir de déshydratation…

Dr Klein commença immédiatement à faire quelques prélèvements de tissus, sang, salive, cheveux, peau, qu'il comptait examiner durant la nuit pour se faire une meilleure opinion de l'état de Superman. Bien sûr, tous ces tests avaient déjà été conduits par tous les médecins précédents, mais il préférait refaire les tests lui-même plutôt que de se contenter des résultats qu'ils avaient obtenus.

Muni de ces prélèvements, il se dirigea vers le laboratoire de l'hôpital. Ça ne valait pas le laboratoire de STAR Labs dans lequel il travaillait habituellement, mais ça ferait parfaitement l'affaire pour les tests qu'il voulait conduire.

Il se mit immédiatement au travail. La première chose qu'il vérifia était si, effectivement, Superman paraissait souffrir d'irradiation. Tous les médecins avaient réfuté cette hypothèse mais il était sûr que c'était la bonne. Il avait passé plus d'un mois à étudier la kryptonite qu'on lui avait envoyé et c'était la seule théorie qu'il avait réussi à élaboré et qui tenait un tant soit peu la route.

Mais lorsqu'il étudia les cellules de Superman, il dût se rendre à l'évidence. Il ne paraissait pas irradier. A moins que… l'irradiation ait d'autres symptômes sur un corps kryptonien que sur un corps humain. Il se pouvait fort bien que ses cellules ne se détruisent qu'en présence de la source radioactive mais que les dommages ne continuent pas dès qu'il était éloigné de la dite source.

Cela pourrait expliquer pourquoi le compte de ses globules et de ses plaquettes était si faible. Ce n'était peut-être pas la composition normale d'un sang kryptonien. C'était peut-être le résultat de son exposition à la kryptonite. Et ça expliquerait aussi que le compte reste stable depuis qu'il était entré à l'hôpital. Il devrait faire de nouveau tests pour en être sûr. Il résolut d'apporter un échantillon du sang de Superman à STAR Labs pour l'exposer à la kryptonite qu'il avait là-bas et voir les réactions que cela aurait.

Et même si son hypothèse était fausse, ce test était important. Il n'avait pas encore été effectué et pourtant, il pourrait lui permettre beaucoup plus rapidement de comprendre comment la kryptonite agissait sur son système. Et cette information était vitale. Sans elle, personne ne pouvait envisager de traitements contre les effets en question.

En attendant, il continua à conduire toute une batterie de tests, envisageant et rejetant la plupart des théories qu'il avait élaboré au cours de l'année écoulée sur la façon dont les pouvoirs de Superman pouvait bien fonctionner. C'était frustrant de s'apercevoir que toutes les théories qu'il mettait à l'épreuve se révélaient fausses, mais en même temps, c'était aussi un progrès. Il savait maintenant dans quelle direction il n'avait pas besoin de perdre son temps.

Il était tellement absorbé par son travail qu'il n'avait pas vu le temps passer, mais le matin était arrivé, et le premier employé de l'équipe de techniciens de laboratoire de l'hôpital arriva et se prépara un café avant de commencer à travailler de son côté.

Tout en buvant son café, il ouvrit les rideaux pour laisser la lumière du jour entrer à flot dans la pièce. Silencieusement, il s'installa à son bureau et commença à faire les tests que les médecins avaient requis pour d'autres patients de l'hôpital.

Dr Klein était tellement perdu dans ses notes qu'il ne s'était pratiquement pas aperçu de ce qui se passait autour de lui dans la pièce. Après avoir fini d'écrire certaines de ses observations sur son carnet, une nouvelle idée lui vint à l'esprit, et il se tourna de nouveau vers son microscope pour regarder l'échantillon de sang de Superman sur lequel il travaillait.

Dès qu'il regarda dans le microscope, il s'aperçut du changement. L'échantillon qu'il avait sous les yeux comptait bien plus de globules et de plaquettes que plus tôt. Mais qu'est-ce que… ?

Il se tourna dans le laboratoire, et remarqua pour la première fois la présence de l'autre homme.

« Qu'est-ce que vous avez fait à cet échantillon ? » demande Dr Klein, légèrement en colère.

« Rien du tout ! » répondit l'homme sur la défensive. « Je viens juste d'arriver ! »

« Vraiment ? Et qu'avez-vous fait depuis que vous êtes arrivé ? » répliqua Klein sur un ton très soupçonneux.

« Mais rien, je vous dis ! J'ai pris mon café, j'ai ouvert les rideaux, et j'étais sur le point de commencer à faire l'analyse du sang de… euh… Monsieur Johnson » dit-il en vérifiant le nom du patient sur le dossier ouvert sur son bureau devant lui.

[i] « ouvert les rideaux »[/i]

Dr Klein se tourna vers son microscope, baigné dans la lumière du soleil qui entrait par les grandes vitres. Il sourit. Il devait faire de nouveau tests, mais il avait peut-être la solution.

Il se rappelait vaguement de la théorie qu'un autre scientifique avait exposé quelques mois plus tôt, alors que Superman était accusé de causer une vague de chaleur sans précédent sur Metropolis, et ce, en plein hiver. Il avait été envisagé que les pouvoirs de Superman fonctionnaient à l'énergie solaire. Quand il était apparu évident que la cause de la chaleur était due à une fuite dans la centrale nucléaire de la LexCorp, tout le monde avait abandonné l'hypothèse de Superman se nourrissant du soleil.

Mais… le contraire n'avait jamais été prouvé. Peut-être que c'était là la solution. Peut-être qu'il avait juste besoin de soleil pour inverser les dommages créés par la kryptonite sur son système. C'était peut-être pour ça qu'il ne s'était toujours pas réveillé, après presque un mois et demi de coma, pensa Klein en se remémorant la chambre d'hôpital dans laquelle on gardait Superman. Les fenêtres étaient obstruées par des volets, dans l'espoir de garantir sa sécurité contre un éventuel sniper ou quelque chose comme ça.

Il avait besoin de faire plus de tests.

Il retourna de nouveau à son microscope et vit que le compte des cellules avait encore augmenté. C'était très bon signe. Un excellent signe. Il appela d'urgence les autres médecins qui traitaient Superman pour leur parler de sa théorie et leur montrer l'échantillon. Il ne leur avait pas encore parlé, mais ils étaient une équipe, et il devait les mettre au courant avant de procéder aux tests nécessaires pour prouver sa théorie.

***

Si certains médecins du groupe s'étaient montrés un peu sceptiques, la plupart trouvait tout de même que la théorie méritait d'être testée. Et ils avaient passé les deux jours suivants à étudier la réaction des tissus prélevés sur Superman à l'exposition solaire, sous diverses conditions, et l'hypothèse du Dr Klein s'était très vite retrouvée confirmée.

Superman avait juste besoin de soleil pour se rétablir. Il était toujours dans le coma parce qu'il avait été privé de lumière naturelle par les mesures de sécurité qui l'entouraient. C'était assez ironique. Sans le savoir, ile avaient mis sa vie en danger en essayant de le protéger.

Mais maintenant, ils savaient ce dont il avait besoin, et ils pouvaient agir pour le lui donner.

Le plus difficile était de convaincre Henderson. Il était responsable de la sécurité du super héros. S'il lui arrivait quoi que ce soit, il en serait tenu responsable par le Monde entier. C'était un sacré poids à porter. L'exposer aux rayons du soleil signifiait aussi le rendre plus vulnérable aux attaques des criminels qui le voulaient mort.

Alors quand le Dr Klein et les autres médecins de Superman lui dirent qu'il devait laisser Superman dehors en plein soleil pour lui permettre de se réveiller, la première réaction d'Henderson avait été de refuser. Mais il pouvait voir que le groupe de scientifiques était très sérieux, et qu'ils étaient aussi très sûrs d'eux. Superman avait besoin d'être exposé au soleil.

Après une longue conversation, ils finirent par admettre que Superman n'avait pas réellement besoin d'être mis dehors. Juste rester dans une chambre d'hôpital ensoleillée pourrait suffire. C'était déjà mieux, niveau sécurité, même si ça le forçait toujours à prendre des risques importants.

Il mit donc au point un système durant lequel les hommes qui gardaient Superman étaient remplacés toutes les quatre heures, et chaque nouvelle équipe l'emmènerait dans une nouvelle chambre de l'hôpital. L'équipe allant en pause ignorerait laquelle. Et ceux en poste n'aurait pas le droit de communiquer avec le monde extérieur tant qu'ils seraient en poste. Et dès le coucher du soleil, il retournerait dans la chambre avec les volets blindés. Et Henderson serait le seul à savoir toujours dans quelle chambre Superman se trouverait. Ça devrait rendre plus difficile pour les criminels de le tuer. Ce n'était pas parfait, mais c'était mieux que rien. Et avec un peu de chance, le super héros reprendrait conscience rapidement et il n'aurait pas besoin de faire ça pendant trop longtemps.

Dès qu'Henderson eût pu arranger avec la direction de l'hôpital qu'une vingtaine de chambres réparties partout dans le bâtiment soient réservées pour qu'il puisse choisir entre elles dans laquelle Superman serait transféré ensuite, il mit en place le nouveau système.

Avant chaque transfert de chambres, il accompagnait lui-même l'un des médecins dans la pièce que Superman était sur le point de quitter pour qu'il puisse l'examiner et lui faire une prise de sang et déterminer ainsi la vitesse à laquelle il se rétablissait.

Le premier jour avait été assez décevant pour les médecins. Ils avaient effectivement constaté une amélioration de son état, mais le super héros se rétablissait moins vite que ce qu'ils avaient espéré. Et Henderson dût se résoudre à passer une seconde journée aussi stressante que la première. Il craignait tellement un attentat contre sa vie qu'il était tenté de monter lui- même la garde à son chevet. Malheureusement, il avait aussi d'autres affaires dont il devait s'occuper. Néanmoins, il ne quittait plus l'hôpital, préférant travailler sur place.

Alors que le soleil se couchait le second jour, et qu'Henderson s'apprêtait, avec ses hommes, à transférer de nouveau Superman vers la chambre aux volets blindés pour la nuit, il remarqua que les doigts de Superman bougeaient un peu. Ses paupières clignèrent quelque fois avant de s'ouvrir. L'inspecteur de police ne s'était jamais senti aussi soulagé de toute sa vie.

« Hey ! Heureux de vous revoir ! » lui dit l'inspecteur avec un large sourire.

***

Superman avait mal partout. Il aurait voulu bouger, mais il était trop fatigué pour ça. Ses membres semblaient peser des tonnes. Il valait mieux rester immobile quelques minutes de plus. Il ne savait pas très bien où il était, et pourquoi il avait mal partout, mais il sentait instinctivement qu'il n'était pas en danger, et qu'il pouvait s'octroyer quelques instants pour récupérer avant de réessayer de bouger. Son corps entier le faisait souffrir, et ce n'était pas quelque chose à quoi il était habitué. Le simple fait de penser le faisait souffrir. Il avait un mal de tête terrible.

Tout ce qu'il savait, c'était qu'il était dans un endroit chaud et calme, et c'était tout ce dont il avait besoin. Il pouvait sentir les rayons du soleil sur lui, et c'était une sensation qui lui faisait vraiment du bien. Alors il ne bougea pas, s'accordant un peu de repos avant de devoir faire le moindre effort, qui, il le savait, lui serait affreusement pénible.

Il ne savait pas combien de temps s'était écoulé depuis qu'il était devenu conscient de la douleur qui le parcourait, depuis combien de temps il restait immobile, pas assez fort pour faire face à la douleur qu'un mouvement lui causerait, quand il sentit une agitation se produire autour de lui. Des bruits métalliques qui résonnaient dans sa tête et qui amplifiaient son mal de tête.

Il se passait quelque chose. Il n'avait plus le choix. Il devait savoir où il était, et qu'est-ce qui se passait, et si possible, il devait y mettre fin pour retrouver le calme dont il avait tant besoin. Alors il essaya de nouveau de bouger, mais ses membres lui paraissaient toujours aussi lourds, et il ne parvint à bouger que ses doigts. Il essaya d'ouvrir les yeux. L'effort était épuisant, mais finalement il fut aveuglé par de la lumière. Il ne voyait que du blanc partout, la lumière était trop forte. Ses yeux lui brûlaient alors il savait qu'au moins il avait réussi à les ouvrir.

« Hey ! Heureux de vous revoir ! » lança une voix près de lui sur un ton joyeux.

Le halo blanc qui l'aveuglait semblait se dissiper très vite et il s'aperçut qu'une silhouette était penchée sur lui. Un homme. Il était encore un peu flou, mais il le reconnaissait. C'était l'inspecteur Henderson. Il tenta d'ouvrir la bouche pour lui demander ce qui se passait, mais sa voix s'étrangla dans sa gorge, trop desséchée.

« N'essayez pas de parler. Le médecin est en route. Il va arriver dans une seconde » lui dit Henderson.

Médecin ? Derrière Henderson, il pouvait voir que tout le blanc qui l'avait aveuglé plus tôt n'était pas de la lumière, bien que la pièce fût éclairée. Les murs étaient blancs. Il était allongé dans une chambre d'hôpital. Ou un laboratoire peut-être. Il se sentit paniqué pendant un petit instant. Il était à la merci de scientifiques, de chercheurs. Il avait mal partout, que lui avaient-ils fait ? Mais la panique se dissipa très vite. Il faisait confiance à Henderson, et l'inspecteur de police paraissait heureux de le voir ouvrir les yeux, et il avait dit que le médecin allait arriver comme si c'était une bonne chose, donc… sûrement que ce n'était pas eux qui lui avaient fait ça. Il avait dit que le médecin allait arriver, comme s'il allait venir… pour le soigner.

Mais que lui était-il arrivé ? Il essaya de se souvenir. Sa tête lui faisait tellement mal qu'il lui fallut un instant pour se rappeler. Luthor. Luthor avait de la kryptonite. Il l'avait enfermé dans une cage en kryptonite. Il voulait le tuer. Il allait épouser Lois. Il devait l'empêcher de…

« Lu… Luthor » parvint à dire Superman d'une voix qui ressemblait fort à un croissement. Ce premier mot qu'il parvint à dire lui irrita fortement la gorge. Il avait tellement mal.

« Il est mort. Ne vous inquiétez pas, Superman. Luthor est mort » lui répondit le policier.

« Lois ? » demanda-t-il, sa voix lui obéissant un peu mieux cette fois-ci, bien qu'il lui était toujours douloureux de parler.

« Elle va bien. Ne vous inquiétez pas » lui dit Henderson avant de lui répéter : « Vous ne devriez pas parler. »

Deux hommes en blouse blanche entrèrent dans la pièce, et Superman comprit qu'il s'agissait là des médecins qui allaient l'examiner.

***

Lois ne tenait plus en place. Depuis que le coup de téléphone de son père l'avait réveillée, elle était incapable de retrouver le sommeil.

Superman s'était réveillé, son père lui avait dit. Il avait repris connaissance au coucher du soleil, et il irait bien. La nouvelle lui avait provoqué une décharge d'adrénaline. Elle avait l'impression d'avoir erré dans les ténèbres trop longtemps, et elle venait d'apercevoir une lumière.

Lorsque son père lui avait annoncé le réveil du super héros, Lois avait retrouvé l'espoir de revoir Clark bientôt. Elle avait été tellement heureuse. Mais les mots suivants de son père avaient tôt fait de doucher sa joie. Il avait examiné Superman avec un autre médecin, et il était encore beaucoup trop faible pour subir un interrogatoire.

Elle devrait continuer d'attendre, pour découvrir ce que Superman savait de la disparition de Clark. « Si jamais il savait quelque chose », ajouta-t-elle mentalement avec pessimisme. Elle n'avait jamais été particulièrement optimiste — Clark l'était suffisamment pour eux deux — mais depuis la disparition de son partenaire, elle devenait de plus en plus cynique. Elle ne s'était jamais aperçue à quel point ses pensées pouvaient être sombres en l'absence de la lumière qu'apportait Clark dans sa vie. Elle avait besoin qu'il revienne.

Son père avait ajouté qu'il avait donné un sédatif à Superman après l'examen pour qu'il puisse se reposer durant la nuit. Ça ne lui ferait aucun bien de s'épuiser inutilement, alors qu'il était encore si faible. Il avait appelé Lois pour la tenir au courant immédiatement après.

C'était maintenant le beau milieu de la nuit, mais Lois savait qu'elle ne parviendrait pas à retrouver le sommeil. Pas après avoir appris que Superman était finalement tiré d'affaire.

Elle était consciente qu'il ne pourrait pas répondre aux questions concernant Clark avant un certain temps, mais l'impatience la rendait incapable de rester calme.

Elle se leva de son lit et se dirigea vers la cuisine pour se faire une tisane qui l'aiderait peut-être à retrouver la sérénité. Mais elle s'arrêta net dès qu'elle eût fait un pas dans son salon.

Elle ne s'était pas beaucoup préoccupée de faire le ménage ou du rangement depuis le jour où elle avait compris qu'elle n'avait plus aucune piste à suivre, à part continuer d'espérer que Superman ne se réveille. En sombrant dans le désespoir, elle avait perdu tout intérêt pour le monde qui l'entourait. Et son appartement s'en ressentait. Il était habituellement toujours impeccablement rangé et propre, mais plus de deux semaines de laisser-aller l'avait transformé.

Tant qu'elle était dans son état de dépression, ça ne la dérangeait pas, mais maintenant qu'une lueur d'espoir lui était revenue, elle voyait le capharnaüm ambiant comme pour la première fois.

Elle renonça à la tisane, et se mit au rangement, et au nettoyage. Ce serait plus efficace pour la fatiguer et lui permettre de retourner se coucher, de toute façon.

Pendant des heures, elle s'était activée à essayer de redonner à son appartement son ancienne apparence, et lorsqu'elle vit les premiers rayons du soleil, elle sourit, pour la première fois depuis très longtemps. A l'hôpital, ils devaient probablement être en train d'exposer de nouveau Superman au soleil, et maintenant qu'il avait repris conscience, les progrès seraient sûrement plus rapides. Bientôt, très bientôt, il pourrait lui dire ce qu'il savait de la disparition de Clark. Elle était tellement impatiente.

Un peu fatiguée, elle alla se coucher. Elle pourrait toujours finir son ménage plus tard dans la journée.

***

Un pincement sur son bras réveilla Clark. Il ouvrit les yeux et aperçut les murs blancs. Ses souvenirs étaient un peu confus, mais il se rappelait vaguement qu'il s'était réveillé dans une chambre d'hôpital, que des médecins l'avaient examiné, lui avaient donné à boire et un potage puis ils lui avaient injecté quelque chose et il s'était rendormi.

Tournant la tête vers la droite pour voir ce qui lui pinçait le bras, il vit un médecin en train de lui faire une prise de sang. Ses souvenirs étaient flous mais il était presque sûr qu'il n'était aucun des deux médecins qui l'avaient examiné la veille.

« Bonjour Superman. Vous avez dormi longtemps, il est presque midi. Vous allez mieux ? » demanda le médecin d'un ton enjoué.

« Euh… oui, merci », répondit Superman. Il se sentait encore faible et fatigué mais ça n'avait rien à voir avec ce qu'il avait éprouvé la veille. Alors, il pouvait à peine remuer, tandis qu'il savait sans avoir besoin d'essayer qu'il pouvait maintenant bouger s'il le désirait. La douleur avait régressé aussi. Il avait encore un peu mal à la tête, mais ses pensées étaient bien plus claires.

« Qui êtes-vous ? » demanda-t-il au médecin alors qu'il étiquetait l'éprouvette qui contenait le sang qu'il venait de lui prélever.

« Oh oui, pardon ! J'avais oublié que vous ne m'aviez pas encore rencontré. Je peux me montrer étourdi parfois. Je suis le Dr Klein, physicien chercheur à STAR Labs. Je ne fais partie des médecins qui vous soignent que depuis quatre jours seulement. J'avais demandé à faire partie de l'équipe dès le début, mais… »

« Dr Klein, s'il-vous-plait », l'interrompit Superman impatiemment. Cet homme était un véritable moulin à paroles. Il aurait probablement continué de parler pendant une heure sans reprendre son souffle s'il ne l'avait pas interrompu. Lois faisait souvent pareil. Mais là, il n'était pas en état de le supporter. Son mal de tête avait progressé rien qu'à l'écouter pendant quelques secondes. Puis quelque chose qu'il avait dit lui revint à l'esprit. Quatre jours. Non, « depuis quatre jours seulement ». Bon dieu, combien de temps était-il resté à l'hôpital ?

« Depuis combien de temps je suis là ? »

« Eh bien, vous êtes resté dans le coma pendant environ un mois et demi. Vous ne vous êtes réveillé qu'hier soir. On a découvert comment vous soigner il y a trois jours seulement. La biologie kryptonienne est différente de la biologie humaine, et c'est par accident que j'ai finalement découvert que vous aviez besoin de soleil. Vous voyez, j'étais dans le laboratoire à étudier vos tissus toute la nuit, et un laborantin a ouvert les rideaux et… »

« Dr Klein ! » répéta Superman brusquement, interrompant de nouveau le flot de paroles qui menaçait de lui faire exploser le crâne.

« Oui, désolé », s'excusa le physicien d'un air contrit, et Superman se sentit coupable de s'être montré aussi sec avec un homme qui lui avait probablement sauvé la vie, et qui avait plutôt l'air d'un type bien.

« Merci. De m'avoir sauvé », s'excusa le super héros.

« Je vous en prie. J'étais ravi de pouvoir vous aider. »

« Vous croyez que je pourrai avoir de l'aspirine ? »

« L'aspirine fonctionne sur un corps kryptonien ? » s'étonna le Dr Klein.

« Je ne sais pas. Je n'ai jamais eu besoin d'essayer », répondit Superman, las.

Dr Klein lui sourit d'un air compatissant.

« Eh bien, on va tester. Même si ça ne vous aide pas, ça m'étonnerait que cela vous fasse le moindre mal. »

***

Etait-ce l'aspirine qui avait fait effet, ou allait-il mieux, tout simplement ? Superman ne savait pas, mais la migraine s'était estompée. Il se sentait très bien. Il était probablement maintenant aussi fort qu'un humain normal en bonne santé, mais il n'avait plus ses pouvoirs. Il avait essayé de se concentrer pour voir à travers les murs de sa chambre, ou écouter les conversations des personnes qui passaient dans le couloir, mais il n'avait pas réussi.

La dernière fois qu'il avait été exposé à la kryptonite, ses pouvoirs étaient revenus, mais l'exposition avait été très courte. Il était resté des heures dans la cage de Luthor. Et il ne savait pas si cette fois-ci, ses pouvoirs n'avaient pas disparu pour toujours. C'était possible. Il en savait tellement peu sur son propre corps.

Les médecins qui l'avaient étudié pendant qu'il était dans le coma en savaient plus long que lui. Qu'est-ce que le Dr Klein avait dit ? Qu'il avait besoin de soleil. La sensation du soleil sur lui l'avait toujours aidé à se sentir mieux, plus fort d'une certaine manière. Mais il ne savait pas jusque là s'il se faisait des idées, ou si ça avait été vraiment le cas. Apparemment, ça l'était.

Il devrait demander au Dr Klein s'il pensait que ses pouvoirs allaient revenir ou non. Il avait dit qu'il reviendrait voir comment il allait deux heures plus tard. Et ça devait bien faire deux heures maintenant ! Il s'ennuyait tellement, allongé dans son lit d'hôpital sans rien faire que si on lui disait qu'il s'était écoulé cinq heures depuis que le Dr Klein l'avait laissé seul, il le croirait volontiers. Il devrait peut-être lui demander également s'il pouvait avoir un journal, ou n'importe quoi d'autre pour s'occuper.

La porte s'ouvrit, interrompant ses pensées. C'était le Dr Klein.

« Alors, ça va mieux ? Encore mal à la tête ? » s'enquit-il immédiatement.

« Non, je vais très bien. Merci. Dites, je me demandais… Est-ce que mes pouvoirs reviendront ? » demanda Superman, mal-à-l'aise.

« Quoi ? Vous ne le savez pas ? » s'étonna le physicien.

« C'est que… Eh bien, disons que la biologie kryptonienne n'est pas ma matière forte. Je n'y connais rien », admit le super héros, encore plus mal-à-l'aise.

« Je vois. Vous étiez plus un littéraire. J'adore lire, moi aussi. Mais c'est surtout des livres de physique que je lis, vous voyez. J'en ai commencé un la semaine dernière qui est absolument fascinant… »

« Dr Klein ? »

Décidément, cet homme était incapable de se concentrer sur un sujet sans en dévier. Et il aimait de toute évidence parler sans fin. Mais Superman ne pouvait pas s'empêcher de le trouver très sympathique. Il l'aimait bien, et il était plutôt content que ce soit lui qui lui serve de médecin plutôt qu'un scientifique froid et calculateur qui ne lui rappellerait que trop bien qu'il était un alien à la merci de chercheurs qui pourraient trouver fascinant d'avoir l'opportunité de découvrir comment il fonctionne.

« Oui ? Oh ! Oui, désolé. Oui, vos pouvoirs reviendront. Vous avez juste besoin d'un peu de temps, de repos et de soleil. Je ne suis pas encore bien sûr d'avoir compris comment, mais vos cellules réagissent à la lumière solaire de façon étonnante, et les dommages causés par les radiations de… »

Le brave médecin s'interrompit en voyant Superman soupirer de découragement.

« Je vous passe les détails » conclut-il.

« Merci, Dr Klein » répondit Superman, vraiment reconnaissant au scientifique de s'être interrompu tout seul cette fois-ci. « Je me demandais aussi si je pourrais avoir le journal ? »

« Non, je suis désolé. Je ne crois pas que ce soit tellement une bonne idée », répondit le physicien après une brève hésitation. « Vous avez besoin de repos, et je doute que de lire les articles concernant les crimes qui ont eu lieu pendant que vous ne pouviez pas les empêcher ne vous aide à vous détendre. »

« Vous n'avez pas idée à quel point je m'ennuie ! » insista Superman.

« Je vais voir ce que je peux trouver », répondit Klein d'un ton conciliant en quittant la pièce.

Il revint un quart d'heures plus tard avec une télévision posée sur une petite table à roulettes. Il la mit dans un coin de la pièce et la brancha.

« Voilà. J'espère que vous aimez la télévision. Voyons voir ce qu'il y a… »

Le scientifique utilisa une télécommande pour allumer l'écran et zapper entre les chaines. Superman put avoir de brefs aperçus des nouvelles du monde, mais le Dr Klein changea les chaines tellement rapidement qu'il n'avait pas le temps de comprendre ce qui se passait. Finalement, le bon docteur s'arrêta sur l'une des chaines.

« Et voilà. Un bon film pour se détendre ! Ça devrait vous aider à patienter jusqu'à ce que l'inspecteur Henderson arrive. Il a dit qu'il serait là dans un peu plus d'une heure. Il voulait vous parler pour son enquête. Je viens de l'appeler pour lui dire que vous étiez suffisamment remis pour répondre à quelques petites questions », expliqua le Dr Klein en confiant la télécommande à l'un des deux policiers qui ne quittaient jamais la pièce, avant de sortir.

Superman tourna son attention vers la télévision pour tromper son ennui, et reconnut rapidement le film qui passait à l'écran. C'était « The Princess Bride », un conte pour enfants. Il soupira. Il n'avait pas le droit aux infos, il devait se contenter de contes pour enfants ! Pourvu qu'Henderson ne soit pas trop long…

Il avait déjà vu le film et il avait bien aimé, mais il n'était pas vraiment d'humeur à le revoir, surtout que cette fois-ci, l'histoire réveillait de mauvais souvenirs. La princesse Bouton D'Or avait choisi d'épouser le méchant Prince Humperdinck, sans une pensée pour le pauvre valet de ferme Wesley qui était amoureux d'elle. Wesley avait même une seconde identité, il était le Pirate Roberts, et il se faisait torturer par le méchant Prince et était laissé pour mort, alors même que la cérémonie de mariage avait lieu au château…

Décidément pas le film dont il avait besoin en ce moment. Au moins Lois n'avait pas épousé Luthor. Ses souvenirs de la veille au soir étaient toujours un peu flous mais il se souvenait que l'inspecteur Henderson lui avait dit que Luthor était mort. Il lui avait dit aussi que Lois allait bien.

Lois.

Il avait tellement envie de la revoir. Mais en même temps, la blessure qu'elle lui avait infligée en le rejetant était toujours à vif. Il savait qu'à la fin du film, Bouton D'or s'en allait avec Wesley et qu'ils vivaient heureux pour toujours. Malheureusement, c'était là que s'arrêtait la ressemblance de sa vie avec celle du film. Lois ne remarquerait jamais Clark, fils de fermiers du Kansas…

***

Superman faisait face sans ciller à l'inspecteur de police qui le regardait d'un air estomaqué. Cela faisait plus d'une heure que les deux hommes discutaient. Jusque là, la conversation s'était très bien passée.

Quand Henderson était arrivé, Superman était vraiment content de le voir. Et l'inspecteur de police paraissait encore plus heureux de le voir aller mieux. Et après quelques formules de politesse, Superman lui avait demandé des nouvelles de Lois, mais le policier s'était montré assez évasif, se bornant à dire qu'elle allait bien, et avait rapidement changé de sujet en commençant l'interrogatoire.

Il lui avait demandé de raconter ce qui était arrivé, ce que Luthor lui avait fait. Son récit n'avait fait que corroborer ce qu'ils avaient déjà deviné. Il lui avait demandé ensuite ce qu'il savait des activités criminelles de Luthor, pour que le milliardaire le haïsse au point de mettre tout en œuvre pour trouver un moyen de le tuer, et leurs recherches dans les documents de Luthor prouvaient qu'il avait cherché ce moyen désespérément.

Superman lui avait alors raconté tout ce qu'il savait de Luthor, et tout ce qu'il soupçonnait, sans avoir jamais pu prouver l'un ou l'autre. Le sabotage de la navette Messenger, les meurtres de Samuel Platt, d'Antoinette Baines, les tests que Luthor lui avaient fait subir en mettant en danger la vie d'innocents, parfois causant même leurs morts lorsqu'il avait arrêté de répondre aux appels à l'aide, les expériences sur les enfants avec la Mentamide, la transformation de boxers en cyborgs… Tout. Il raconta tout.

Le récit fut long, mais Henderson l'écouta patiemment, prenant des notes, l'interrompant juste de temps à autre pour poser une question quand un point n'était pas assez clair.

Quand il eut finit, après avoir raconté tout ce qu'il savait de l'implication de Luthor dans la destruction du Daily Planet, Henderson enchaina :

« Ce sont toutes les découvertes que Clark Kent a faites pendant son enquête. C'est lui qui vous a dit tout ça, ou c'est vous qui aviez fourni les informations à Kent ? »

La question le prit un peu au dépourvu. Se l'était-il dit à lui-même ou se l'était-il dit à lui-même ? Bien sûr, Henderson ne pouvait pas être conscient de l'ironie de sa question. Néanmoins, il attendait une réponse, et puisque c'était Clark celui qui, de ses deux personnalités, était l'enquêteur, la réponse à faire lui vint facilement.

« C'est Clark qui m'a mis au courant de ce qu'il avait découvert », répondit Superman.

« Donc, vous lui avez parlé, après qu'il ait eu terminé son enquête sur Luthor ? » insista Henderson.

« Oui », répondit Superman d'un ton plus méfiant. Il ne savait pas pourquoi mais il avait l'impression que la question du policier était une question piège.

« La veille du jour où on vous a retrouvé dans la cage en kryptonite, Lex Luthor avait laissé un message à Clark Kent lui demandant de vous contacter pour vous demander d'aller le voir. C'est bien pour ça que vous êtes allé retrouver Luthor ? »

Superman acquiesça de nouveau, le sentiment d'être sur le point de se faire piéger encore plus insistant.

« C'est à ce moment-là que Kent vous a parlé de ses découvertes ? Lorsqu'il vous a transmis le message de Luthor ? »

Il hocha de nouveau la tête affirmativement, se demandant où voulait en venir l'inspecteur.

« Qu'a fait Kent après ça ? »

« Je ne vous suis pas très bien. Pourquoi vous m'interrogez sur Clark ? » demanda Superman, éludant la question.

C'était à ce moment-là que la discussion avec Henderson avait commencé à mal tourner.

« Clark Kent est porté disparu. Personne ne sait ce qui lui est arrivé. On a retracé le parcours de sa journée. Il a enquêté sur Luthor toute la journée. Il a eu quelques conversations téléphoniques avec Perry White, Jimmy Olsen, et Jack Wilson durant la journée. Après leur dernière conversation, il a été vu par Lois Lane marchant dans la rue, vers chez lui, alors qu'elle passait en voiture. Ils se sont disputés et il a repris sa route. C'était la dernière fois que quelqu'un l'avait vu. On sait qu'il est rentré chez lui, a déposé ses notes sur Luthor et les preuves qu'il avait dans un tiroir de son bureau, a écouté le message de Luthor sur le répondeur et est ressorti. Mais on ne sait plus rien de lui après ça. C'est comme s'il s'était complètement volatilisé », expliqua patiemment le policier. « Mais vous venez de dire qu'il vous avait effectivement trouvé et parlé. Vous êtes maintenant la dernière personne à l'avoir vu vivant. Alors je répète, qu'a fait Kent après ça ? »

La voilà. C'était donc ça la question piège qui se profilait à l'horizon. Et que pouvait-il bien répondre ? Evidemment que la disparition de Clark Kent n'était pas passée inaperçue. C'était d'autant moins possible qu'il hébergeait Perry, Jimmy et Jack à ce moment-là. C'était évident qu'ils avaient remarqué qu'il n'était pas rentré à l'appartement. Mais que pouvait-il dire concernant son absence ?

Si au moins, il avait eu du temps pour réfléchir à une réponse, mais il n'avait vraiment pas vu venir la question. Depuis qu'il s'était réveillé quelques heures plus tôt, il n'avait pas pensé à ce que le coma de Superman pendant un mois et demi avait bien pu signifier pour la vie de Clark Kent. A la place, il avait réfléchi à ce que serait devenue sa vie si ses pouvoirs ne revenaient jamais, en dépit des réassurances du Dr Klein, il avait pensé à Lois, à ses parents, il s'était demandé ce qui se passait dehors — inquiétude qui l'avait poussé à demander un journal au Dr Klein, au lieu de quoi, il avait eu droit à un conte de fées ! — mais jamais il n'avait envisagé la situation sous l'angle de la disparition de Clark Kent pendant un mois et demi.

Et pourtant, c'était tellement évident. Il aurait dû y penser. Et réfléchir à une excuse à donner à tout le monde. Mais parce qu'il ne l'avait pas fait, il se retrouvait silencieux, sans avoir rien à dire à l'inspecteur de police qui attendait toujours sa réponse. Mais il avait trop tardé.

« Superman, qu'a fait Kent après vous avoir parlé ? Où est-il allé ? Que lui est-il arrivé ? Est-ce que Luthor l'a piégé en même temps que vous ? » insista Henderson.

Mais encore une fois, il ne savait pas quoi répondre, alors il garda le silence. Il avait besoin de plus de temps pour penser à une excuse valable.

« Mais parlez ! » commença à s'énerver le policier. « Vous vous rendez-compte de l'inquiétude de tous ses amis ? Si vous savez quelque chose, dites-le, bon sang ! »

Après une courte hésitation, il finit par donner la seule réponse qu'il pouvait. Celle qui lui ferait gagner le temps nécessaire pour qu'il puisse trouver une meilleure réponse.

« Je ne vous dirais pas où est Clark Kent, mais… il va bien », ajouta-t-il pour calmer le policier en le rassurant sur son sort. Il se sentait coupable de l'inquiétude de tous ses amis pour lui. Il pouvait au moins leur faire savoir qu'il allait bien, même s'il n'avait pas encore trouvé comment expliquer où il était passé. « Dès que je pourrais sortir de l'hôpital, j'irais le chercher, et je le ramènerais. »

Voilà au moins qui lui garantissait de ne pas rendre suspecte la réapparition simultanée de Clark et Superman. C'était au moins un problème dont il n'aurait pas à se soucier.

Mais Henderson ne prit pas bien sa réponse. Le policier le fixait, incrédule, paraissant même un peu en colère, mais Superman lui fit face sans ciller. Il ne pouvait rien lui dire d'autre.

« Vous refusez de dire où se trouve Clark Kent ? » répéta le policier qui ne parvenait pas à en croire ses oreilles. « Vous savez où il est, mais vous refusez de le dire ? »

Superman ne broncha pas et soutint son regard en silence. Après quelques instants durant lesquels Superman put voir sur le visage de l'inspecteur de police la colère monter en puissance, pour être ensuite remplacée par une rage froide tandis que le policier reprenait contrôle de lui-même, Henderson parla à ses hommes dans la pièce d'une voix mesurée, mais sans quitter le super héros des yeux.

« Pouvez-vous sortir monter la garde à l'extérieur de la chambre, s'il-vous plait. J'ai à parler avec Superman, en privé. »

Les deux policiers de garde sortirent et refermèrent la porte derrière eux.

« Vous vous rendez bien compte, Superman, que détenir des informations nécessaires à une enquête de police mais refuser de répondre est un crime ? Et vous serez aussi considéré comme complice de ce qui est arrivé à Clark Kent. Si on ne le retrouve jamais, vous pourriez même être considéré comme le complice de Luthor pour le meurtre de Clark Kent. On a un témoin, son assistante, qui nous a dit que Luthor prévoyait de le faire assassiner. Elle nous a rapporté que Luthor lui avait même dit que c'était vous qui aviez soulevé le fait qu'il fallait l'éliminer. Ça, en plus de votre refus de nous dire où il se trouve alors que vous avez admis le savoir, et je suis sûr qu'on peut monter un dossier » le menaça Henderson.

« Vous n'êtes pas sérieux, Henderson », répliqua Superman qui n'en croyait pas ses oreilles. Mais le policier continua sans se soucier de l'interruption, sur la même voix doucereuse.

« En fait, nous avons innocenté les trois personnes les plus proches de Luthor concernant la disparition de Kent, mais on n'a pas retrouvé à qui il avait demandé de se charger de lui. C'était peut-être vous. Après tout, vous êtes la dernière personne à l'avoir vu vivant. Ça fait de vous, en tout état de cause, un suspect. Et je suis sûr qu'un bon procureur devrait se montrer capable de vous faire porter le chapeau. Avec vos pouvoirs, rien de plus facile pour vous de faire disparaître son corps… »

« Il n'est pas mort ! » s'exclama Superman. « Je vous l'ai dit, il va bien ! »

« Alors où est-il ? » redemanda le policier, perdant toute prétention à menacer Superman de monter un dossier contre lui pour la disparition de Clark Kent.

« Je… Je ne vous le dirai pas, mais je le ramènerais à Metropolis dès que je sortirai de l'hôpital » redit Superman, « et vous pourrez vérifier par vous même qu'il va bien ».

Pourvu qu'il ait trouvé une bonne excuse pour tout ça d'ici là !

Henderson soupira de frustration.

« Vous vous fourrez le doigt dans l'œil si vous pensez que je vais me contenter de dire ça à Lane ! Que Kent va bien, et qu'elle n'a plus qu'à attendre pour que vous le lui rameniez ! Elle est devenue pratiquement folle tellement elle est inquiète ! Perry a été obligé de la mettre en congé forcé, et elle a dû commencer à suivre une psychothérapie, parce qu'elle ne savait pas où son partenaire était passé ! Quand les pistes se sont taries, elle nous a fait une vraie dépression, et vous êtes son dernier espoir ! Et vous refusez de nous dire où il est ?! »

Henderson avait commencé sa tirade calmement, mais il s'échauffait au fur et à mesure qu'il parlait, et il termina en criant presque.

Superman le regardait, choqué.

« Lois ? Elle… »

Sa voix se déroba, tant il était choqué. A deux reprises, il avait demandé à Henderson si Lois allait bien, les deux fois, il lui avait répondu que oui. Mais ce n'était pas le cas. La disparition de Clark l'avait apparemment fortement ébranlée, bien plus que tout ce qu'il aurait pu imaginer. Elle avait sombré dans une profonde dépression, tellement sérieuse qu'elle devait voir un psy. Simplement parce qu'elle ne savait pas où était passé Clark…

Il ne s'était jamais attendu à une réaction pareille de la part de Lois si jamais Clark sortait de sa vie. Après que Luthor l'ait demandée en mariage, ils étaient légèrement en froid. Après la dispute lors de la soirée de départ en retraite de Perry, le jour qui avait suivi la déclaration d'amour qu'il lui avait faite, et qu'elle avait rejeté, ils étaient à peine amis. Pendant des semaines, ils ne s'étaient pas vus ni parlés, et ça n'avait pas eu l'air de la gêner plus que ça.

Oh bien sûr, il était conscient que pendant ces semaines-là, les semaines où elle préparait son mariage avec Luthor, elle avait pensé à lui de temps en temps, comme à un ami. C'était évident qu'elle ne l'avait pas complètement chassé de son esprit : elle lui avait téléphoné un soir alors qu'il était en train de lire un magazine dans son lit, prêt à se coucher. Elle voulait prendre de ses nouvelles. Et la veille de son mariage, elle était venue le trouver pour lui demander d'assister à la cérémonie. Il ne se souvenait plus les mots exacts, mais elle lui avait alors fait comprendre que leur amitié lui manquait.

Alors il savait que si Clark Kent disparaissait, Lois aurait de la peine, et qu'il lui manquerait. Mais une telle réaction, il ne l'avait pas anticipée. Qu'est-ce que ça signifiait vraiment ? Qu'est-ce que ça lui apprenait sur les vrais sentiments de Lois pour lui ? Il n'en était pas bien sûr. Ça pouvait toujours n'être que de l'amitié…

Quoi que ce soit qui ait causé la réaction que Lois avait eu à la disparition de Clark n'était pas ce qui comptait pour l'instant. L'important, c'était qu'elle souffrait, qu'elle souffrait vraiment et il ne le supportait pas. Imaginer Lois dans la peine était une idée atroce qu'il ne voulait pas contempler.

Il devait faire quelque chose pour y mettre fin. Quoi ? Il ne le savait pas. Mais il ne pouvait pas la laisser comme ça, sans l'aider. Mais que pouvait-il faire ? Lui dire où était Clark ? Il n'était pas prêt à révéler la vérité à Lois. Ce jour-là, dans le parc, et plus tard dans son appartement, elle s'était montrée très claire. Elle était amoureuse de Superman, et elle n'aimait Clark que comme un ami. Il n'avait pas encore surmonté la souffrance qu'elle lui avait alors causée. Il n'était pas prêt à lui dire la vérité, et il n'avait pas encore trouvé d'excuses…

Mais Lois avait besoin de lui, et il n'allait pas la laisser tomber. Elle aimait Superman, et bien Superman pouvait essayer de la réconforter et de la rassurer sur le sort de Clark, même s'il ne pouvait pas lui dire où il était. Il pouvait essayer d'atténuer la douleur de Lois. Elle avait besoin de lui, et s'il devait se montrer totalement honnête, il avait besoin de la voir, lui aussi.

« Vous avez raison, inspecteur. Ce n'est pas à vous de dire à Lois que je refuse de révéler où se trouve Clark. Je vais le faire moi-même » annonça Superman calmement dès que le choc que lui avait causé les révélations d'Henderson sur l'état de Lois s'était atténué suffisamment pour le laisser de nouveau parler.

Le policier le regarda d'un air hébété. Il ne s'attendait visiblement pas à ce que sa tirade provoque cette réponse-là.

« Vous êtes complètement fou. Vous ne pouvez pas faire face à Lois dans votre état actuel, et surtout pas si vous prévoyez de refuser de lui dire où est Clark. Vous n'êtes pas en état de l'affronter », rétorqua Henderson.

« Peut-être bien », concéda Superman, « mais ça n'y change rien. Je veux lui parler. »

***

Lois n'avait réussi à dormir que quelques heures. Elle s'était de nouveau réveillée vers midi. Elle se jeta immédiatement sur son répondeur pour vérifier si elle n'avait pas eu de message lui signifiant que Superman était finalement en état de répondre aux questions de la police, qu'il leur avait dit où était Clark et qu'on l'avait enfin retrouvé, sain et sauf. Mais elle n'avait aucun message.

Horriblement déçue, elle se servit un café et reprit le ménage de son appartement là où elle s'était arrêtée, aux aurores. Son impatience, ajoutée à son inactivité de ces deux dernières semaines, lui causait un surplus d'énergie qu'elle avait absolument besoin de dépenser. Elle devait aussi trouver un moyen d'occuper son esprit. Si elle se contentait d'attendre que Superman aille mieux en rêvant de ce qu'il pourrait révéler à ce moment-là, l'impatience la rendrait complètement folle.

En quelques heures, elle eut totalement terminé. Son appartement était minutieusement ordonné, et impeccablement nettoyé. Elle s'était montré encore plus maniaque qu'à l'accoutumé sur les tâches ménagères.

Mais maintenant, il était à peine 16 heures, et elle était de nouveau désœuvrée. En attendant de trouver quoi faire pour tenir le coup pendant les dernières heures de la journée, et une partie de la nuit aussi, si jamais Superman n'était toujours pas suffisamment en forme pour parler à la police, elle décida d'aller prendre une douche. Après ses longues heures de ménage, elle en avait définitivement besoin.

Elle sortait à peine de la salle de bains lorsque son téléphone sonna.

Son cœur bondit dans sa poitrine. Ce pouvait-il que ce soit enfin le coup de téléphone qu'elle attendait tant ? Celui qui lui annoncerait que Superman avait parlé et que Clark avait été retrouvé ?

Elle s'imaginait déjà en train de se préparer à toute vitesse, de sauter dans sa Jeep, et d'aller au commissariat où il était probablement en train de faire sa déposition. Elle le verrait et courrait vers lui, et dès qu'il l'apercevrait, il la serrerait fort dans ses bras, et tout irait bien.

Mais elle savait que c'était une idée complètement folle. Un rêve qui avait trop peu de chances de se réaliser. D'abord, après toutes les horribles choses qu'ils s'étaient dites lors de leur dispute, il était peu probable qu'il l'accueille les bras grands ouverts, même s'il était actuellement en train de faire sa déposition au commissariat. Elle devrait d'abord lui faire ses excuses. Ensuite, elle savait aussi qu'il avait plus de chance d'être retrouvé mort que vivant, si on s'en fiait aux statistiques. Elle le savait, même si elle refusait d'envisager cette possibilité. Et pour finir, ils n'étaient même pas sûrs que Superman sache ce qui était arrivé à Clark. Ce pouvait être une nouvelle voie sans issue… Sans compter que ce coup de téléphone pouvait tout aussi bien n'avoir rien à voir avec la disparition de Clark.

Consciemment, elle savait toutes ces choses, mais elle ne pouvait pas s'empêcher d'espérer que les choses se dérouleraient comme dans un conte de fées.

Le sang battant à ses tempes tant elle était excitée, elle décrocha le téléphone rapidement.

« Allô ? » demanda-t-elle avec excitation.

« Lois ? C'est Henderson. Je suis à l'hôpital… » commença la voix à l'autre bout du fil, mais Lois l'interrompit impatiemment.

« Ça y est ? Vous avez pu parler à Superman ? » s'enquit-elle, la voix pleine d'espoir.

« Euh, oui » répondit le policier, mal-à-l'aise.

« Alors ? Qu'a-t-il dit ? » s'impatienta Lois.

« Euh… Il veut vous parler. »

« Et à propos de Clark ? » le coupa Lois, désespérant de lui faire dire ce qu'elle voulait entendre.

« C'est… C'est à propos de Clark qu'il veut vous parler »

L'esprit de Lois enregistra finalement les manières réservées de l'inspecteur de police. Il n'était pas du tout excité, comme elle, à l'idée de retrouver Clark, enfin. Et pourtant, il avait déjà parlé avec Superman, donc il savait déjà ce que Superman avait à dire concernant Clark. Et pourtant, il n'était pas du tout excité à l'idée de le retrouver…

Elle eut l'impression que la foudre l'avait frappée. Ça ne pouvait pas être vrai. Elle se mit à pleurer.

« Oh mon Dieu ! Il est mort ! C'est ça, hein ? » sanglota-t-elle dans le téléphone. « Il veut me l'annoncer en personne, c'est pour ça qu'il veut me parler ?… Alors, il est mort ? C'est fini ? »

Elle pleurait de plus en plus fort, et elle se sentait presque paralysée par la douleur, maintenant qu'elle savait qu'il n'y avait plus aucune chance qu'elle le revoie un jour, qu'elle lui demande pardon, et qu'elle lui dise qu'elle l'aimait. Sans bien s'en rendre compte, elle dit tout ça à voix haute dans le téléphone, tout en pleurant. Mais finalement, les mots qu'Henderson lui répondaient, en haussant de plus en plus la voix, désespérant de se faire entendre, lui parvinrent.

« Lane ! Non, Lane ! Ecoutez-moi ! Il va bien. Clark va bien. Ecoutez-moi. Lane. Non, il va bien… »

Les mots finirent par percer la douleur qui l'avait rendue sourde. Elle s'arrêta de pleurer dès que leur sens lui parvint.

« Il va bien ? » répéta-t-elle plus calmement, cherchant une réassurance.

« Oui. Clark va bien » lui répondit Henderson.

« Vous l'avez retrouvé ? » demanda-t-elle, l'espoir renaissant.

« Euh… Pas encore » hésita Henderson. « Mais Superman nous assure qu'il va très bien, vous en faites pas. Et venez à l'hôpital rapidement, s'il-vous- plait. Il veut vous parler. »

Comprenant qu'elle n'en tirerait pas plus par téléphone, elle accepta et raccrocha. Elle courut dans sa chambre pour s'habiller avec les premiers vêtements qui lui tombèrent sous la main, et sauta dans sa Jeep pour aller à l'hôpital où l'attendaient les réponses qu'elle cherchait depuis si longtemps.

Dès qu'elle était arrivée, Henderson l'avait immédiatement accueilli et accompagnée dans le bâtiment, passant la sécurité avec elle. Tout au long du chemin, elle le harcela pour savoir ce que Superman avait dit, et finalement, alors qu'ils atteignaient la porte de la chambre de Superman, l'inspecteur de police l'informa que le super héros refusait de révéler ce qu'il savait de la disparition de Clark, excepté pour dire qu'il allait bien.

C'était comme si un mur venait de s'effondrer sur sa tête. Pourquoi refusait- il de parler ? S'il ne parlait pas, elle ne retrouverait jamais Clark…

C'était avec des larmes dans les yeux qu'elle entra finalement dans la chambre, suivie par Henderson.

***

Superman leva les yeux dès qu'il entendit la porte s'ouvrir, et son cœur subit un choc lorsqu'il revit Lois pour la première fois depuis qu'ils s'étaient disputés dans la voiture décapotable de luxe qu'elle avait empruntée à Luthor, lorsqu'elle tentait de le convaincre de venir assister au mariage.

Ce n'était plus du tout la même femme qui était là, devant lui. Son cœur se serra à sa vue. Elle était habillée n'importe comment, pas coiffée, pas maquillée, et elle avait les yeux rouges et plein de larmes. Savoir qu'elle faisait une dépression et la voir dans cet état-là étaient deux choses différentes. Il ne l'avait jamais vue comme ça, et il ne voulait pas la revoir comme ça. Jamais.

Avant qu'il n'ait pu dire quoi que ce soit, elle s'élança vers lui et commença à le supplier, sous les yeux d'Henderson et des deux policiers qui étaient de garde dans sa chambre.

« Où est Clark ? Je vous en prie, où est-il ? Dites-le moi, s'il-vous-plait, Superman. Il faut que je sache. »

Il lui était impossible de répondre à ses supplications, et pourtant, il lui était impossible de ne rien faire lorsqu'il la voyait souffrir autant. Il ne pouvait pas le supporter. Il n'avait aucune solution. Incapable de la regarder plus longtemps dans les yeux, il regarda autour de lui et vit Henderson derrière elle qui le fixait durement, comme pour le mettre au défi de refuser de nouveau de soulager le désespoir de Lois. Mais il ne savait pas quoi lui dire d'autre.

« Lois, Clark va très bien », lui dit-il de son air le plus rassurant, en essayant de lui sourire malgré la boule qui venait de se former dans sa gorge. Comme il aimerait avoir une meilleure réponse à lui donner ! Mais il n'en avait pas, à part la vérité, et il n'était toujours pas prêt à la révéler. Et surtout pas avec Henderson et deux de ses hommes dans la pièce.

« Mais où est-il ? » insista Lois, en pleurant maintenant librement.

« Je ne peux pas… » commença Superman, mais il fut incapable de finir sa phrase devant l'image du désespoir que lui donnait Lois, et il sentit malgré lui une larme couler sur sa joue.

« Je vous en supplie ! J'ai besoin de savoir ! Je l'aime et je n'ai jamais pu lui dire… La dernière fois qu'on s'est vu, on s'est disputé. Je vous en supplie… Il faut que je le revoie ! » le supplia-t-elle en pleurant désespérément, craignant de ne pas le convaincre de parler.

Superman eut du mal à se retenir de pleurer lui-même en voyant Lois aussi anéantie par le chagrin. Il ne pouvait pas continuer à la laisser souffrir autant. Peu importe qu'il n'était pas prêt à lui dire la vérité, il le devait. Et il ne pouvait même plus se justifier auprès de sa conscience en se disant qu'elle n'était intéressée que par Superman ; Clark comptait de toute évidence beaucoup pour elle. Elle venait même de dire qu'elle l'aimait. Il devait lui dire, et il allait le faire. Mais pas avec la police dans la pièce.

Il prit une profonde inspiration pour essayer de retrouver le contrôle de ses émotions, et se tourna calmement vers Henderson.

« Inspecteur, s'il-vous-plait, vous voulez bien nous laisser ? Je voudrais parler en privé avec Lois. »

Henderson commença à marcher vers la porte mais ses deux hommes ne firent aucun mouvement pour le suivre.

« En privé, s'il-vous-plait, messieurs », répéta Superman en direction des deux policiers de garde dans la pièce. Henderson s'arrêta et parut hésiter.

« Henderson, vous savez parfaitement que Lois n'essaiera pas de me tuer. Et je ne pourrais pas lui parler en privé avec deux nounous dans la pièce » insista le super héros.

Finalement, Henderson fit un geste à ses hommes pour leur indiquer de sortir dans le couloir.

« On est juste de l'autre côté de la porte, en cas de besoin, Superman », l'informa le vieil homme avant de sortir à son tour.

Aussitôt seuls, Superman se tourna vers Lois, dont les larmes se calmaient un peu, curieuse de savoir ce qu'il avait à lui dire en privé. Elle essayait de ne pas trop espérer. Après son refus de parler plus tôt, ce ne serait probablement pas ce qu'elle se désespérait d'entendre, de toute façon. Elle devait absolument le faire changer d'avis. Elle se remit à le supplier.

« Je vous en prie, Superman. Pitié… »

« Lois, je vais vous dire où est Clark », l'interrompit-il. « Mais avant, je dois vous demander de promettre de ne rien dire à personne… »

« Je vous le jure ! » s'exclama-t-elle aussitôt. « J'ai juste besoin de savoir. Je veux lui dire… que je me suis trompée. Et que je l'aime. Et j'espère qu'il me pardonnera tout ce que je lui ai dit, et qu'il m'aimera toujours, lui aussi… »

Elle venait de répéter une seconde fois les mots qu'il espérait entendre depuis un an, et il se sentit ému par sa déclaration d'amour, et surtout l'émotion avec laquelle elle avait parlé. Il ne ferait pas marche arrière, il devait vraiment lui dire.

Mais au moment où il s'apprêtait à parler, il vit une ombre sous la porte et soupira. Henderson et ses hommes n'étaient pas simplement de l'autre côté, ils écoutaient probablement ce qui se disait. Ne pouvait-il donc pas avoir une minute tranquille ?

« Je ne veux pas que qui que ce soit d'autre entende ce que je vais dire, alors… je vais vous parler à l'oreille. Et vous ne devrez pas répondre. Vous ne devrez pas dire quoi que ce soit, pour empêcher que l'on comprenne ce que je vais vous dire. Promettez le moi, Lois. »

« C'est promis. Je garderai le silence. »

« D'accord. Venez ici, que je vous parle. »

Elle s'avança encore plus près et s'assit sur le rebord du lit où il était à moitié allongé, à moitié assis, appuyé contre ses oreillers. Il se releva davantage et se pencha vers elle. La bouche à son oreille, il se mit à parler.

« Je… Je suis… »

Non. Il ne pouvait pas lui annoncer aussi brusquement qui il était. Elle était de toute évidence trop émotionnellement fragile pour supporter un tel choc. Il devait lui dire avec plus de tact.

« Je suis né sur la planète Krypton quelques jours seulement avant qu'elle n'explose. Mes parents biologiques m'ont envoyé sur Terre pour me sauver la vie. Quand je suis arrivé ici, je n'étais qu'un bébé. Mon vaisseau s'est crashé dans un champ du Kansas, près de… Smallville. J'ai été trouvé par un couple de fermiers qui m'ont adopté et élevé comme leur fils. C'étaient les Kent. Et ils ont décidé de m'appeler Clark. »

Lois se recula brusquement de lui et le regarda fixement, attentivement, cherchant sur le visage du super-héros les traits de son partenaire. Il lui sourit d'un air rassurant et elle sembla le reconnaître enfin. Les yeux de Lois se remplirent de larmes, et quand elle se mit à sourire, elle sembla rayonner de bonheur. Mais quand il la vit remuer les lèvres, il mit rapidement un doigt sur ses lèvres avant qu'aucun son ne sorte de sa bouche.

« Shh. Pas un mot, tu as promis », lui rappela-t-il avec tendresse. Lui et Lois ne s'étaient jamais tutoyés avant, mais ça lui était venu naturellement. Quelque part, il sentait qu'ils venaient tous deux de franchir un cap au delà duquel le vouvoiement ne semblait plus juste.

Elle acquiesça d'un signe de tête, en le dévorant des yeux.

« Je sais qu'on doit en parler, mais… ce n'est pas vraiment le moment ni l'endroit idéal. Quand je pourrai sortir de l'hôpital, et ramener Clark, on pourra discuter, vraiment en privé cette fois », promit-il avant de se pencher de nouveau vers son oreille.

« Et tu n'as aucun besoin de me demander pardon. Et je t'aime toujours, moi aussi. »

Elle se mit à pleurer de bonheur aussi fort qu'elle avait pleuré de désespoir durant les dernières semaines, et il la prit dans ses bras, la serrant fort contre lui.

Il s'adossa de nouveau aux oreillers dans son dos, amenant Lois à s'allonger près de lui sur le lit. Elle continua de pleurer de soulagement contre son épaule, se calmant peu à peu, tandis qu'il la serrait contre lui, dans ses bras, penchant par moment le visage vers elle pour embrasser ses cheveux ou son front.

Ils restèrent dans cette position longtemps après que ses larmes se soient taries. Elle ne voulait pas bouger. Elle avait désespéré de revoir Clark un jour, alors maintenant qu'elle était dans ses bras, elle n'était pas prête à en bouger. La tête contre sa poitrine, elle pouvait entendre son cœur qui battait à travers le tissu de la blouse d'hôpital qu'il portait, et c'était le plus beau son qu'elle ait jamais entendu. Le plus apaisant.

Mais la soirée était tombée. Il n'y avait presque plus de soleil qui entrait par la fenêtre. Il serait bientôt temps de refaire le transfert vers sa chambre avec les volets.

Ils entendirent frapper à la porte, avant qu'elle ne s'ouvre, et Henderson rentra dans la pièce avec ses hommes. Il parut surpris de voir Lois allongée aux côtés de Superman, dans ses bras, mais se reprit rapidement.

« Désolé de vous interrompre, mais les visites sont finies. Il est l'heure de le ramener dans sa chambre pour la nuit. »

Lois sembla être sur le point de protester, alors Superman la devança pour prendre la parole.

« Il a raison, il se fait tard, Miss Lane. Vous devriez rentrer chez vous. Je vous promets que l'on se reverra bientôt. Je vais beaucoup mieux, et je suis sûr que je serais très bientôt autorisé à sortir de l'hôpital. Je vous ramènerai Clark aussitôt », lui dit-elle.

Quand elle acquiesça d'un signe de tête, visiblement à contre cœur, il ajouta : « En attendant, peut-être que vous pourriez contacter ses parents et leur dire qu'il va bien, qu'il rentrera bientôt. Ils doivent être morts d'inquiétude. Vous devriez leur parler. »

De nouveau, elle acquiesça. Tandis qu'elle sortait de la chambre, elle réalisa à quel point ça avait dû être dur pour les parents de Clark. Contrairement à elle, ils avaient toujours su où était leur fils, mais ils ne pouvaient pas l'approcher. Et s'il ne s'était jamais réveillé, ils n'auraient jamais pu le voir une dernière fois ou même assister aux funérailles. Il aurait été enterré en tant que Superman, et ils n'étaient que des fermiers du Kansas… Elle se résolut de les appeler pour les rassurer sur son état de santé. Les informations qui filtraient dans la presse tenaient plus des rumeurs que des nouvelles confirmées. Henderson tenait à garder un maximum de secret autour de lui.

Et puis elle leur dirait aussi qu'elle connaissait leur secret, et peut-être même que Martha accepterait de lui raconter quelques histoires sur Clark ? Elle avait tellement de questions, et elle savait qu'elle ne pouvait pas les lui poser, à lui, tant qu'il serait à l'hôpital sous étroite surveillance. Et toutes les mères avaient des choses à dire sur leurs fils, et celle-ci n'avait probablement jamais pu parler librement du sien. Lois aimait bien Martha Kent. Elle se souvenait de la conversation téléphonique qu'elles avaient eue, quand elle lui avait avoué qu'elle était amoureuse de Clark. Elles avaient pleuré ensemble. Lois savait qu'elles s'entendraient bien toutes les deux, et elle était pressée de mieux faire la connaissance des parents de Clark.

***

Tandis qu'elle s'apprêtait à remonter dans sa Jeep pour rentrer chez elle, Henderson arriva dans le garage et la retint.

« Alors, Lois. Où est Clark ? » demanda-t-il à brûle-pourpoint.

« Il va bien, Inspecteur. Ne vous en faites pas. Superman a dit qu'il le ramènerait dès qu'il pourrait sortir de l'hôpital », lui répliqua Lois, après une longue hésitation. Elle ne pouvait rien lui dire d'autre.

« Ce n'est pas ce que je vous ai demandé. Où est-il ? »

« Je ne sais pas », mentit-elle. Mais Henderson ne fût pas dupe une seule seconde.

« Ne vous moquez pas de moi ! Vous êtes arrivée complètement désespérée à l'idée que Superman ne nous dise jamais ce qu'il sache sur Kent. Ensuite, vous discutez seule à seul, et quand je reviens, c'est le gros câlin, et vous n'êtes plus du tout inquiète. Alors, à d'autres ! Superman vous a dit où est Clark. Vous le savez, ne mentez pas. Où est-il, Lane ? » insista-t-il, un peu en colère.

Lois hésita. Elle avait besoin de trouver une excuse, mais laquelle ? Même Clark n'avait apparemment pas trouvé d'excuses valables à donner, ou il l'aurait déjà fait. Le silence commençait à s'éterniser.

« Je ne vais pas laisser tomber, Lane ! La police a utilisé trop de ressources pour essayer de retrouver Kent pour que je laisse tomber. Je découvrirai où il est. Et vous feriez mieux de prier pour qu'il aille vraiment bien, parce qu'en refusant de répondre, vous faites obstruction à la justice ! » dit-il de plus en plus menaçant.

« D'accord ! Si vous insistez ! Je vais vous le dire », concéda Lois d'un air excédé. « Mais vous devez d'abord promettre de ne jamais le répéter, ni l'écrire dans votre rapport. Rien. »

« Okay », répondit-il, un peu soupçonneux.

« Superman a mis Clark à l'abri chez lui, avant d'aller voir Lex. Vous savez, pour le cas où ce serait un piège… » expliqua-t-elle. C'était la théorie que Jimmy lui avait proposée quelques semaines plus tôt, quand elle tentait de retrouver Clark, et qu'il commençait à paraître évident que Lex n'était pour rien dans sa disparition. Elle avait trouvé l'idée farfelue, mais c'était la seule chose qui lui était venu à l'esprit qui pouvait expliquer pourquoi Clark avait disparu alors qu'il allait bien, et pourquoi Superman refusait de coopérer.

« Chez lui ? » répéta Henderson, incrédule.

« Oui », insista Lois, essayant de paraître pleine de confiance en soi, alors même qu'elle savait qu'il était évident à son expression qu'elle était en train de mentir. « Dans son refuge secret. C'est pour ça qu'il ne veut pas dire où est Clark. Il ne veut pas donner son adresse. »

« Un refuge secret ? » répéta Henderson, encore plus incrédule. « Et pourquoi il n'en est pas sorti quand il a appris que Luthor était mort et qu'il ne courait plus aucun danger ? Quand son visage a fait la Une du Daily Planet tous les jours en tant que personne disparue ? » demanda-t-il sur un ton sarcastique.

Lois se mit immédiatement sur la défensive. Hors de question qu'elle le laisse démonter son bluff. Et tant pis si elle devait continuer d'inventer des mensonges de plus en plus lamentables et incroyables pour se couvrir.

« C'est en Arctique ! Ce n'est pas comme s'il pouvait faire du stop pour revenir ! Y'a pas beaucoup de monde qui passe dans le coin, ou le refuge secret ne serait plus secret depuis longtemps ! Et je ne suis même pas sûre qu'ils aient le journal là-bas » répliqua-t-elle sur un ton mordant.

Henderson ricana, tellement il était évident qu'elle mentait. Mais il était aussi évident qu'elle ne parlerait pas, et qu'elle garderait pour elle les confidences de Superman.

« D'accord. Et bien, je ne vous retiens pas », finit-il par dire en la laissant monter en voiture et partir, avant de remonter vers les chambres d'hôpital.

***

Henderson entra sans frapper dans la chambre sécurisée où Superman avait été ramené pour la nuit. Comme d'habitude, deux de ses hommes étaient devant la porte à monter la garde, et deux autres à l'intérieur même de la pièce. Le médecin qui devait l'examiner avant la nuit, pour noter les progrès de la journée n'était pas encore arrivé.

Il se dirigea directement vers le lit où se trouvait le super héros.

« Alors, un refuge secret en Antarctique, hein ? » demanda gentiment Henderson, avec un petit sourire de côté.

« Pardon ? » lui répondit Superman, d'un air ahuri.

Henderson étouffa un petit rire. Il était tellement évident qu'il ne savait pas de quoi il parlait. Même si Lois Lane avait réussi à mentir de façon crédible — ce qui n'était pas le cas — Superman aurait tout mis par terre.

« C'est bon, Superman. Je viens de cuisiner Lois, et elle m'a tout dit », annonça le policier sans quitter des yeux le super héros. Il remarqua aussitôt à quel point ce dernier devenait inquiet et nerveux, et il sourit.

« Oui, je sais que vous avez mis Clark en sûreté dans votre refuge secret, avant d'aller voir Luthor. »

« Oh ! » s'exclama Superman, visiblement soulagé, avant de se reprendre et de froncer les sourcils. « Elle n'aurait pas dû vous le dire, mais… enfin maintenant il est trop tard. Juste… Promettez moi que vous n'ébruiterez pas le fait que j'ai un… refuge secret, en Antarctique. »

« Promis, Superman » rétorqua Henderson en retenant un ricanement. Puis il reprit son sérieux et se pencha vers le super héros pour lui parler trop bas pour que les deux autres policiers de la pièce puissent entendre.

« Je vais vous faire une fleur, Superman, en souvenir de toute l'aide que vous avez apporté à la police dans le passé. Si vous ramenez vraiment Clark sain et sauf, et s'il n'a pas une autre version de l'histoire à nous donner, je vais accepter ça comme version officielle. Autrement, je vous jure que je ne vous lâcherais pas », lui annonça-t-il d'un air menaçant. « Et encore une chose. Vous êtes vraiment un criminel amateur. Avant de dire quoi que ce soit à la police, il fait toujours se mettre d'accord avec son complice. »

A l'air d'incompréhension sur le visage de Superman, Henderson expliqua : « Lois a dit que votre refuge était en Arctique. »

Il vit Superman rougir légèrement. Le défenseur de la vérité pris en flagrant délit de mensonge. Et il n'était pas doué.

C'est à ce moment-là qu'un médecin entra dans la pièce. Henderson se recula pour laisser le docteur examiner Superman. Mais lorsqu'il tenta de faire la prise de sang habituelle, l'aiguille se tordit au lieu de pénétrer sa peau.

Le médecin regarda l'aiguille tordu d'un air ébahi, et Superman sourit. Son invincibilité était de retour. Ses autres pouvoirs reviendraient probablement très vite maintenant. Il devrait sûrement pouvoir quitter l'hôpital dès le lendemain.

***

Dès qu'elle était rentrée chez elle, Lois avait immédiatement téléphoné aux Kent. Il était tard mais elle voulait quand même les appeler avant d'aller se coucher. Ça faisait un mois et demi qu'ils étaient inquiets pour leur fils. Ils méritaient d'être rassurés le plus rapidement possible. Et pour entendre ce genre de bonne nouvelle, Lois était sûre qu'ils ne lui en voudraient pas d'appeler aussi tard, même si elle les réveillait.

Et effectivement, elle les avait réveillés, mais ils ne lui en avaient pas tenus rigueur. Bien au contraire. Ils étaient ravis de savoir enfin que leur fils allait bien. Lois pouvait entendre qu'ils pleuraient de bonheur.

Elle avait dû leur dire, bien sûr, qu'elle connaissait le secret, et qu'elle était certaine que Clark allait bien parce qu'elle l'avait vue en personne. Elle s'était sentie un peu mal-à-l'aise de leur dire elle-même qu'elle connaissait leur secret de famille. Après tout, elle était presque une inconnue pour eux.

Elle ne les avait rencontrés en personne que deux fois seulement. La première fois, lorsqu'elle avait accompagné Clark à Smallville pour un article. Et la seconde, lorsque ses parents étaient venus à Metropolis lorsque Clark avait perdu la mémoire, et que c'était Superman qui était porté disparu.

Elle aimait vraiment bien les parents de Clark. C'étaient des personnes fabuleuses. Pas étonnant qu'il soit devenu un homme aussi merveilleux. Il avait vraiment eu de la chance d'être trouvé par eux, et non pas par des personnes moins bien intentionnées. L'histoire aurait été très différente.

Dès qu'elle leur avait donné les bonnes nouvelles, ils avaient décidé de venir à Metropolis. Si Clark était sur le point de sortir de l'hôpital, alors ils voulaient être là pour le revoir le plus tôt possible.

Ils avaient réservé aussitôt deux places pour un vol qui quittait Wichita aux aurores pour atterrir à Metropolis en milieu de matinée. Lois alla les chercher à l'aéroport.

Ils voulaient s'installer dans l'appartement de Clark en attendant qu'il puisse quitter l'hôpital, alors Lois les y conduisit. Elle fut très touchée de la façon dont ses parents l'avaient prise dans leurs bras quand elle était allée les prendre à l'aéroport. Ils l'avaient immédiatement accueilli dans la famille, et mise à l'aise en lui assurant qu'ils étaient ravis que Clark lui ait révélé son secret.

Elle avait voulu passer à l'hôpital le voir ce matin-là, avant d'aller chercher les Kent, mais elle s'était endormie tellement tard, après avoir repassé dans sa tête ce qui venait d'arriver pendant des heures, qu'elle n'avait pas su se lever assez tôt. Elle aurait voulu voir comment il allait, et lui dire que ses parents arrivaient. Maintenant qu'elle savait où Clark était, elle avait du mal à se tenir à l'écart. Mais elle s'était levée trop tard pour aller le voir avant d'aller à l'aéroport, et maintenant que ses parents étaient là, elle se sentirait trop coupable d'y aller, en sachant que eux ne pouvaient pas voir leur fils encore. Alors elle resta avec eux, dans l'appartement de Clark.

Quand ils entrèrent, elle fut surprise de constater que l'appartement ne lui semblait plus mort et froid comme la dernière fois qu'elle l'avait vu, mais juste vide. C'était incroyable à quel point le monde autour de soi pouvait paraître changé tout en restant le même, simplement parce qu'elle le percevait différemment à travers ses émotions.

Il n'avait pas fallu longtemps à Martha pour commencer à raconter à Lois toutes les histoires qui lui passaient par la tête concernant l'enfance de Clark. Lois avait vu juste. Comme toutes les mères, Martha avait rêvé de pouvoir parler de son fils à quelqu'un toute sa vie. Et Lois était plus que ravie d'être celle qui entendait tout ça.

Elles avaient de nouveau regardé les albums de photos de Clark, mais cette fois-ci, avec les commentaires et les explications de Martha, et Lois eut l'impression de l'avoir connu toute sa vie.

Sa vie était devenue pour elle un véritable livre ouvert. Son enfance heureuse. Son air triste à l'adolescence lorsqu'il avait commencé à se sentir différent à cause de ses pouvoirs qui se développaient. Ses cheveux qu'il avait laissé pousser longs parce que son invincibilité s'était déjà révélé et qu'il n'avait plus aucun moyen de se couper les cheveux. Ses voyages pour tenter de se trouver une place dans le monde… jusqu'à ce qu'il la trouve, elle.

Ce commentaire de Martha fit rougir Lois, mais elle insista.

« C'est parce que vous vivez à Metropolis, Lois, que Clark a arrêté de parcourir le Monde. Il cherchait quelque part où il se sentirait chez lui, et c'est vous qui lui avez offert ça. »

***

Plus tard dans la journée, Lois téléphona à l'hôpital pour avoir des nouvelles des progrès constatés dans l'état de santé de Superman. Elle fut ravie d'apprendre qu'il avait regagné l'intégralité de ses pouvoirs, et que les médecins étaient actuellement en train de remplir les papiers pour le laisser sortir de l'hôpital.

Dès lors, elle devint de plus en plus impatiente. Et ses parents aussi.

Ils avaient allumé la télévision et avaient vu sur LNN en direct Superman quitter l'hôpital en s'envolant. Ils s'étaient tous les trois précipités sur le balcon, s'attendant à le voir apparaître d'une seconde à l'autre, mais rien ne se produisit.

Très vite, ils devinrent de nouveau très inquiets. Mais où était-il ?

Ce n'est que deux heures plus tard qu'ils entendirent la porte d'entrée s'ouvrir. Quand ils virent Clark passer la porte, ils s'élancèrent tous vers lui à la fois pour le prendre dans leur bras.

« Mais où étais-tu ? On était tellement inquiets ! »

« Je me suis débarrassé des formalités », expliqua-t-il. « Je suis allé voir Henderson, pour lui expliquer que Superman m'avait mis à l'abri dans son 'refuge secret en Arctique' » ajouta-t-il avec un clin d'œil à l'attention de Lois.

« Je sais que c'était une excuse stupide. C'était la théorie de Jimmy », se défendit-elle.

« Et bien, c'est aussi l'histoire officielle, maintenant », conclut-t-il en souriant.

« Jimmy va être bien content d'avoir deviné la vérité », plaisanta-t-elle.

Ils passèrent tous les quatre le reste de la journée à fêter leurs retrouvailles. Ils étaient tous tellement heureux qu'il se soit remis de son exposition à la kryptonite, et qu'ils aient enfin pu le retrouver. Et lui, il était heureux de tous les revoir. Ses parents et Lois lui avaient horriblement manqués pendant les quelques jours depuis lesquels il avait repris conscience.

Le soir tomba bien trop vite au goût de chacun. Ils voulaient tous rester ensemble le plus longtemps possible. Mais les Kent s'étaient levés très tôt pour prendre leur avion, et ils dirent finalement bonne nuit pour aller se coucher dans la chambre de Clark. Clark prendrait le canapé.

Dès que Lois et lui se retrouvèrent seuls, ils devinrent un peu nerveux en présence l'un de l'autre. La veille à l'hôpital, ils s'étaient tous les deux dit qu'ils s'aimaient. A ce moment là, Lois ne savait pas qu'elle parlait à Clark, et lui, il était tellement bouleversé par ce qu'il avait fait enduré, malgré lui, à Lois, que les mots lui avaient paru naturels.

Mais maintenant qu'ils étaient seuls tous les deux, avec l'esprit plus clair, ils étaient mal-à-l'aise. Ils ne savaient pas quoi dire ou quoi faire. Ils n'étaient plus juste des amis, et pourtant ils n'étaient pas encore plus que ça non plus. Ils entraient dans un territoire inconnu et ils ne savaient pas très bien comment ils devaient agir.

Après un long moment où aucun des deux ne dit quoi que ce soit, ni ne fit aucun geste, Clark brisa le silence d'une voix incertaine.

« C'est embarrassant, hein ? »

Lois releva les yeux vers lui, et se rendit compte qu'il était aussi nerveux et gêné qu'elle ; d'une certaine façon, elle trouvait ça rassurant.

« Oui », lui répondit-elle, avec un petit sourire gêné en baissant de nouveau les yeux.

Le silence retomba entre eux, encore plus lourd qu'avant de non-dits. Elle sentait le besoin de dire quelque chose pour réduire cette distance gênée qui s'était établie entre eux, mais elle n'arrivait pas à trouver le courage de lui dire ce qu'elle ressentait. Il le savait déjà, elle lui avait déjà dit, la veille, qu'elle l'aimait, mais à ce moment-là, elle ignorait que c'était lui qu'elle avait en face d'elle, et d'une certaine façon, le dire à Clark en face à face s'avérait bien plus difficile que ce qu'elle avait jamais imaginé. Elle ne parvenait pas à briser le silence pour lui dire les mots « Je t'aime » pour la première fois.

Et il n'y avait pas grand chose d'autre qu'elle pouvait lui dire. N'importe quelle autre phrase lui paraitrait être vide de sens et ressemblerait à une tentative d'éviter le sujet. Et elle ne voulait pas qu'il croit qu'elle essayait d'éviter le sujet. Par deux fois maintenant, dans le parc et à l'hôpital, il avait trouvé le courage de lui dire en face qu'il était amoureux d'elle. Il méritait qu'elle en fasse autant. Mais c'était plus difficile qu'elle ne le pensait.

Après quelques instants de silence de plus, Clark s'approcha d'elle d'un pas hésitant et proposa :

« Tu voudrais pas qu'on aille faire un tour ? »

« Oui, bien sûr », répondit-elle avec un large sourire. Peut-être après avoir eu un peu d'air frais, elle se sentirait plus courageuse.

Elle remit ses chaussures et se leva du canapé où elle était assise et commença à avancer vers la porte.

« Euh… » objecta Clark nerveusement, « je pensais plutôt à… sortir par derrière ».

Il accompagna sa phrase d'un petit signe de tête vers la porte qui menait au balcon. Lois comprit, émerveillée, qu'il venait de lui proposer de l'emmener voler. Elle lui décocha un énorme sourire, aussi ravie qu'une enfant devant ses cadeaux de Noël et le suivit sur le balcon.

Sans se changer en Superman, il s'envola avec Lois dans ses bras. Elle avait toujours adoré voler avec le super héros, mais cette fois-ci, elle trouva le vol encore plus magique, parce qu'elle était avec Clark. C'était aussi la première fois qu'il la faisait voler juste pour le plaisir. Habituellement, il venait de la sauver de quelque chose…

La vue de Metropolis du ciel la nuit était magnifique, et Lois ne pouvait s'empêchée d'être émerveillée par tout ce qu'elle voyait. Le vol était simplement fabuleux.

Après un moment, il s'éleva encore plus haut, et perça les nuages pour lui montrer les étoiles au dessus. Lois n'avait jamais rien vu d'aussi beau. Elle ne s'était jamais sentie aussi heureuse qu'à cet instant, dans les bras de Clark, suspendue entre les étoiles et les nuages.

Quand elle ramena son regard sur lui, et le fixa dans les yeux, il brisa de nouveau le silence.

« Je t'aime, Lois », lui dit-il avec une intensité qui fit frémir Lois d'émotion.

« Je t'aime aussi, Clark. »

Elle s'était trompée. Les mots étaient sortis de sa bouche très facilement. Ils ne demandaient qu'à être prononcés et elle ne savait plus très bien pourquoi elle avait eu tant de mal à les dire, pourquoi elle s'était sentie aussi embarrassée. Il n'y avait vraiment pas de quoi. Elle se sentait tellement bien avec lui. Dans ses bras, elle pouvait se détendre complètement.

« Je t'aime tellement », répéta-t-elle, avant qu'il ne se penche vers elle et l'embrasse.

FIN